À un mois du scrutin, l'atmosphère dans la circonscription no 2, Port-Louis Sud-Port-Louis-Central, est chargée d'opinions divergentes. Certains résidents expriment un soutien indéfectible à l'opposition, soutenant que ce sont leurs députés actuels qui pourront apporter un changement s'ils sont élus avec une majorité, tandis que d'autres ont un sentiment mitigé. D'autres encore, craignant des représailles, ont préféré garder le silence pour ne pas froisser la sensibilité du pouvoir.
Redécoupage électoral : 30 900 voix en jeu
Entre les élections de 1976 et 2000, le Mouvement militant mauricien (MMM), seul ou en alliance, a toujours fait élire des candidats au n°2. Toutefois, à partir de 2000, cette prédominance mauve a changé et le Parti travailliste (PTr) a l'ascendant dans cette circonscription de la capitale. Rashid Beebeejaun, élu du MMM en 1995, a brisé le monopole mauve en se faisant élire comme député du PTr lors des élections de septembre 2000, face une alliance Mouvement socialiste militant (MSM)-MMM. Dès lors, les Rouges y ont toujours eu un député, avec ou sans alliance. Rashid Beebeejaun s'est fait élire quatre fois de suite.
C'est la seule circonscription où il y a eu deux élus du PTr en 2019. Ils sont Osman Mahomed et Farhad Aumeer. Dans d'autres circonscriptions, où il y a deux parlementaires rouges, l'un est Best Loser. Sans doute, Osman Mahomed, élu en 2014, a eu une grande contribution dans l'élection de son colistier.
D'ailleurs il a été plébiscité avec près de 61 % des suffrages lors des dernières élections. Il a été le seul à réussir un tel exploit. Mieux que Pravind Jugnauth au n° 8 (Quartier-Militaire-Moka), où il y a eu trois élus du MSM. Il faut aussi reconnaître que Reza Uteem a toujours été élu à chaque participation depuis 2010, même si son parti a perdu de son rayonnement sur le plan national.
Port-Louis-Sud-Port-Louis-Central connaît un grand changement avec le redécoupage électoral. Quelque 4 500 électeurs, une partie de Vallée-Pitot jusqu'à la rue Desforges, sont transférés dans la circonscription n°3 (Port Louis-Maritime-Port-Louis Est). En revanche, quelque 10 000 électeurs, ceux de la région de Marie-Reine-de la-Paix et de Pailles, Sorèze, voteront désormais dans la circonscription n°2. Ainsi, cette circonscription comptera 30 950 électeurs.
**Les potentiels candidats Avec la magistrate Zaynah Bibi Essop qui sera la Returning Officer, voici la liste des candidats qui devraient obtenir une investiture :
Alliance du changement :Osman Mahomed
Dr Farhad Aumeer
Reza Uteem
Alliance Lepep :
Roubina Jadoo-Jaunbocus
Abdallah Goolamallee
Zia Nujurally
Les voix des habitants
Nous avons arpenté les rues animées de la capitale, hier matin, avec deux petites «bases» déjà installées, à la rencontre des habitants pour sonder leurs opinions et sentiments.
Dassen Gunga, habitant de Tranquebar et gérant d'une pâtisserie à la rue Madeleine, est d'avis que les élections seront serrées cette année, avec un score de 2-1. «Il se peut que Roubina Jadoo Jaunbocus fasse son entrée, avec en tête de lice le Dr Farhad Aumeer et Osman Mahomed. Cependant, au-delà de ces trois candidats que je vois sur le terrain, je constate aussi que Reza Uteem est très présent dans notre région, à Résidence Madeleine. Je ne connais pas les autres candidats potentiels dont les noms sont cités.» Pour lui, un changement s'impose. «Il faut changer ce gouvernement et il ne faut pas oublier que le coût de la vie, ou la cherté de la vie, aura un impact sur le choix des électeurs. Quand on entre dans une boutique avec un billet de Rs 1 000, on sort sans rien. Il faut un changement.»
C'est sous le couvert de l'anonymat que cette membre d'une organisation non gouvernementale s'est livrée à l'express, affirmant avoir une préférence pour le parti rouge. «Me touseki vini, parey mem. Pas de changement et je n'attends pas grand-chose de ces élections de novembre à Tranquebar.»
Toujours à Tranquebar, un autre habitant, sous le couvert de l'anonymat, ne cache pas son amertume face aux députés de la région. «Il y a eu trop d'infrastructures qui n'aident pas, mais qui provoquent plutôt des inondations lors des pluies. Les députés n'ont rien fait pour nous et je dirai qu'ils ne sont pas à la hauteur. Dès qu'ils remporteront les élections, ils ne vont plus mettre les pieds ici. Zot disparet.»
Même son de cloche du côté de Yaazdi Cassim, propriétaire d'une boutique à la rue Wellington, Ward 4. «Cette année, ce sera un 2-1 avec des résultats serrés entre Osman Mahomed et Roubina Jadoo-Jaunbocus, qui viennent prendre les doléances des habitants. Pour le troisième candidat, cela reste indécis, mais tout dépendra de la manière dont les candidats mèneront leur campagne et de leur présence sur le terrain. S'ils brillent par leur absence, ils ne valent pas la peine d'être élus», avance-t-il, attendant de connaître la liste officielle des candidats pour sa circonscription afin de se prononcer sur ses attentes.
Habitante de Pailles mais travaillant au Ward 4 dans son snack, situé tout près de l'hôpital Dr A. G. Jeetoo, Akizah Jaumeer confirme la présence de l'avocate Roubina Jadoo-Jaunbocus. «Les élections ne m'intéressent guère, mais je me souviens avoir vu, pendant le ramadan, Roubina Jadoo qui avait bien marqué sa présence, tout en nous demandant de communiquer nos doléances. Elle avait laissé le numéro de sa secrétaire, qui, avait elle dit, serait joignable pour toute discussion.»
Ibrahim Baganee, travaillant dans son entre prise de vente de pièces de voitures au Ward 4, est confiant dans la victoire de l'Alliance du change ment. «Lors des dernières élections générales, les candidats du PTr et du MMM avaient été élus haut la main. Cette année, avec cette alliance, je suis sûr que ces mêmes candidats viendront plus forts et seront de nouveau élus.» Évoquant le problème de la drogue, il estime que rien n'est fait pour les jeunes, en particulier ceux âgés de 16 ans et les collégiens. «Les jeunes qui ne sont pas très qualifiés au niveau des études ont du mal à se frayer un chemin dans le monde professionnel. C'est difficile d'obtenir un emploi avec seulement 5 credits.»
Faizal Toolsee, que les clients attendent pour leur coupe de cheveux dans son salon à la rue Madame, espère que les élections se dérouleront dans le calme et en toute équité, sans «trik ni kas bwat». «Je travaille ici jusqu'à 18 heures, mais je peux dire que je n'ai jamais vu les députés sillonner cette rue.»
Direction Pailles, où nous croisons Bindu Benchoo. Avec le redécoupage de la circonscription n°2, Pailles a été ajoutée. Elle souligne l'urgence de créer un espace vert, un jardin d'enfants ou même une salle de gym pour les jeunes et les seniors. Elle soutient que Pailles n'a connu aucun changement au niveau des infrastructures pour le bien-être et les loisirs des résidents depuis plusieurs années. «D'ailleurs, quand il y a un problème dans le coin, on ne sait même pas vers qui se tourner. Nous ne connaissons pas notre député (NdlR, ceux qui étaient dans la circonscription n°1) et ne les voyons jamais.»
Nushrat Sobratee, elle, confie : «Je ne suis pas les élections. Le scrutin, franchement, n'attire pas mon intérêt, mais avec le coût de la vie, tout se vend cher. C'est pourquoi j'ai dû commencer à travailler dans ce snack de rue pour aider mon mari à joindre les deux bouts, étant donné que je dois payer le loyer et m'occuper de mes deux petits, avec l'aide de mon mari.»
Nous avons également rencontré Bibi Fatma Soobhun à l'arrêt d'autobus, à Vallée Pitot. Elle ne mâche pas ses mots contre le gouvernement. «Je n'aime pas quand les élections approchent parce que malgré tout ce qu'ils promettent, ils ne tiennent pas leurs promesses. Quand le Budget arrive, on découvre une multitude de contrats accompagnés de promesses non tenues. C'est bien de proposer un joli montant pour la pension de vieillesse, mais qu'en est-il de nos jeunes de Vallée-Pitot qui se tournent vers la drogue ? Il faut une solution pour tirer ces jeunes de là. Sinon, cette pension n'aura pas de poids.» Les deux grands partis se livrent une compétition pour la pension de vieillesse, où un parti propose Rs 20 000 pour les personnes âgées et l'autre, une double pension pour veuves vieillesse. «Ici, le PTr et le MMM sont bien forts.»