Ile Maurice: Liseby Elysée - «Mo ti a kontan si zordi mem mo ti dan Sagos...Monn anvi al mor laba»

Une belle-mère pleine d'espoir. «Eski pou gagn enn ti kas sa?» À Baie-du-Tombeau, hier, le vendredi 4 octobre, la nouvelle de l'accord entre Maurice et le Royaume-Uni, pour le restitution de la souveraineté sur l'archipel des Chagos, a fait (re)naître l'espoir de lendemains meilleurs. Particulièrement dans la ti lakaz tol de la belle-mère d'Alain Volfrin. «Mon gendre est Chagossien. Il m'a promis que s'il reçoit un peu d'argent, il va m'aider à reconstruire ma maison en dur. Ou kone mo dan lapriyer mwa. Mo krwar bondie pe fer kiksoz», confie-t-elle les yeux brillants. Ce qu'Alain Volfrin confirme. Lui qui depuis 19 ans «travay dan kamion salte»

À 55 ans, ce natif de Peros Banhos n'espère qu'une chose. «Mo dir ou fran, pouvi gouvernmanla donn nou enn pansion.» Une rente «à vie» uniquement aux natifs de l'archipel, souhaite-t-il. «Sa pou kapav tir nou dan enn bann problem». Il pense en premier au logement de sa belle-mère, avant de souligner que sa propre maison, «li kapav beton, me li tol lao», faute de moyens.

Dans ces conditions, comment envisager de construire un étage pour accommoder ses deux enfants, dont l'aîné a 19 ans ? La maison a été construite sur les sept perches reçues en guise de compensation par ses parents. Qu'en est-il d'un retour éventuel dans son île natale? Alain Volfrin n'est pas chaud. *«Mo kapav inn ne laba, me monn grandi Moris.» *Il a vécu à l'ex Dockers' Flat avant de s'installer à Baie-du-Tombeau depuis qu'il a 18 ans. Et mettre le cap sur le Royaume Uni ? «Sa pa interess mwa. Mo lopinion se ki nou ti bizin gagn enn pansion a vi, pou nou kapav viv.»Toutes ces annonces aideront-elles Alain Volfrin financièrement à améliorer la case en tôle de sa belle-mère ?

La douce voix de Liseby Elysée nous transporte loin de ces préoccupations immédiates. Celle dont les larmes avaient ému la Cour internationale de justice, en septembre 2018, est «bien kontan, satisfe» de l'accord annoncé le jeudi 3 octobre. «Nounn bien marse», rappelle-t-elle. Elle a aussi pris la mer, lors de la traversée jusqu'au récif Bleinheim en février 2022. «Mo ti a kontan si zordi mem mo ti dan Sagos», confie cette native de Peros Banhos. À 71 ans, elle aspire à retrouver son île natale. «Retourn kot monn pran nesans. Monn anvi al mor laba. Aster ki pou gagn sa», s'enthousiasme-telle.

Dans l'accord, un point fait sourciller certains. Celui qui stipule que pour une période initiale de 99 ans, le Royaume-Uni sera autorisé à continuer l'opération de la base militaire de Diego Garcia, mais sous les droits souverains mauriciens. «Vre? Sannla mo pann tande mwa», s'étonne Liseby Elysée. «Apre 99-an, tou dimounn fini mor.»Emilienne Louis a les jambes percluses de douleur mais la tête un peu ailleurs, dans son île natale, Peros Banhos.

Les jambes percluses de douleur, Emilienne Louis aussi rêve de rentrer chez elle, à Peros Banhos. À 73 ans, celle qui a fait la traversée vers 10-11 ans, elle ne sait plus exactement, raconte dans un grand flot de mots comment elle n'est jamais retournée dans son île natale depuis.

Comment à 10-11 ans, «sa kalite mo ti kontan pou vinn Moris-la». À bord du bateau, elle ne comprenait pas pourquoi «tou gran dimounn ti pe plore». Les tracas du quotidien se sont chargés de lui faire comprendre que «nou finn kit paradi pou vinn dan lanfer». Emilienne Louis raconte aussi comment, en 2006, tout était prêt pour qu'elle fasse le voyage, mais que «mo mari inn mor zis sa zour deparla. Depi sa zame mo pa finn kapav ale».

Un défunt mari qui était aussi d'origine Chagossienne. Dans sa tête, Emilienne Louis s'y voit déjà. Traversant le «wharf». Passant «kot lalimier». Bifurquant «dan kwin legliz. Depi lamem mo pou diboute, mo pou dir ala mo lakaz laba». Parce que «si fer mwa res laba, mo pou reste».

De quoi oublier les jours où elle a travaillé «lakaz madam, lizinn pasti, dan karo kas pistas». Et se souvenir à son aise des jours où son frère les régalait avec de la compote de fruit à pain.

Silvio Baptiste, vice-président de l'association Chagos Asylum People, qui existe depuis 2019, reste prudent. Si sa famille est native de Salomon, lui est né à Maurice. Il se voit retourner sur la terre de ses ancêtres ? «Be kifer ti tir nou laba? Mo mama, mo papa inn mor ek lasagrin», s'insurge celui qui est aussi conseiller de district de Rivière-Noire. «Aster ou krwar mo pou aksepte seki inn dir-la?» Méfiant, il estime : «Angle pa pou donn gouvernman Moris seki li pe rode.»

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