Burkina Faso: Journées de promotion économique du Burkina Faso à Moscou - « Nos attentes sont énormes », Appolinaire Joachimson Kyélem de Tambela

10 Octobre 2024

Présent à Moscou dans le cadre des Journées de promotion économique et commerciale du Burkina Faso (JEB-JPEC), le Premier ministre, Appolinaire Joakimson Kyélem de Tambèla, a accordé une interview à la télévision RT russe français, le 8 octobre 2024. Dans l'entretien, le chef du gouvernement évoque le partenariat avec la Russie sur divers plans, sa vision des relations internationales et de nombreux sujets d'actualité.

Quelles sont vos principales attentes de ces Journées et surtout concernant des partenariats économiques et des investissements?

Nos attentes sont énormes. Parce que comme vous savez, il y a eu un changement politique au Burkina Faso, le 30 septembre 2022. Depuis, Son Excellence le capitaine Ibrahim Traoré, Président du Faso a décidé de changer de cap, de réorienter les relations du Burkina Faso d'une autre façon. Pendant longtemps, nous étions axés sur les mêmes partenariats avec des résultats pas satisfaisants. Donc nous nous sommes demandés pourquoi ne pas essayer ailleurs ?

Et qui d'autre que la Russie, la grande puissance, qui fait contrepoids aux autres ? Donc voilà pourquoi, le régime s'est orienté vers la Russie, pour un partenaire stratégique sur tous les plans : militaires, économiques, culturels. C'est la raison pour laquelle Moscou a été retenue pour l'organisation de ces Journées économiques du Burkina Faso à l'extérieur. Nous attendons, qu'à la suite des rencontres entre les hommes d'affaires, les opérateurs économiques du Burkina Faso et leurs partenaires russes, que chaque partie exprime ses besoins et que nous voyons dans quelles mesures nous pouvons nous compléter dans le cadre de nos relations économiques.

Justement vous avez parlé du fait que les Journées économiques se tiennent ici à Moscou. A quel niveau justement cela place les relations entre la Russie et le Burkina Faso finalement ?

: A un niveau très haut. La Russie et le Burkina Faso sont en relation diplomatique depuis 1967. Mais on ne peut pas dire que ces relations étaient marquées d'une empreinte particulière. C'était des relations normales jusqu'à la fermeture de l'ambassade de la Russie à Ouagadougou, après la dislocation de l'URSS. Et les relations diplomatiques ont été renforcées à partir de 2013, quand nous avons rouvert notre ambassade ici. Mais avec le Président Traoré qui a décidé de s'orienter vers la Russie, les rapports se sont accentués sur tous les plans.

Et en moins de deux ans, ce que nous avons obtenu comme résultat dépasse les attentes d'un côté comme de l'autre. L'ambassade de la Russie, qui était fermée au Burkina Faso, a été rouverte. Un ambassadeur de la Russie a été nommé. Une maison de la culture de la Russie à Ouagadougou a été ouverte dans l'attente d'un agrandissement.

Il y a un projet d'ouverture d'une université numérique à Ouagadougou, qui va rayonner sur toute la région. Et, il est prévu un projet de création d'une association de jeunesse internationale à Ouagadougou. Et j'en passe. Cela veut dire que les projets n'en finissent pas. Cela dénote de la confiance entre les deux Etats. D'un côté, les Russes font confiance au nouveau régime, au Burkina Faso. Et de l'autre, nous faisons confiance aussi à la Russie, qui est actuellement le seul partenaire à même de tenir tête aux autres acteurs de la communauté internationale.

 En parlant justement de confiance mutuelle que la Russie et le Burkina Faso ont, vous avez récemment reçu à Ouagadougou une délégation de Rosatom pour évaluer un potentiel projet nucléaire. A quel stade se trouve ce projet et pourquoi avez-vous fait le choix de l'entreprise Rosatom ?

Au Burkina Faso, nous avons un vrai problème de production énergétique, qui demeure insuffisante par rapport aux besoins du pays. Or, vous savez que l'énergie est la base de tout. Donc notre chef d'Etat a réfléchi à comment remédier au problème énergétique au Burkina Faso. Et entre autres, il a pensé à l'énergie nucléaire. Et comme il sait que la Russie est spécialiste en la matière, il a voulu que les négociations s'entreprennent avec ce pays pour voir comment, dans de brefs délais, nous pouvons avoir une centrale énergétique. Mais, il n'y a pas que l'énergie nucléaire.

Nous explorons aussi dans le cadre de l'énergie hydroélectrique. Nous avons beaucoup de projets hydroélectriques et nous voulions aussi que des entreprises russes intéressées par ce secteur nous aident à les mettre en marche. Il y a aussi des projets d'énergie thermique et des projets d'énergie solaire pour connecter tous les réseaux et faire en sorte que nous soyons autosuffisants en matière énergétique, au besoin, que nous puissions en exporter.

Donc, voilà la raison pour laquelle, une centrale nucléaire civile est importante pour nous. Et les négociations sont en cours. Et je crois qu'il y a déjà un projet d'envoyer des étudiants du Burkina Faso ici pour leur formation. Des experts russes sont déjà venus au Burkina Faso pour explorer le terrain. Les choses sont sur la bonne voie et d'ici peu ce projet sera réalisé.

Alors, parlons des entreprises de Burkinabè ; parce que ces Journées économiques consistent aussi à faire la promotion des valeurs économiques du Burkina Faso. Comment comptez-vous renforcer la présence des entreprises du Burkina Faso ici en Russie ? Et finalement, quels sont les secteurs les plus prometteurs ?

Oui, c'est la raison pour laquelle je suis venu avec une

forte délégation d'opérateurs économiques du Burkina Faso ici. Sur place, ils vont tâter le terrain et puis voir. Mais d'ores et déjà, je peux vous dire qu'il y a des produits du Burkina Faso qui intéressent beaucoup les Russes, notamment les produits agroalimentaires. Nous sommes un grand producteur de mangue. Et il semble que nos mangues sont très appréciées ici en Russie, notamment les mangues séchées. Nous sommes un grand producteur d'anacarde. Et il paraît que les Russes aiment aussi l'anacarde. Nous sommes un grand producteur de sésame. Et il paraît que cela aussi est très apprécié ici. Sans compter que nous produisons beaucoup de coton. Les entreprises russes peuvent venir implanter des industries de transformation du coton sur place au Burkina Faso. C'est ce que nous cherchons.

Parce que nous n'arrivons pas à transformer toute la quantité de coton que nous produisons. Donc actuellement, nous cherchons des industries de transformation des produits de coton. Nous avons mis en place certaines industries, mais elles ne vont pas absorber toute la quantité de coton produite. S'il y a des Russes qui sont intéressés à installer des industries textiles au Burkina Faso, qui vont travailler à partir du coton burkinabè, elles sont les bienvenues. Le Burkina Faso a beaucoup de produits à offrir. Nous sommes aussi un grand pays d'élevage. Et dans ce secteur aussi, nous avons des problèmes de transformation.

Parce que le bétail, généralement, est exporté sur pied dans les pays voisins. Bénin, Togo, Ghana, Côte d'Ivoire et même jusqu'au Nigeria. Quand l'animal sort sur pied, c'est une perte pour nous. Parce que le cuir s'en va aussi à l'extérieur et nous ne pouvons pas le garder pour le transformer. Et sans oublier que l'animal qui part à l'extérieur, ça ne se conserve pas. Et il n'y a pas de valeur ajoutée. Donc, nous voulons pouvoir transformer sur place avant de commercialiser. Vous voyez que ce que le Burkina Faso peut offrir à la Russie est innombrable, sans oublier les potentialités en matière minière.

Et nous offrons aussi, il y a d'autres potentialités en matière de construction ferroviaire. Vous savez que dans le cadre de la Confédération des Etats du Sahel, (parce que le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont actuellement en confédération et nous tendons vers une Fédération). Il faudra relier les trois capitales par route, autoroute et par chemin de fer. Donc cela constitue des opportunités sur lesquelles nous pouvons discuter avec nos partenaires et voir dans quel cadre chacun peut intervenir.

 Nous reviendrons sur la Confédération des Etats du Sahel. Mais avant j'aimerais évoquer l'exploitation des mines. Le Président Ibrahim Traoré dans une interview a tout récemment évoqué le fait que le Burkina Faso était justement en train de retirer des permis d'exploitation des mines aux entreprises étrangères. Quel est votre regard sur ce sujet ?

Il faut comprendre le président. Vous savez, le problème fondamental actuel au Burkina Faso, c'est le terrorisme. C'est de lutter contre le terrorisme. C'est cela même qui a amené le Président Ibrahim Traoré au pouvoir. Alors nous ne pouvons pas comprendre que des entreprises étrangères, soient au Burkina Faso, ils exploitent notre or, protégées par nos soldats et qu'en même temps, leur pays d'origine non seulement refusent de nous vendre des armes, mais bloquent les armes que nous achetons. Voilà le vrai problème. Avec quoi voulez-vous que nous protégions vos ouvriers, vos entreprises, contre les terroristes ? C'est comme ils étaient complices des terroristes. C'est tout cela qui a amené à réexaminer le projet des permis d'exploitation.

 Alors les pays de l'AES ont annoncé le lancement de plusieurs satellites en partenariat avec Roscosmos. Ce projet intervient en réponse au défi de souveraineté, de sécurité et de développement de la région. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet, son importance également pour le Burkina Faso ?

Vous savez que ce qui caractérise les pays de l'AES, c'est la souveraineté. Nous voulons retrouver notre souveraineté qui a été bafouée depuis longtemps. Vous ne pouvez pas être souverain, si vous ne contrôlez pas votre information, si vous ne contrôlez pas l'information qui sort de chez vous, l'information qui entre chez vous. Et nous avons longtemps été victimes de cela. Je pense que même de grands pays comme la Russie, la Chine, l'Iran, ont un certain contrôle sur l'information qui entre chez eux et qui sort de chez eux. Et nous ne pouvons pas non plus, toujours tributaires, des instruments de nos adversaires.

C'est la même qui veut nous dominer et qui viennent avec leurs satellites, etc. nous ne pouvons pas être tributaires d'eux seuls. Il faut que nous allions vers des partenaires que nous estimons sérieux, envers qui nous avons confiance, qui peuvent nous accompagner dans le cadre de notre politique de souveraineté. Voilà pourquoi ce projet est en train d'être négocié avec la Russie.

Vous avez déjà évoqué le fait qu'il y a une confédération des Etats du Sahel qui a été créée. Et on sait que le Sahel a connu énormément de changements il n'y a pas longtemps. Quels sont les principaux défis que l'AES, la Confédération des Etats du Sahel doit relever pour assurer la paix et la prospérité dans le Sahel ? Et comment envisagez-vous le rôle des partenaires internationaux pour bien sûr vous soutenir ?

Il y a plusieurs défis. Mais le principal, c'est la sécurité. D'ailleurs, ce qui a amené la constitution de la Confédération de l'AES, c'est le besoin d'unir nos efforts pour lutter contre le terrorisme, qui a été suscité sur le plan international pour affaiblir nos Etats. Nous nous sommes rendu compte qu'avant la création de la Confédération de l'AES, par exemple, quand vous pourchassez des terroristes, ils partaient se réfugier dans un autre pays voisin. Et vous n'aviez pas le droit de poursuite. Et pendant longtemps, nous avons eu ce problème avec le Niger, avant l'avènement du président Tiani, le 26 juillet 2023.

Les trois pays se sont rendu compte que tout seul, chacun ne peut pas venir à bout du terrorisme. Il faut qu'on se mette ensemble, qu'il y ait un droit de poursuite sur les terroristes. S'ils sont au Burkina Faso et que nous les poursuivons, qu'ils entrent au Mali, que nous ayons la possibilité d'entrer en territoire malien pour les poursuivre. Et vice versa. Avec le Niger aussi, la même chose. Donc, nous avons compris qu'il fallait nous mettre ensemble, conjuguer nos efforts pour mettre fin à ce terrorisme.

Nous nous sommes aperçus aussi qu'il ne faut pas s'arrêter en si bon chemin. Puisque de toutes les façons, non seulement nous avons la même préoccupation qui est la lutte contre le terrorisme, mais nous avons la même orientation politique au niveau de ces trois Etats. Alors, autant se mettre ensemble pour envisager l'avenir en commun. Voilà ce qui a amené la création de l'Alliance des Etats du Sahel.

 Parlant d'avantages communs, quels sont les autres avantages de l'Alliance ou la Confédération des Etats du Sahel pour le Burkina Faso ?

Je pense que c'est assez évident. Quand vous prenez le Mali, le Burkina et le Niger, vous avez plus de 2 700 000 km². Cela fait un vaste État. Vous avez près de 40 millions d'habitants, soit à peu près la moitié de la population russe. Vous voyez que ce n'est pas négligeable. Vous avez au moins trois aéroports internationaux, à Niamey, à Ouagadougou, à Bamako, avec un autre grand aéroport international en voie d'achèvement à Ouagadougou, dans le village de Donsin.

Et vous avez, des structures économiques complémentaires. Quand vous prenez la production de coton du Mali, du Burkina et du Niger et que vous mettez ensemble, cela fait une grande force. Quand vous prenez la production d'or du Mali, du Burkina et du Niger, cela fait une grande quantité. Quand vous prenez la production de bétail de ces trois pays, c'est innombrable. Donc, en mettant ensemble nos atouts, la Confédération des Etats du Sahel fait une grande puissance, non seulement en Afrique, mais dans le monde.

Alors, la Confédération des Etats du Sahel a tout récemment écrit au Conseil de sécurité de l'ONU pour, bien évidemment, citer le soutien de Kiev à des groupes armés de la région. Quelle est la position du Burkina Faso sur ce sujet ? Et cette volonté finalement de faire front commun, est-ce qu'on peut dire que c'est une façon de changer la donne sur la scène diplomatique internationale ?

D'abord, par rapport à l'Ukraine, je vais vous dire une chose. Pourquoi les Ukrainiens ont commencé à soutenir le terrorisme dans notre région ? C'est pour faire mal à la Russie. Parce qu'ils savent que les Russes ont une coopération militaire et en matière de sécurité avec les trois pays. Et donc, en voulant s'en prendre à nos États, ils cherchent à affaiblir la Russie. Et en cherchant à affaiblir la Russie, ils vont en pacte avec nos ennemis qui sont les terroristes. Donc, nous ne pouvons pas accepter cela. Donc, nous ne pouvons que nous allier à la position du Mali, car qui s'attaque au Mali s'attaque au Burkina Faso et s'attaque au Niger.

Donc, s'attaquer aux soldats maliens via les terroristes qui entrent au Mali, l'Ukraine s'attaque en même temps à notre pays. C'est comme ici en Russie. Si quelqu'un s'attaque à une République autonome de la Russie, c'est toute la Russie qui est en cause. C'est la même chose chez nous. Donc, s'attaquer aux soldats maliens, c'est comme s'ils s'attaquaient au Burkina Faso et au Niger. Donc, nous faisons cause commune avec les autorités du Mali et nous condamnons fermement l'intrusion de l'Ukraine dans notre pays. L'Ukraine n'a qu'à régler ses propres problèmes d'abord dans son pays. Voilà la position du Burkina Faso.

Cette façon de faire tronc commun avec les Etats du Sahel. Peut-elle être considérée comme une nouvelle donne sur la scène diplomatique ?

Oui, c'est une nouvelle donne. Sur le plan sous-régional, régional africain et international. Nous avons été colonisés par la France, qui n'a jamais vraiment accepté l'indépendance réelle de nos pays, qui gouverne toujours à travers nos élites en sous-main. Nous, nous voulons maintenant pouvoir nous occuper de nous-mêmes, gérer nos propres affaires. La France est réfractaire à cela. Et vous avez suivi ce qui s'est passé lors du coup d'Etat du 26 juillet 2023 au Niger, comment a été la réaction de la France qui a voulu instrumentaliser la CEDEAO pour qu'on attaque le Niger et rétablir l'ancien président qui était un partenaire favorable à la France. Donc nous ne pouvons pas supporter ce genre de chose. Que les Français gèrent leurs affaires.

Nous ne nous immixons pas dans les affaires de la France. Donc nous ne voulons pas que la France s'immisce dans nos affaires. Contrairement à ce qui se passe en Russie, ou, on traite d'égal à égal. Donc les Russes, nous respectent et nous les respectons. Ce n'est pas le cas avec les pays occidentaux. Donc nous voulons, au niveau de la sous-région, montrer qu'il y a une nouvelle donne. Nous prenons notre destin en main. Notre destin n'est plus subjugué aux caprices d'une puissance étrangère. Et au niveau de l'Afrique, nous voulons montrer qu'il est possible de se libérer. Il est possible de prendre son destin en main. Il suffit d'avoir la volonté et le soutien de son peuple. C'est au niveau de l'Afrique. Au niveau international, nous voulons contribuer à l'instauration d'un nouvel ordre politique et économique. Vous savez qu'actuellement, la Charte des Nations unies est interprétée à volonté par certains Etats.

Il se permettent de tout faire au nom de la Charte qu'ils interprètent à leur façon. Nous, nous voulons que la Charte soit interprétée dans son esprit parce que la Charte a été écrite au nom des peuples des Nations unies. Nous voulons que la Charte soit interprétée au nom de l'intérêt des peuples des Nations Unies. Nous sommes pour une lecture de la vérité de la Charte. Pour que la Charte soit lue et interprétée dans son esprit et non pas mal amenée selon les caprices des uns et des autres. Il y a un certain nombre de pays qui sont constitués et qui œuvrent pour amener au respect de l'esprit de la Charte des Nations unies.

A l'Assemblée générale des Nations unies à New York, plusieurs pays africains ont justement abordé le fait qu'ils voulaient que l'Afrique ait des places permanentes au Conseil de sécurité de l'ONU. Pensez-vous que si l'Afrique ou les pays africains ont des places à l'ONU avec droit de veto, cela pourra changer la donne sur le plan des relations diplomatiques internationales ?

C'est au Conseil de sécurité que les grandes décisions se prennent. Et quand ceux qui disposent du droit de veto ne sont pas d'accord, même si ça va dans le bon sens, ils mettent leur veto et puis ça bloque. Alors que si vous remarquez l'Afrique, c'est le deuxième continent le plus vaste au monde, après l'Asie. C'est un continent également très peuplé, un continent d'avenir où il y a la jeunesse. Un continent où les ressources ne sont pas encore bien exploitées. Et malheureusement aussi, un continent où il y a beaucoup de conflits, beaucoup de déplacés, etc.

Donc nous ne comprenons pas pourquoi des grandes décisions peuvent se prendre sans que l'Afrique ne participe avec un droit de veto. Donc nous sommes d'accord. Personnellement, en tant que chercheur, je fais des écrits en la matière où je préconisais depuis une vingtaine d'années que l'Afrique devrait avoir un droit de veto. Je préconisais même trois pays, à savoir l'Afrique du Sud, le Nigeria et l'Egypte. Maintenant, je rectifie avec la nouvelle donne.

Et je pense qu'on ne peut pas constituer, on ne peut pas donner un droit de veto à l'Afrique en excluant la Confédération des Etats du Sahel. Donc la Confédération des Etats du Sahel doit avoir un droit de veto aux Nations unies. Parce que si vous le marquez, ce sera le territoire le plus vaste du continent africain et l'un des territoires les plus peuplés, avec le plus de potentialité, le plus d'avenir. Nous pensons que dans le cadre de cette réforme, il faudra en tenir compte ou alors ce Conseil de sécurité sera bloqué.

Le sommet des chefs d'Etat des BRICS aura lieu à Kazan cette fin du mois. Et vous avez justement exprimé le besoin pour votre pays de rejoindre ce groupe émergent des BRICS. Quelles sont aujourd'hui les principales motivations pour le Burkina Faso pour bien évidemment adhérer aux BRICS et comment cela s'aligne-t-il avec votre vision du commerce international plus équitable ?

On est bien avec les amis. Les BRICS sont constitués de qui ? Vous avez la Russie et nous sommes en bon terme avec la Russie. Vous avez la Chine, nous sommes en très bon terme avec la Chine. Vous avez le Brésil, nous avons de bons rapports avec le Brésil. L'Afrique du Sud, c'est la même chose. L'Inde, nous sommes en très bon terme avec l'Inde. Ce sont nos amis. Donc c'est tout à fait normal que nous cherchions à les rejoindre. La raison est simple. Nous avons la même vision. La raison pour laquelle je suis à Moscou, parce qu'on a la même vision. Nous partageons les mêmes valeurs.

Nous défendons les mêmes causes. Donc c'est tout à fait normal que nous souhaitions rejoindre les BRICS pour être avec nos amis. Vous savez qu'actuellement le monde est dominé par le Dollar et puis l'Euro. Donc, c'est eux qui contrôlent le commerce international, le circuit économique. Nous pensons que pour plus de justice, il faut équilibrer. Et nous pensons que les BRICS viennent pour ce rééquilibrage. Et donc tout ce qui peut contribuer à plus de justice, nous sommes preneurs. Voilà, l'intérêt économique qui nous pousse à vouloir rejoindre les BRICS.

Alors quels seraient les arguments que le Burkina Faso mettra en avant pour justement adhérer au groupe des BRICS ?

Economique et politique. Politique parce que nous partageons les mêmes valeurs et la même vision. Économique parce que le Burkina Faso est dans une dynamique de reconstruction et aussi dans une dynamique de fédération avec trois grands pays d'Afrique de l'Ouest. Donc qui dit Burkina Faso, dit Mali, dit Niger et ainsi de suite. C'est une grande perspective qui s'offre. Et avoir un espace au sein des BRICS, un grand espace comme la Confédération AES est un atout aussi pour l'organisation. Et c'est des potentialités d'investissement, des potentialités de transactions. Je pense que d'un côté comme de l'autre, on a tous intérêt à aller ensemble.

Pour sortir de cet entretien, j'aimerais vous poser la question de savoir, que vous en tant que Premier ministre du Burkina Faso qui êtes en Russie, quels sont vos espoirs pour l'avenir des relations entre nos deux pays et quels messages souhaiteriez-vous donner aux peuples russes, burkinabè mais surtout africain en général ?

Mes espoirs, c'est un renforcement de la coopération entre nos deux pays. Une coopération qui ne se limite pas à la coopération d'Etat à Etat.

Mais qui va s'étendre à la coopération d'individu à individu, d'entreprises à entreprises. C'est la raison pour laquelle parmi ceux qui sont venus ici, il y a des hommes d'affaires particuliers comme il y a des chefs d'entreprise. Parce que le rapport d'Etat à Etat n'implique pas que les peuples. Et nous, nous voulons des rapports qui impliquent les peuples. Si vous venez au Burkina Faso ces derniers temps, vous allez voir les drapeaux russes un peu partout.

Ce n'est pas le gouvernement qui a demandé de le faire. C'est de façon spontanée que les jeunes sont sortis, mettre les drapeaux russes aux côtés des drapeaux des pays de l'AES. Et cela se poursuit. Chaque jour, il y a des carrefours que les gens créent où ils mettent les drapeaux, etc. C'est pour dire l'attente que ces jeunes ont des relations entre nos pays et la Russie. Et c'est pour dire que ces jeunes, au-delà des relations d'Etat à Etat, attendent des relations de peuple à peuple. Aussi, nous sommes-là pour travailler dans ce sens, afin que nous puissions améliorer encore davantage nos rapports. Et faciliter le contact entre les peuples russes et les peuples de l'Alliance des Etats du Sahel.

 

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