Au Mali, le procès en appel de l'économiste Etienne Fakaba Sissoko devait se tenir ce 7 octobre 2024. Ancien conseiller à la présidence ou à la primature, devenu voix critique des autorités de transition, il avait été condamné en mai dernier à deux ans de prison dont un an ferme et à payer des dommages et intérêts à l'État de 3 millions de francs CFA, notamment pour « atteinte au crédit de l'État ». En cause : un livre publié fin 2023 dans lequel il dénonçait la « propagande » du gouvernement malien de transition. Mais hier, l'audience prévue n'a porté que sur sa demande de mise en liberté provisoire et, pour le moment, Etienne Fakaba Sissoko reste détenu.
Sa première déception, racontent les proches d'Etienne Fakaba Sissoko, est d'être reparti, à l'issue de l'audience, à la maison d'arrêt de Kenioroba, à 75 kilomètres de la capitale du Mali. Mais sa déception la plus grande est de ne pas avoir été jugé sur le fond : contre toute attente, seule sa demande de mise en liberté provisoire avait été inscrite sur le rôle de la Cour.
Son avocat a donc soulevé des arguments professionnels - l'économiste enseigne à la Faculté des sciences économiques et de gestion de Bamako et prépare la deuxième phase du concours du Conseil africain et malgache pour l'enseignement supérieur,- ou encore des arguments familiaux et sanitaires - Etienne Fakaba Sissoko est diabétique, père de famille et sa mère, âgée et diabétique elle-même, vit sous son toit.
Détention préventive et délai raisonnable
Maître Marouf Sacko a surtout rappelé qu'Etienne Fakaba Sissoko était détenu depuis de manière préventive depuis le 25 mars dernier, une durée qui dépasse selon lui le « raisonnable », alors qu'il existe des mesures alternatives, comme une libération sous contrôle judiciaire strict, avec assignation à résidence ou encore remise du passeport.
Sollicité par RFI, le procureur près la Cour d'appel de Bamako n'a pas donné suite.
L'entourage d'Etienne Fakaba Sissoko garde « confiance » : un proche assure « continuer de croire qu'il existe au Mali des magistrats valeureux capables de rendre justice malgré les pressions politiques ». Le délibéré sur la demande de mise en liberté provisoire est fixé au lundi 14 octobre prochain.
Aucun trouble
Etienne Fakaba Sissoko attend surtout avec impatience une date pour être jugé sur le fond : depuis le début de la procédure, sa défense dénonce un procès politique d'intimidation, explique que son livre ne contient que des vérités factuelles et connues et des déclarations publiques, et que sa publication n'a d'ailleurs suscité aucun « trouble ». Au point que le ministère public, à l'origine de la procédure, n'a pas même jugé utile de demander que le livre soit retiré du marché.
L'organisation de défense des droits humains Amnesty international considère que la détention d'Etienne Fakaba Sissoko est « arbitraire », qu'il doit être « libéré » et sa peine « révoquée ».