La République malgache est construite sur un double fondement, ethnique conformément au pouvoir monarchique, et occidental conformément à l'administration française fortement centralisée à l'époque coloniale. Des divisions claniques et ethniques cachées restent encore vivaces. Elles réapparaissent à chaque période sensible. Par ailleurs, le fonctionnement d'un Etat très centralisé tourne autour d'un parti dominant entouré d'une multitude de partis sans structure, sans couverture territoriale, sans formation des adhérents.
Dans un pays sous-développé, ceci produit non seulement un sur pouvoir au sommet mais un fiasco de l'Etat à la base et contribue également à l'exode de la population rurale vers des villes débordées, insalubres et anarchiques. La bombe de l'explosion démographique ne fait qu'amplifier les effets nocifs de ce phénomène.
Créer des villes nouvelles sans modifier en profondeur les structures anciennes, c'est greffer plus tard autour de ces nouvelles villes la pauvreté et les mauvaises habitudes anciennes dont il fallait extirper les racines. Aujourd'hui, nous voyons dans quel état sont devenues les villes nouvelles de Mandroseza, d'Analamahitsy, d'Ambohipo, de 67 hectares et d'Ampefiloha durant la Ière et la IIème Républiques.
Dans un autre contexte, nous avons un parti du pouvoir qui s'appuie sur des partis satellites et sur les prérogatives des puissances publiques, sans avoir une opposition démocratique solide où les opposants sont muselés et même persécutés . Or, un État républicain marche sur deux pieds, l'un étant celui du pouvoir, l'autre celui de l'opposition. Les partis politiques malgaches ont en général oublié que l'une de leurs raisons d'être est d'éduquer le peuple malgache à mieux vivre ensemble dans le respect des lois et des Institutions de la République. Cette carence se traduit par la faillite de l'État surtout à la base.
D'un autre côté, la culture électorale prend ses racines sur des défaillances organisationnelles des élections et des détournements de voix avec des savoir-faire de plus en plus subtils. Le transfert de l'organisation électorale du ministère de l'Intérieur à la CENI n'a pas jusqu'à présent donné des résultats convaincants. Les falsifications habituelles des élections, la corruption à tout les niveaux et les dysfonctionnements des Institutions produisent une culture de désobéissance à la loi.
Tout dépend de notre volonté de mettre fin à cette situation. Il nous faut libérer la parole de tous les Malgaches jusqu'à la base (any ifotony), et organiser des structures de dialogue.
Cette refondation devrait aboutir non seulement à améliorer la forme et le fond d'une constitution conforme à notre histoire et à notre culture que nous devons absolument appliquer avec rigueur et honnêteté, mais également à garantir le bon fonctionnement de l'État de droit, à développer équitablement les Régions, à restructurer l'organisation de la vie politique et à élever le niveau de l'éducation et le niveau de vie des Malgaches.
Extrait du livre d'André Rasolo « Regards sur la vie politique de Madagascar de 1960-2020 »