Centrafrique: Le gouvernement réagit au rapport qui dénonce une «mafia» dans le secteur des hydrocarbures

A la suite de la publication d'un rapport au vitriol du Groupe de travail de la société civile (GTSC) qui met en cause les autorités dans les pénuries de carburant à répétition et les prix à la pompe très élevés en République centrafricaine (RCA), le ministre des Hydrocarbures, Arthur Bertrand Piri, se défend.

Sollicité par RFI, le gouvernement centrafricain a répondu, vendredi 4 octobre, au rapport du Groupe de travail de la société civile (GTSC) intitulé « La mafia dans le secteur pétrolier en Républicaine centrafricaine », un document dans lequel le GTSC met en cause les autorités à plusieurs reprises.

Il critique notamment le contrat de monopole d'importation passé par le gouvernement avec la compagnie camerounaise Neptune Oil, dénonce les mensonges de cette entreprise sur le prix des carburants et épingle le travail du comité en charge de la lutte contre la contrebande.

D'une façon générale d'abord, le ministre centrafricain des Hydrocarbures, Arthur Bertrand Piri, estime que le GTSC,« ce groupe soi-disant de la société civile, prend généralement position contre toutes les actions du gouvernement », et affirme qu'il est « très proche de l'opposition ». Concernant le rapport, celui-ci juge ensuite qu'il contient « trop de contre-vérités. La vérité, c'est que c'est Tamoil qui a amené Neptune en République centrafricaine. Aucune autorité centrafricaine ne connaissait l'entreprise Neptune auparavant. Tamoil est arrivée dans une situation confuse après la cession de Total qui était parti sans en informer les autorités du pays. Tamoil m'a dit venir en groupement avec Neptune, qu'elle s'occuperait du volet opérationnel de la distribution dans les stations-services, et que Neptune livrerait le carburant. Voilà comment Neptune est donc arrivée sur le marché centrafricain », explique-t-il dans un premier temps.

« Tamoil est une société en train de mourir sous le poids des dettes ».

A propos des critiques émises par le rapport contre Tamoil, le repreneur de Total en RCA qui n'a pas obtenu d'agrément depuis un an et dont les stations ont été réquisitionnées depuis juin, Arthur Bertrand Piri en dénonce les agissements. Selon lui, la compagnie ment au gouvernement et à ses partenaires depuis plus d'un an.

« Il y a eu un problème entre Neptune et Tamoil. Neptune livrait les produits à Tamoil. Et malheureusement, Tamoil vendait le produit, refusait de payer son associé Neptune, et également de reverser les taxes collectées sur la vente des produits. Il y a par conséquent eu divorce entre les deux [entités] et on s'est retrouvé dans une situation de pénurie dans les stations. J'ai pu juger normal de demander à Neptune d'approvisionner le marché directement en déposant le produit, et depuis que Neptune a repris l'approvisionnement, il n'y a plus de pénurie. Tamoil n'a pas d'agrément aujourd'hui car l'entreprise n'a pas de surface financière, poursuit-il. Tamoil doit 8 milliards de francs CFA - environ 12 millions d'euros - à des banques de la place, 4 milliards de francs CFA au fisc centrafricain et 2 milliards à son ex-associé Neptune. C'est donc une société en train de mourir sous le poids des dettes ».

Aux critiques sur la convention d'exclusivité d'importation passée avec Neptune que le GTSC juge illégale en vertu de la loi de 2007 qui prévoit la libéralisation du marché, le ministre des Hydrocarbures répond que cette loi « stipule qu'il faut lancer un appel d'offres. Or, depuis qu'elle a été promulguée, le comité qui devrait s'en occuper n'a pas été mis en place. De ce fait, nous sommes passés par la voie directe, c'est une procédure légale qui existe, se défend-t-il. Neptune maîtrise le circuit d'importation des produits pétroliers et prend sur elle l'ensemble des risques. La pénurie est donc définitivement réglée, la distribution de produits pétroliers dans la ville de Bangui est fluide et la quantité de produits mise en consommation augmente sans cesse. Nous sommes en train d'aller en province pour distribuer les produits pétroliers, ce qui n'a pas été fait depuis plus de 10 ans », enchaîne ensuite celui-ci.

« Quand un policier attrape un taxi qui n'a pas de papiers, que fait-il ? »

En ce qui concerne les accusations de surfacturations cachées par Neptune sur le processus d'importation alors que le prix à la pompe est le plus élevé du continent, Arthur Bertrand Piri renvoie le GTSC au rapport du FMI. « Avant que Neptune arrive, Total et Tradex opéraient et facturaient davantage. Donc cette question ne se justifie pas. Avec le Fond monétaire international, nous nous sommes mis d'accord pour trouver un cabinet pour faire l'audit des coûts d'approche, autrement dit l'ensemble des frais accessoires liés à cette activité. La procédure est en cours, il faut en attendre les résultats », riposte celui-ci.

Enfin, aux accusations qui pèsent sur le comité en charge de la lutte contre la contrebande qui ne ferait que « blanchir » les produits avec des mains levées sur les saisies en échange d'amendes, le ministre rétorque : « Quand, dans la lutte contre la fraude, un douanier attrape des marchandises, que fait-il ? Il liquide les droits et prend les pénalités. Quand un policier attrape un taxi qui n'a pas de papiers, que fait-il ? Il rappelle les droits et prend les pénalités. N'oublions pas que nous sommes dans un pays fragile : le comité fait appel à la douane et je pense que c'est comme ça qu'il faut procéder. Je ne sais pas quelle méthode propose la société civile. reprend-t-il ensuite avant de conclure : Le comité fait son travail comme un douanier fait son travail et comme un policier ou un gendarme fait son travail, à savoir dans le cadre de la réglementation, des amendes et des droits de l'État. C'est comme ça que les choses se passent ».

Arthur Bertrand Piri tient enfin à faire savoir qu'un cabinet est en train d'être missionné par le gouvernement et le FMI pour mener un audit sur les coûts d'importation des produits pétroliers en République centrafricaine.

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