Cote d'Ivoire: L'accompagnement psychologique des femmes qui ont dû avorter reste tabou

Nous sommes le 28 septembre, Journée mondiale pour le droit à l'avortement. En Côte d'Ivoire, les interruptions volontaires de grossesse sont illégales et tolérées en cas de viols, d'inceste ou encore lorsque la grossesse met en danger la santé physique ou mentale de la mère.

La pratique est également réprouvée socialement, tout en restant très fréquente. Chaque année, de 209 000 à 288 000 avortements sont pratiqués dans le pays, souvent clandestinement, selon l'étude PMA2020, menée, entre autres, par l'École de santé publique Johns-Hopkins de Baltimore et financée par la fondation Gates. Il s'agit de l'étude la plus complète en la matière.

Dans ce contexte, la question de l'accompagnement psychologique des femmes concernées reste tabou ainsi que le révèlent les témoignages recueillis par RFI.

Nous l'appellerons Denise. Il y a une quinzaine d'années, son oncle la viole. L'adolescente tombe enceinte et, pour éviter le scandale, elle doit avorter près d'un marché du nord d'Abidjan : « C'était un moment très traumatisant parce que la pratique se faisait dans des endroits où même où l'on ne pouvait penser qu'une jeune fille pouvait rentrer. »

Mais ce n'est rien par rapport à ce que Denise ressent contre elle-même : « J'avais du dégoût pour moi-même. Je ne m'aimais plus. »

Et à cela s'ajoute la peur de la stigmatisation d'une « ado avortée » : « C'est comme si elle avait commis un crime et que personne ne devait s'approcher d'elle pour ne pas qu'elle contamine les autres enfants. »

Aujourd'hui trentenaire, Denise n'a jamais bénéficié d'écoute... Elle dit avoir construit une carapace mais, pour le psychologue Nour Bakayoko, les thérapies sont nécessaires pour les survivantes d'avortements clandestins : « S'il n'y a pas de suivi, on risque d'avoir des troubles dépressifs, mais ce qui est un peu plus grave, on risque d'avoir plus de tentatives de suicide. Voilà pourquoi l'accompagnement est important parce que cela nous permet de ne pas en arriver là. »

Nour Bakayoko a contribué à former 90 militants à ces premiers soins psychologiques, avec le soutien du mouvement ODAS qui plaide pour l'avortement sécurisé en Afrique francophone, et du Collectif des Activistes de Côte d'Ivoire (CACI). Parmi les militants formés, figure Denise qui veut ainsi aider les femmes dans son cas.

Les soins médicaux et psychosociaux apportés aux femmes qui ont dû avorter ne sont pas interdits en Côte d'Ivoire.

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