Au Mali, le convoi militaire Fama-Wagner, parti il y a une dizaine de jours en direction de Tinzaouatène, à la frontière avec l'Algérie, est rentré à Kidal hier (mardi) dans la soirée. Le communiqué diffusé peu avant, dans l'après-midi, par l'armée malienne, évoquait pour la toute première fois cette « opération de contrôle de zone », « en cours depuis plusieurs jours dans la région de Kidal », précisant que les soldats avaient pu récupérer les « dépouilles de leurs frères d'armes » tombés près de Tinzaouatène, fin juillet. Les rebelles du CSP (Cadre stratégique permanent) avaient alors tué plusieurs dizaines de soldats maliens et de mercenaires de Wagner. Un clap de fin qui ne dit pas son nom pour cette opération massive dont les objectifs réels suscitent toujours des interrogations, et au cours de laquelle aucun combat n'aura finalement eu lieu.
Il y a bien eu cette mine artisanale, qui a explosé hier (mardi) en fin de journée sur le passage du convoi, peu avant son arrivée à Kidal. La pose de l'IED [engin explosif improvisé, acronyme anglais, NDLR] a été revendiquée par le Jnim, lié à al-Qaïda. Aucun bilan à ce stade, mais l'incident n'a pas empêché le convoi de reprendre sa route et d'arriver à Kidal aux environs de 21 heures, selon plusieurs sources locales.
Dans son communiqué, l'armée malienne n'affirme pas clairement que l'opération est terminée, mais c'est la première fois qu'elle en fait mention -- les états-majors communiquent habituellement une fois les opérations achevées. Surtout, cet unique communiqué lui assigne officiellement un objectif : récupérer les dépouilles des soldats tués par les rebelles du CSP fin juillet, près de Tinzaouatène. Chose faite, selon l'état-major.
Objectif réel de l'opération ?
Les rebelles du CSP assurent que seuls les corps des soldats maliens étaient toujours sur place et que ceux des mercenaires de Wagner avaient été évacués et mis à l'abri.
Surtout, les rebelles ne croient pas que l'objectif des militaires était seulement de revenir chercher les dépouilles, un type de mission, il est vrai inhabituel. « Ils voulaient planter leur drapeau à Tinzaouatène », « ils voulaient laver l'affront », estiment les rebelles, qui considèrent que les militaires maliens et leurs supplétifs russes ont reculé parce qu'ils se savaient surveillés et menacés.
Avis partagé par de nombreux observateurs avertis, qui mettent en avant les moyens considérables engagés : environ 70 véhicules chargés de militaires maliens, de supplétifs de Wagner et de combattants de groupes armés locaux alliés à l'armée, des blindés, des armes lourdes, des drones. À leurs yeux, cette mobilisation et le temps passé -- une dizaine de jours - à sillonner les confins désertiques de la zone induisent nécessairement des objectifs initiaux plus ambitieux, qui n'auraient donc pas été atteints.
Démonstration
Ce que contestent vigoureusement plusieurs sources civiles et sécuritaires maliennes, qui font remarquer que les rebelles n'ont pas tendu d'embuscade à la colonne militaire, comme ce fut le cas fin juillet.
Si le convoi a cheminé péniblement, faisant d'importants détours et abandonnant du matériel et des véhicules en route, il a aussi fait la démonstration que l'armée pouvait s'aventurer dans la zone, y durer un certain temps et en revenir, sans avoir à livrer de combats. Une manière de prouver que ni les rebelles du CSP, ni les jihadistes du Jnim, ne sont véritablement maîtres du terrain.
Ces sources assurent que l'objectif était bien, depuis le début, de revenir sur les lieux de la bataille de fin juillet et de récupérer les corps. « Cette étape est passée, d'autres vont suivre », annonce, dans une forme de défi, l'une de ces sources.