Tchad: La crue du fleuve Chari atteint un niveau inédit, Ndjamena toujours sous les eaux

Dans le quartier de Tougoudé dans le IXe arrondissement de Ndjamena, les habitants se déplacent désormais en pirogue.

Les inondations se poursuivent au Tchad et notamment à Ndjamena. Pluies diluviennes et crue du fleuve Chari ont déjà submergé les rues de plusieurs quartiers de la capitale. Un événement particulièrement intense en cette saison des pluies et qui devrait encore s'aggraver dans les jours à venir.

8,18 mètres ce mercredi 9 octobre 2024, le fleuve Chari a atteint un niveau inédit gonflé par les importantes précipitations qui s'abattent sur le Tchad. Alors que les inondations provoquées par les pluies violentes ont déjà fait près de 600 morts et affecté près de 2 millions de personnes, la capitale Ndjamena fait désormais face aux crues fluviales. Le Premier ministre Allah-Maye Halina a convoqué ce mercredi une réunion de crise avec plusieurs ministres et l'armée pour appeler à la « mobilisation générale ».

Signe de l'urgence de la situation, la réunion se tient en présence du chef d'état-major des armées, des commandants des différents corps d'armée, de plusieurs ministres et des maires de Ndjamena ainsi que de ses différents arrondissements.

Le Premier ministre Allah-Maye Halina : « Nous nous réunissons ce matin pour prendre des mesures pratiques et des actions concrètes pouvant nous aider à faire face à cette situation. Les eaux ne cessent de monter et nous devons agir très rapidement pour ne pas avoir de surprises. Aujourd'hui, 9 septembre 2024, le niveau est de 8,18 mètres contre 7,16 mètres en 2022 et 6,53 mètres en 2020. Chaque jour, l'eau monte de trois centimètres. »

Le niveau du fleuve est déjà supérieur d'un mètre à celui enregistré lors des crues dévastatrices de 2022. « Chaque minute est précieuse, dit le chef du gouvernement. Dès ce soir, nous devons être sur le terrain afin de solutionner les points critiques. Les forces de défense et de sécurité sont appelées à se mobiliser. J'en appelle aux entreprises pour marquer leur solidarité en tant qu'entreprises citoyennes en mobilisant leurs engins en vue de disponibiliser des terres et des remblais qui serviront à construire des barrages. »

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Le IXe arrondissement de Ndjamena sous l'eau

Plusieurs localités du IXe arrondissement situées avant la digue sont déjà engloutis, leurs habitants ont pris la fuite. Tandis que le fleuve commence à déborder vers Moursal. Et que des quartiers centraux comme Klemat et Kabalaye sont par endroits envahis d'eaux usées en raison de la fermeture des exutoires.

Sur le terrain, c'est en pirogue que l'on rejoint désormais Tougoudé dans le IXe arrondissement. « Tout ce que vous voyez autour de vous, c'est la crue du fleuve Chari et du Logone et ça a causé des inondations tout autour, explique Ezéchiel Minnamou Djobsou, coordinateur adjoint de l'association Jeunesse active. Si l'eau continue avec l'allure actuelle, la situation risque d'empirer parce que la hauteur de l'eau augmente de 10cm par jour. »

Mallone Diennadji qui a pagayé depuis Amnabak à deux kilomètres raconte la situation dans sa localité : « Nos récoltes sont sur l'eau surtout le riz submergé par l'eau. Nous n'avons pas les denrées alimentaires pour le moment. Pour trouver à manger au moins une fois par jour, c'est un problème. »

Les habitants ont trouvé refuge de l'autre côté de la digue à N'Dou qui a pris l'allure d'un camp de réfugiés. « C'est surtout cette nuit et ce matin qu'il y a beaucoup de gens qui sont arrivés, explique Alphonse Hoursou, 52 ans et sinistré. Vous les voyez, ils n'ont pas encore trouvé un emplacement sûr. Mais ça pourrait être encore pire, car on a peur que la digue cède et puis on risque d'être encore dans l'eau. »

Des pluies record intensifiées par le changement climatique

Le Tchad fait face à une saison des pluies record et ce n'est malheureusement pas étonnant puisque les projections climatiques l'anticipent. L'Afrique de l'Ouest et la bande sahélienne vont connaître des inondations plus importantes à mesure que la planète se réchauffe. C'est notamment dû à un changement de régime : il ne pleut pas forcément plus, mais de façon plus intense et rapprochée dans le temps.

Cela a ainsi été observé lors des inondations de 2022. Une étude d'attribution avait alors montré que l'événement avait été rendu 80 fois plus probable et 20 % plus intense par le réchauffement climatique. Dans ce contexte, la capacité des sols à absorber de grands volumes d'eau en peu de temps est essentielle, mais l'urbanisation et la géographie de Ndjamena n'aident pas.

Le sol est imperméable, car argileux ou artificialisé, alors que le fleuve Chari déborde facilement en saison des pluies. Face à cette nouvelle donne climatique, il est cependant possible de s'adapter. Des solutions sont mises en avant : restauration des sols, mise en place d'infrastructures de rétention et d'infiltration de l'eau et enfin le respect des zones inondables.

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