Didi Kembwarss est chanteur, auteur-compositeur, parolier, écrivain, scénariste et philosophe congolais évoluant en France. Cet artiste au talent innombrable est préoccupé par la crise persistante au sein de la Société Congolaise des Droits d'Auteurs et des Droits Voisins (SOCODA). Cette situation est causée par les malversations financières, la guerre de leadership, l'abus de pouvoir et la megestion criante.
Au cours d'un entretien accordé à votre journal à Paris, Didi Kembwarss a appelé à la dissolution de la SOCODA qui selon lui, a échoué à sa mission régalienne de percevoir et répartir les droits d'auteurs des artistes en RDC. Il a, par ailleurs, fait mention spéciale à la Ministre Yolande Elebe Ma Ndembo, pour le bilan de ses 100 premiers jours à la tête du Ministère de la culture, arts et patrimoine de la République Démocratique du Congo (RDC). Didi Kembwars a également parlé de l'apport de la Rumba congolaise dans l'économie nationale du pays.
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La Prospérité : Ça fait plus de 100 jours depuis que le gouvernement Judith Suminwa est entré en fonction. Quel bilan pour la ministre de la culture, arts et patrimoine, Yolande Elebe Ma Ndembo, pour ses 100 premiers jours ?
Didi Kembwarss : Dans l'ensemble, je dirais que les 100 jours de la ministre de la culture sont encourageants. Elle a fait valider le projet de la loi culturelle au Conseil des ministres. Pendant ces 100 jours, la ministre de la culture a aussi fait adopter au Conseil des ministres, le projet du décret de création du centre culturel et artistique, pour les pays de l'Afrique centrale. Mme Yolande Elebe a échangé avec beaucoup d'acteurs culturels. Elle connaissait mais elle connaît maintenant mieux l'ensemble des préoccupations des acteurs culturels. Le point négatif concerne l'organisation du sommet de la culture. La ministre ne s'est pas clairement engagée à l'organiser. Pourtant, c'était une promesse du chef de l'Etat. Si cela ne se fait plus, nous aimerions connaître les raisons. Car la tenue de ce sommet doit permettre une nouvelle organisation du secteur culturel.
La Pros. : Que pensez-vous de l'initiative de la ministre de mettre en place le projet sur l'assurance sociale des artistes en RDC ?
DK : Elle est bonne comme initiative mais qui va financer cela? Qui va payer pour ça, les artistes? L'État ? Un organisme privé ? Cela va coûter cher, qui payera ? J'ai appris qu'un organisme a accepté de s'en occuper. Il amènera de l'argent nécessaire ou ça ne sera que la gestion administrative ? Moi, je me pose toutes ces questions.
La Pros. : Vous êtes membre de la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique). Quelle lecture faites-vous de la gestion des droits d'auteur en RDC par rapport à votre expérience en France ?
DK: La gestion des droits d'auteur en RDC est chaotique. La répartition forfaitaire intégrale est également responsable des désordres qui persistent. Il n'y a aucune transparence. On ne sait pas, par exemple, pourquoi on a versé telle somme à tel artiste et pas à l'autre. Les critères ne sont pas définis. Cela est inacceptable. La musique, le cinéma et d'autres disciplines artistiques impliquent plusieurs métiers. Chaque professionnel de ces métiers doit être en mesure de percevoir ses droits d'auteur convenablement.
La Pros. : Que proposez-vous comme solutions pour remédier à cette situation qui gangrène le secteur des droits d'auteur ?
DK : Nous devons faire preuve de courage en reconnaissant que la gestion des droits d'auteur en RDC est un échec. On assiste depuis plusieurs années à une succession des conflits, devant une justice incapable de mettre fin à ces désordres. Je propose la dissolution de la Socoda et la création d'une nouvelle société des droits d'auteur, en corrigeant les erreurs du passé, en abandonnant la répartition par forfait intégral, en imposant des critères transparents en ce qui concerne la répartition, car sans cela, la gestion des droits d'auteur en RDC sera toujours, source des conflits, de plus en plus grandissants. Il faut commencer à payer les droits voisins c'est-à-dire le droit destiné aux artistes qui accompagnent ou qui interprètent. Jusqu'à présent, les droits voisins n'ont jamais été payés en RDC. La répartition forfaitaire englobe tout. Il est difficile d'y voir clair !
La Pros. : Que doit faire la RDC pour que la Rumba congolaise devenue patrimoine mondial de l'humanité contribue à son économie nationale à l'ère des industries culturelles créatives (ICC)?
Didier Kembwarss : La Rumba est une musique merveilleuse, la plus belle des musiques. C'est une musique qui triomphe partout en Afrique et dans des grandes salles en Europe et en Amérique. Le problème est que les créateurs de cette belle musique ne touchent pas correctement leurs droits à la Socoda. La rumba peut contribuer à l'économie du pays comme d'autres produits marchands si nous mettons certaines règles.
Il faut instaurer un taxe sur chaque billet vendu dans des concerts qui se déroulent dans des grandes ou petites salles ou espaces, fixer un forfait pour des spectacles payants. Chaque concert doit être déclaré. C'est l'argent qui sera géré par le ministère de la culture peut être utilisé pour financer la sécurité sociale des artistes. On doit prévoir un montant qui sera prélevé par l'État lors de chaque répartition des droits d'auteur. Chaque bénéficiaire doit contribuer.