Madagascar: Sur l'île Sainte-Marie, la culture des algues est en plein essor

Sur l'île Sainte-Marie, au large de la côte est de Madagascar, l’algoculture est en plein essor. (Image d'illustration)

Sur la Grande île, l'algoculture attire chaque année toujours plus de nouveaux « agriculteurs des mers ». À Sainte-Marie, petite île à l'est de Madagascar, trois fermes ont vu le jour en moins de cinq ans, et font travailler désormais plus de deux milliers d'habitants. Les enjeux économiques et écologiques pour l'île sont gros. Une étude scientifique est en cours pour tenter de cerner toutes les dynamiques anthropologiques autour de cette nouvelle activité génératrice de revenus.

Sur la côte est de Sainte-Marie, à Madagascar, les lignes d'algues s'étendent à perte de vue. Vues du ciel, elles forment un joli cadrillage en plein coeur du lagon. Il y a trois ans, Sébastien Jan a fondé Nosy Boraha SeaWeed, une ferme d'aquaculture villageoise où il travaille en direct avec les communautés locales. « On leur propose tout un tas de de services, du matériel, du support technique, une garantie d'achat de prix. On intervient sur des zones où les gens vivaient sous le seuil de pauvreté. En termes de de revenus, à l'échelle de Sainte-Marie, la culture d'algues représente aujourd'hui un petit peu plus d'un million de dollars de contributions directes », indique-t-il.

« Il y a également toute une dimension environnementale parce qu'on intervient sur des zones qui sont des zones sableuses relativement pauvres et on vient créer de l'habitat. Donc les poissons viennent s'abriter sous les algues : ça permet de régénérer le milieu. La culture d'algues vient aussi apporter des activités régénératrices de revenus au sein de ces communautés côtières. Ce sont des gens qui pêchent moins, mais qui vont plutôt faire de la culture d'algues. Ce sont des gens qui ne vont plus faire du charbon, mais qui viennent faire de la culture d'algues. Donc, on a quelque chose qui a à la fois un impact social, environnemental et économique », déroule-t-il.

Comprendre les effets des algues sur les écosystèmes

Ces impacts, l'écologue Isabel Urbina Barreto, chercheuse postdoctorale au sein du laboratoire Locéan, rattaché à l'IRD, commence à les étudier. Elle mène un projet transdisciplinaire (Projet Resto-Eco-Durable) en sciences de la durabilité pour comprendre comment cette nouvelle activité s'insère dans cet écosystème. Parmi les différents dossiers de l'étude, le volet écologique s'intéresse notamment aux effets potentiels des algues sur la désacidification des océans.

« Ces effets bénéfiques que les algues pourraient avoir sur la masse d'eau et sur les coraux, ce sont des hypothèses que nous faisons. Là, on lance justement des expériences avec des boutures coraliennes pour voir si cela joue sur leur croissance », explique l'experte.

Loin de vouloir freiner l'enthousiasme pour l'algoculture sur l'île et toujours dans une optique de durabilité, les chercheurs entendent aussi déterminer si des conflits d'usages pourraient émerger concernant l'occupation du lagon.

L'algue, « la ressource la plus inexplorée et inexploitée au monde »

Bien qu'ils recouvrent 70% de la planète, les océans ne contribuent encore qu'à 2% de notre de notre alimentation en termes de calories. Les algues pourraient changer la donne, car pour de nombreux scientifiques, elles sont la ressource-matériau de demain. Pour Vincent Doumeizel, conseiller océan auprès des Nations unies, en visite à Madagascar, cultiver les océans est la prochaine grande révolution civilisationnelle à laquelle l'humain doit se préparer.

« L'algue est sans doute la ressource la plus inexplorée et inexploitée au monde malgré ses nombreux avantages. Les algues, elles vont être avant tout un excellent moyen de réparer les océans et donc de réparer la biodiversité mondiale. Elles vont détenir aussi un potentiel d'innovation quasi infini et représenter des solutions extrêmement variées : elles vont nourrir les hommes avec des bienfaits santé exceptionnels. Elles vont être riches en nutriments vitaux, zinc, protéines, oméga 3 et beaucoup d'autres encore. Elles vont être extrêmement bonnes pour nourrir les animaux avec des bienfaits en termes d'équilibre et en termes de résistance », décrypte-t-il.

Les algues en Afrique ont un grand potentiel et c'est sans doute la région qui concentre le plus d'intérêt au niveau international, parce qu'elles répondent à une demande. Et elles sont là. On a des côtes qui vont des algues tropicales à des algues d'eau froide. On a vraiment une diversité qui est exceptionnelle. Il faut apprendre à les connaître, à les maîtriser. Les algues répondent aux enjeux qu'affronte l'Afrique aujourd'hui.

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