Burkina Faso: Lutte contre le terrorisme - « Nous allons combattre jusqu'à ce qu'ils soulèvent, eux-mêmes, le drapeau blanc », Ibrahim Traoré

Le Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, a échangé avec les auditeurs sur la Radio nationale au cours de l'émission antenne direct, samedi 5 octobre 2024. Durant environ 1h30mn, le chef de l'Etat a répondu aux questions de nombreux auditeurs se rapportant à la situation nationale dont la lutte contre le terrorisme.

S'adressant au Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, plusieurs questions ont été abordées par les auditeurs de la Radio nationale au cours de l'émission antenne direct, du samedi 5 octobre 2024. La question sécuritaire, la lutte contre le terrorisme ont beaucoup intéressé les intervenants.

Sur les multiples tentatives de déstabilisation que le pays connait çà et là, le Président Ibrahim Traoré a affirmé n'avoir jamais été ébranlé par ces faits car, disposé, dès le début, à sacrifier sa vie et sa jeunesse pour la patrie. « Cela ne nous ébranle pas, mais nous donne le courage d'avancer. A travers ces évènements, nous savons que la ligne directrice que nous avons adoptée est la meilleure pour notre patrie », a-t-il rassuré tout en mettant en garde les comploteurs qui doivent assumer leurs actes.

Du reste, de son avis, dans un tel contexte, il faut s'attendre aux déstabilisations parce que la dynamique enclenchée a touché aux intérêts individuels. « Si vous voulez redresser la barre d'un pays comme le nôtre, forcément, vous êtes obligez de sévir. Et, en sévissant pour redresser, vous vous créez des ennemis internes et externes. Il faut s'attendre à ces situations de déstabilisation, d'assassinat et autres parce que nous avons touché aux intérêts de beaucoup de personnes », a-t-il affirmé. Il a soutenu avoir mesuré les risques et accepté la mission qu'il a décidé d'accomplir pour la libération des Burkinabè.

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Barsalogho et moi, une histoire

« Pour notre mission, on s'est dit ça passe ou ça casse. Dieu merci, nous avons pu réussir la mission pour imprimer notre vision des choses à notre pays. Dans notre combat pour la liberté, nous avons des pays extérieurs sur le dos, mais nous n'avons pas le choix. Nous devons poursuivre sur notre lancée, si nous voulons que nos enfants aillent à l'école sans payer 5 F, si nous voulons mieux soigner nos populations, il va falloir empêcher certaines puissances de nous piller », a fait savoir le président du Faso.

Par ailleurs, il a rappelé qu'après chaque attaque, il y a une analyse de la situation pour savoir ce qui a marché et non. Et, pour ce qui est du cas précis de l'attaque de Barsalogho, le chef de l'Etat a affirmé qu'il était personnellement visé.

« Barsalogho et moi, il y a une histoire », a-t-il rappelé, en substance, expliquant avoir défié beaucoup de choses, en 2022, pour s'interposer pour que Barsalogho ne « tombe pas ».

« Ils ont ciblé Barsalogho parce que ça allait me toucher », a relaté le capitaine Ibrahim Traoré. Selon lui, des enquêtes ont été menées et des sanctions sont attendues, après réception du rapport. Ceux qui sont tombés pendant cette attaque, a-t-il declaré, sont des martyrs et les enfants sont déclarés pupilles de la Nation. Sur la récurrence des attaques, le capitaine Ibrahim Traoré a déploré la grande compli-cité qu'il y a dans la lutte. Toute chose qui, à l'entendre, la rend très difficile.

« La complicité est très grande. Cela rend très difficile le combat. Nous prenons cela comme une difficulté », a-t-il précisé. Pour permettre aux Forces combattantes d'être encore plus opérationnelles sur les théâtres des opérations, le président du Faso a fait savoir que le nombre de recrues en leur sein a doublé en deux ans d'exercice du pouvoir. « Nous sommes en train de recruter.

Et, sur les deux années, nous avons près de 30 000 recrues au niveau de l'armée seulement. Nous avons doublé le nombre », a relevé le chef de l'Etat. Il a, toutefois, précisé que ces recrutements se font en tenant compte des exigences de la formation. « Nous partons à notre rythme pour bien former, parce qu'il ne faut pas bâcler la formation. Il faut recruter, mais aussi bien former les soldats », a-t-il insisté.

Le moral des troupes au beau fixe

Il a saisi l'occasion pour exprimer sa gratitude aux partenaires du Burkina Faso, notamment les pays de l'AES, qui contribuent fortement à la formation des soldats burkinabè. Ibrahim Traoré a indiqué qu'à la suite de la dynamique enclenchée par la Transition, certains pays occidentaux ont cessé leur coopération militaire avec le Burkina.

Des pays voisins, a-t-il ajouté, ont aussi arrêté les rapports militaires qu'ils avaient avec le Burkina. « Nous avons répondu par la réciprocité. Et, nous nous sommes rendu compte que nous pouvions former nos soldats nous-mêmes. C'est l'occasion de remercier certains pays, ceux de l'AES notamment, qui nous ont permis d'envoyer nos soldats chez eux pour les former.

Nous avons aussi envoyé des soldats au Togo pour suivre des formations », a-t-il souligné. En termes de coordination dans la lutte contre le terrorisme au sein de l'espace AES, le président du Faso a soutenu qu'elle se passe bien. En effet, il a déclaré que des officiers de liaison ont été mis en place immédiatement dans chaque pays et des Burkinabé, au Mali et au Niger, participent au centre des opérations.

Toutefois, a fait remarquer le chef de l'Etat, l'AES est la cible de ceux qui ne veulent pas voir les Africains s'unir, d'où la multiplication des attaques dans l'Espace. « Nous arrivons à très bien coordonner, à nous appuyer mutuellement tant que nous pouvons. Donc, actuellement, c'est la force sahélienne qui est en gestation, ce que vous appelez forces conjointes.

Il y aura un Etat-major unique qui sera donc mis en place avec une très grande force pour pouvoir agir dans tout l'Espace », a-t-il détaillé. Mais, sur le terrain, le capitaine Ibrahim Traoré a assuré que le moral des troupes est au beau fixe dans leurs actions de lutte contre le terrorisme. « Quand on est militaire, il y a un état d'esprit qui est là. Dans la tête du militaire, quand il part c'est avec fierté.

Beaucoup de militaires sont fiers actuellement d'être militaires », a ajouté le capitaine Traoré, qui a rappelé que les situations de déstabilisation ne les affectent pas mais les renforce. « Ils savent mieux pourquoi, ils doivent se battre », a-t-il lancé. Est-il est envisagé l'ouverture de commissariat de police dans les communes qui n'en disposent pas ? Répondant à cette question d'un auditeur, l'invité de la Radio nationale a affirmé que la gendarmerie va désormais se consacrer uniquement à la sécurisation des zones rurales conformément aux termes du Conseil des ministres qui a modifié l'architecture de la sécurité.

Harmoniser les documents de voyage au sein de l'AES

« On avait des cas où il y avait la présence de forces doubles et dans d'autres où il n'y a quasiment pas de forces. Nous avons décidé de prendre un décret pour que toutes les communes soient dotées d'une force. Ce redécoupage a été fait et nous avons donné un délai à ces deux forces pour se réorganiser et s'adapter », a laissé entendre le capitaine Ibrahim Traoré.

Relativement à la libre circulation des personnes et des biens dans l'espace de la Confédération des Etats du Sahel, le chef de l'Etat a annoncé la mise en place d'une carte d'identité et un passeport commun pour les populations. L'objectif étant selon lui, d'harmoniser un certain nombre de documents, de voyage mais aussi d'identité. D'ailleurs, a laissé entendre le président du Faso, des équipes gouvernementales des trois Etats se sont déjà réunies pour réfléchir sur cette question.

Et bientôt, à en croire le président du Faso, les choses devraient se préciser en vue de faciliter la mobilité des personnes et des biens, ajoutant même que des mesures seront mises en oeuvre pour lutter contre le phénomène des rackets sur les voies. « Des instructions fermes ont été données déjà au ministre de la Sécurité pour commencer à sévir contre cette pratique de raquette », a précisé le capitaine Ibrahim Traoré. Il sera possible, selon le capitaine Traoré, de faire des dénonciations jusqu'au plus haut niveau afin que des sanctions soient prises à l'encontre des éventuels racketteurs. Est-ce que les 30% du territoire national qui échappe au contrôle des Forces combattantes pourront être récupérés en 2025 ?

2025, une année décisive

A cette interrogation d'un auditeur, le président du Faso a confié que l'année 2025 sera décisive. En effet, la lutte va aller très vite, selon le président Traoré.

« Le souhait est que si demain on peut reconquérir les 30%, on le fera. Si vous constatez, ces derniers temps, les opérations ont un peu ralenti dû à la saison pluvieuse.

La saison pluvieuse est en train de finir, donc les opérations vont se relancer Je disais à certains que le matériel que j'ai remis dernièrement aux Forces, personne ne le voit sur le terrain d'abord. Les gens s'entraînent. L'équipement est là. La lutte va aller très vite. La lutte va reprendre sans crainte », a expliqué le capitaine Ibrahim Traoré. Au passage, le Président Traoré a annoncé l'acquisition à venir d'équipements militaires plus performants et l'accroissement des effectifs pour continuer la reconquête du territoire.

Sur la question relative à la réconciliation avec les groupes terroristes, le chef de l'Etat a réaffirmé son opposition à discuter avec des bandits armés. Parlant de réconciliation, il a confié avoir reçu des correspondances de particuliers pour proposer leurs stratégies dans le sens de la cohésion sociale et de la réconciliation nationale. Mais, pour le chef de l'Etat, on ne peut pas réconcilier les Burkinabè, selon leur vision. Car, a relevé le capitaine Traoré, il y a des gens qui ont détruit ce pays et s'ils ont des problèmes en justice ou des problèmes avec la société, il faut que cela soit résolu.

« Qui est en conflit avec qui ? Nous sommes en conflit avec des bandits armés et nous ne pouvons pas dialoguer avec ces gens-là. Nous allons combattre et tant que, eux-mêmes, ils ne soulèvent pas le drapeau blanc pour venir, nous n'allons pas les laisser », a-t-il martelé.

L'extradition de Paul Henri Sandaogo Damiba ?

Concernant l'extradition de l'ancien Président, Paul Henri Sandaogo Damiba, exilé au Togo, depuis début octobre 2022 et mêlé dans les tentatives de destabilisation , le Président Ibrahim Traoré a dit espérer son extradition par les autorités togolaises. A écouter, le Président du Faso, le gouvernement a repris les discussions avec les autorités togolaises sur cette question, ajoutant ne rien promettre pour l'instant mais l'espère.

« En toute honnêteté, au départ, on n'a pas voulu être désagréable avec un ancien président. Nous communiquons avec les autorités togolaises et elles-mêmes ont été surprises de l'agissement de Damiba avec les terroristes dans le drame de Barsalogho », a regretté le chef de l'Etat. Revenant sur l'importance du Discours d'orientation politique (DOP) prononcé par le capitaine Thomas Sankara, le capitaine Ibrahim Traoré a fait savoir que son contenu est toujours d'actualité.

En effet, pour le Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, le DOP est un référentiel que certains pays de la sous-région ont utilisé pour se développer. C'est pourquoi, le gouvernement s'en inspire et l'adapte au contexte actuel. « Thomas Sankara était trop en avance sur son époque et tout cela fait qu'il n'a pas été compris. Il voyait des choses que les autres n'avaient pas la possibilité de voir.

Nous avons la même vision pour une souveraineté totale de notre pays », a-t-il soutenu. Du reste, au cours de ce grand oral, le président du Faso a réitéré ses vives félicitations et encouragements à tous ceux qui se battent pour le Burkina Faso

notamment les FDS et les VDP tout en les invitant à maintenir le cap, à avoir beaucoup de courage. A tous ceux qui ont perdu des proches, il a présenté ses condoléances et souhaité prompt rétablissement à tous les blessés.

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