Sur ordre du Président de la République, le Ministre des Finances et du Budget avait désigné une équipe sous la supervision de l'Inspection Générale des Finances, afin d'élaborer un rapport sur la situation des finances publiques au 31 mars 2024. Ce rapport a révélé que la dette publique du Sénégal et les déficits budgétaires ont été plus élevés que ceux publiés par les autorités sortantes et communiqués aux partenaires techniques et financiers durant la période 2019-2023. Les conclusions de ce rapport ont été livrées par le ministre de l'Economie, du plan et de la coopération Abdourahmane Sarr hier, jeudi 26 septembre, lors de la conférence de presse du gouvernement.
La dette publique du Sénégal et les déficits budgétaires ont été plus élevés que ceux publiés par les autorités sortantes et communiqués à nos partenaires durant la période 2019-2023. C'est ce qu'a révélé le rapport sur la situation des finances publiques. « Le déficit budgétaire a été annoncé à une moyenne de 5.5% du PIB durant la période 2019-2023 mais en réalité, il a été en moyenne de 10.1%, soit près du double. La dette publique a été annoncée en moyenne de 65.9% du PIB durant la période 2019-2023, mais en réalité, elle a été en moyenne de 76.3% du PIB en raison des déficits publics plus élevés que publiés », a indiqué le ministre Sarr. Il souligne ainsi qu'en fin 2023, la dette de l'État central hors secteur parapublic est de 15 664 milliards, soit 83.7% du PIB, alors qu'elle était annoncée à 13 772 milliards, soit 73.6% du PIB. Il s'agit, dit-il, donc d'un supplément de dettes contractées et non publiées de près de 1 892 milliards, soit 10% du PIB de plus.
« Cette dette supplémentaire est principalement due à des tirages sur des prêts projets sur financement extérieur et des prêts contractés auprès des banques locales de façon non transparente. Sur la période 2019-2023, les tirages sur ressources extérieures non inclus dans les déficits ont été en moyenne de 593 milliards annuellement, et les prêts bancaires non inclus dans les déficits en moyenne de 179 milliards annuellement », a-t-il expliqué. Il ajoutera que le déficit budgétaire corrigé à fin 2023 s'établirait aux alentours de 10% du PIB, en intégrant les tirages sur ressources extérieures et les prêts auprès des banques, alors que le déficit annoncé était de 4.9%, soit plus du double.
Au-delà de ces chiffres sur le déficit et la dette, l'audit a révélé que le sur-financement du Trésor public d'environ 605 milliards de FCFA à fin 2023, convenu avec le FMI et réservé pour l'année 2024, a été utilisé pour payer des dépenses non budgétisées et des dettes connues de l'État, contrairement à ce qui avait été communiqué aux partenaires. « La non-disponibilité de ce sur-financement en 2024 a nécessité des emprunts non initialement programmés, notamment l'émission d'euro-bonds par placement privé de 750 millions USD en juin 2024, et des crédits commerciaux syndiqués de 300 millions d'euros au troisième trimestre », a relevé Abdourahmane Sarr.
Par ailleurs, il informe qu'en conséquence, et en attendant la finalisation de l'audit des finances publiques, le gouvernement avait décidé de ne pas porter le dossier du Sénégal au Conseil d'Administration du Fonds Monétaire International suite à leur mission de revue de juin 2024. « L'examen du dossier du Sénégal sur la base de chiffres erronés aurait conduit à un cas de « misreporting » ou « de transmission de fausses informations » pour bénéficier des tirages prévus sur les ressources du FMI. La conséquence de la transmission de données erronées pour bénéficier de tirages est le remboursement des ressources mobilisées à moins de bénéficier d'une dérogation sur la base de mesures correctrices crédibles approuvées par le FMI », soutient-il.
Selon lui, le gouvernement a donc choisi la voie de la transparence, soulignant que le Fonds Monétaire International a été informé des résultats de l'audit des finances publiques, et le gouvernement du Sénégal sera en discussion avec leurs services pour les mesures correctives qu'il compte mettre en oeuvre.
« Ces mesures seront mises en oeuvre, soit dans le cadre du programme en cours avec le FMI pour mettre les finances publiques sur la trajectoire initialement convenue, ou dans le cadre d'un nouveau programme à négocier à très court terme et à mettre en cohérence avec le nouveau référentiel des politiques publiques », a-t-il fait part. Et de poursuivre : « en tout état de cause, ce qu'il faut retenir est que ce qui sera convenu avec le Fonds Monétaire International sera le programme du Gouvernement afin de mettre notre déficit budgétaire et notre dette sur une trajectoire soutenable et à un niveau de risque modéré voire faible à moyen terme.