Ile Maurice: «Laissez-nous décider»

Nigel Farage exige que le Parlement britannique puisse se prononcer avant que le traité ne soit signé

Le débat autour de l'avenir des îles Chagos suscite de vives réactions au Royaume-Uni et parmi la communauté chagossienne à travers le monde. À la reprise des travaux hier, Nigel Farage, chef du parti Reform UK, a interpellé le ministre des Affaires étrangères, David Lammy, pour demander un débat urgent à la Chambre des communes. Il qualifie de «capitulation» la décision du gouvernement britannique de céder la souveraineté des îles Chagos à Maurice.

Selon Nigel Farage, cette décision met en péril la sécurité du Royaume-Uni, affaiblissant la position géopolitique du pays, notamment face à des rivaux tels que la Chine. Il déplore également que cette décision n'ait pas été mentionnée dans le manifeste du Parti travailliste de Keir Starmer, ce qui, selon lui, empêche un débat démocratique approfondi avant la signature du traité.

Nigel Farage a d'autres objections au sujet de cette décision du Royaume-Uni de reconnaître la souveraineté de Maurice sur l'archipel des Chagos. Pour lui, la résolution de cette affaire pourrait créer des précédents pour d'autres territoires britanniques comme les îles Falkland et Gibraltar. Selon lui, cet accord menace non seulement la sécurité du Royaume-Uni mais aussi celle de ses alliés, notamment des États-Unis, qui disposent d'une base militaire stratégique sur l'île de Diego Garcia, la plus grande des îles de l'archipel des Chagos. Dans la lettre qu'il avait envoyée à David Lammy, le 5 octobre, il avait exigé que le Parlement puisse examiner et se prononcer sur cette décision concernant les Chagos avant que le traité ne soit signé.

«We want a voice...»

En parallèle à cet appel politique, la communauté chagossienne continue à se mobiliser. Hier, des membres de l'association Chagossian Voices ont organisé une manifestation pacifique devant la Chambre des communes à Westminster pour dénoncer, une nouvelle fois, leur exclusion des discussions concernant l'avenir de leur territoire. Munis de banderoles, plus d'une centaine de manifestants ont exprimé leur colère face à ce qu'ils perçoivent comme de l'indifférence à leur égard. «We want a voice. Let us decide. Stop abusing human rights. We want self dertermination», ont-ils scandé.

Les manifestants dénoncent le mépris et l'exclusion systématique des Chagossiens de la table des négociations concernant leur propre terre. Ils affirment avoir appris l'existence de cet accord par la presse et expriment leur frustration d'être constamment mis à l'écart des discussions qui détermineront leur avenir. «Les points de vue des Chagossiens, les habitants autochtones des îles, ont été systématiquement ignorés, et nous exigeons d'être pleinement inclus dans la rédaction du traité», a déclaré un porte-parole de l'organisation. Jemmy Debora Simon, une autre voix de la communauté, souligne avec force que ni Maurice ni le Royaume-Uni ne peuvent prendre des décisions sans le consentement des Chagossiens : «Même si nous ne sommes qu'une poignée, nous ferons entendre notre voix.»

Ce sentiment d'injustice est partagé par de nombreux Chagossiens, aussi bien au Royaume-Uni qu'à Maurice, où un rassemblement similaire a eu lieu, à Roche-Bois. Le coeur de la question reste l'avenir de Diego Garcia, la plus grande île de l'archipel, qui abrite une base militaire stratégique pour les États-Unis et le Royaume-Uni. Cette présence militaire a permis aux discussions de progresser dans un contexte de rivalités géopolitiques croissantes dans l'océan Indien.

Toutefois, pour les Chagossiens, la question va au-delà de la souveraineté, elle concerne leurs droits fondamentaux. Les participants ont critiqué l'accord, affirmant que les Chagossiens devraient avoir leur mot à dire dans ces négociations. La question de leur réinstallation sur deux des îles de l'archipel, excluant Diego Garcia, est également source de frustration. Les manifestants dénoncent le manque total d'infrastructures sur ces îles, les rendant inhabitables à court terme. «Comment les gens vont-ils faire pour s'y installer ? Combien de temps cela prendra-t-il pour rendre ces îles habitables ?», se demandent les manifestants.

Claudette Pauline Lefade, présidente de Chagos Asylum People, souligne, pour sa part, les problèmes de gestion des fonds alloués aux Chagossiens dans le passé. Elle exige plus de transparence concernant le nouveau fonds fiduciaire proposé dans l'accord et insiste pour que la communauté chagossienne soit impliquée directement dans sa gestion. «Qui va gérer ce fonds ? Le gouvernement mauricien ? Nous demandons que nos droits nous soient restitués et que nous puissions prendre nos propres décisions. L'autodétermination est un droit fondamental que ni Maurice ni le Royaume-Uni ne peuvent nous enlever», conclut-elle.

À l'heure où nous mettions sous presse, le statement à la Chambre des communes se déroulait toujours. Retrouvez la suite dans notre édition de demain.

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