En parallèle aux problèmes d'eau, les coupures d'électricité deviennent de plus en plus infernales de jour en jour. Si des mesures d'urgence sont mises en oeuvre pour l'eau, la Jirama est vraisemblablement à court de solutions pour le volet énergétique.
«Il n'y a plus qu'à prier pour qu'on ait beaucoup de pluies». C'est ainsi que s'est confiée, sur un ton dépité, une source avisée sur la situation de l'approvisionnement en électricité. Que ce soit au détour d'échanges impromptus ou durant des conversations téléphoniques, les réponses des sources sur la crise énergétique actuelle convergent vers un constat: la Jirama est dans l'impasse.
À la question : «Y a-t-il des solutions envisageables dans l'immédiat ou à court terme, au moins pour atténuer le délestage ?» Comme si elles se donnaient le mot, les sources s'en remettent toutes à la météo. «Des pluies abondantes et le plus tôt possible, c'est ce qu'il nous faut», est la phrase de l'une d'elles. Prier les cieux pour avoir de la pluie, afin que la centrale hydroélectrique d'Andekaleka puisse tourner à plein régime.
À elle seule, la centrale Andekaleka et ses 112 à 114 mégawatts fournissent 55 % de l'électricité nécessaire au Réseau interconnecté d'Antananarivo (RIA). En cette période d'étiage, la centrale peinerait à produire 40 mégawatts d'électricité par jour. «Il faut, par ailleurs, arrêter les turbines durant une partie de l'après-midi, afin d'accumuler de l'eau pour affronter les pics de consommation d'électricité en soirée», explique un technicien.
Les centrales hydroélectriques d'appoint, comme Mandraka et Farahantsana, sont également en sous-régime. La pluie de samedi n'a visiblement pas apporté le déluge tant espéré. La direction générale de la Jirama aurait, par ailleurs, mis en stand-by les opérations de pluies provoquées. Elle souhaiterait attendre que les conditions météorologiques soient optimales afin de ne pas gaspiller de l'argent.
Les centrales thermiques, comme celles de Mandroseza, n'arrivent pas à combler le gap laissé par les centrales hydroélectriques. Le parc solaire d'Ambatolampy, non plus, n'arrive pas à produire suffisamment pour, au moins, atténuer le délestage dans la RIA. Un temps, il a été décidé de mettre à contribution les Turbines à combustion (TAC), situées à Ambohimanambola, au moins pour quatre heures chaque soir. Elles peuvent produire jusqu'à 30 mégawatts par jour.
Insoutenable
Depuis le début du mois, les usagers comptent jusqu'à 15 heures de coupures par jour, à savoir quatre à cinq heures la nuit, trois heures au moins en début de matinée, trois heures en milieu de journée et trois heures en soirée. Des délais qui peuvent s'éterniser si les délestages s'accompagnent de pannes techniques.
L'utilisation des TAC en renfort aurait finalement été bottée en touche car trop coûteuse. Quatorze mille litres de gasoil par heure seraient nécessaires pour les faire tourner. Le projet d'installation de centrales solaires pour booster la production d'électricité dans le RIA tarde cependant à se mettre en place. De même, à cause de contraintes logistiques, les blocs-moteur destinés à une centrale thermique de 105 mégawatts, qui tournera au fuel lourd, destiné à la RIA, sont bloqués au port de Toamasina.
Le conseil des ministres d'hier a autorisé le ministère de l'Énergie et des hydrocarbures à utiliser le budget destiné à son Programme d'investissement public (PIP), notamment «pour l'installation des parcs solaires» et leur raccordement au réseau de la Jirama. Il s'agit probablement des centrales solaires destinées à renforcer l'approvisionnement du RIA.
De même, le paiement d'une partie de la facture pour la construction d'une centrale électrique de 105 mégawatts à Ambohimanambola a été acté en conseil des ministres hier. La Jirama prévoit la mise en marche de la nouvelle centrale thermique qui sera installée à Ambohimanambola pour juin 2025. D'ici là, les ponts de la RN2 seront renforcés pour permettre l'acheminement à Antananarivo des moteurs entreposés au port de Toamasina.
Certains appellent toutefois à des solutions d'urgence, visant au moins à réduire la durée des coupures en attendant l'arrivée de la pluie tant espérée. Comme le reconnaît le président de la République, la crise énergétique est «insoutenable». Les usagers sont à bout de nerfs et rongent leur frein. Le délestage met à genoux l'économie. Déjà que le gros du budget étatique est destiné à la subvention de la Jirama, les petites et grandes entreprises, soit le gros des contribuables, sont aussi sous perfusion.
L'achat de carburant pour les groupes électrogènes entraîne un surcoût considérable pour les entreprises. N'arrivant plus à supporter cette dépense additionnelle, certaines sociétés choisissent d'arrêter leurs activités durant les heures de délestage. Un arrêt d'activité entre quatre et six heures par jour risque d'impacter les revenus et, pourtant, les charges ne changent pas. La facture d'électricité peut même être revue à la hausse malgré les longues coupures.