L'Association d'appui et d'éveil Pugsada (ADEP) a organisé avec le soutien de l'ONG Save the children une rencontre d'information et de plaidoyer sur le mariage d'enfants au profit d'une quinzaine de journalistes le jeudi 17 octobre 2024 à Ouagadougou.
En dépit des efforts des acteurs pour mettre fin au mariage d'enfants au Burkina, la pratique demeure préoccupante. C'est pourquoi, certaines associations comme l'Association d'appui et d'éveil Pugsada (ADEP) ont décidé de faire des médias des alliés dans la lutte pour l'élimination de la pratique. Conscient que pour que leur accompagnement soit efficace, ils doivent être bien outillés sur le sujet, une rencontre d'information a été initiée à leur intention par l'association avec le soutien de Save the Children le jeudi 17 octobre 2024 à Ouagadougou. Cette rencontre a été l'occasion de présenter la problématique du mariage d'enfants aux journalistes, son ampleur dans le monde, en Afrique et particulièrement au Burkina Faso ainsi que les causes et conséquences.
De façon générale, l'ensemble des communicateurs ont noté que le mariage d'enfants existe dans tous les pays du monde. Pourtant, il constitue une violation des droits de l'homme et porte atteinte aux nombreuses priorités de développement. En plus de son caractère mondial, le mariage d'enfants présente un taux moins reluisant. La coordonnatrice de la Coalition nationale contre le mariage d'enfants au Burkina (CONAMEB) Eulalie Yerbanga a noté en effet qu'environ 15 millions de filles sont mariées chaque année avant l'âge de 18 ans, dont 39% en Afrique sub-saharienne.
Poursuivant, elle a indiqué que les régions de l'Afrique de l'Ouest et du Centre présentent les taux de prévalence les plus élevés en Afrique et viennent en deuxième position dans le monde derrière l'Asie du Sud. Avec une prévalence d'une femme sur dix mariées ou en union avant 15 ans et d'une femme sur deux mariées avant 18 ans, le Burkina Faso fait partie des pays où la prévalence du mariage d'enfants est le plus élevée. De ce qu'elle a dit, il est classé 5eme pays au monde. Dans le futur, a souligné Mme Yerbanga, les études montrent qu'avec les taux de prévalence actuels et leur niveau de réduction, la moitié des filles mariées avant l'âge de 18 ans seront africaines en 2050.
Concernant les causes, elle a pointé du doigt essentiellement la pauvreté qui contraint certains parents à donner leurs filles en mariage alors qu'elles sont encore des enfants. Pourtant, a fait savoir la coordonnatrice de la CONAMEB, les conséquences du mariage d'enfants sont multiples allant des violences physiques aux conséquences sanitaires et économiques. Pourtant, a souligné la Directrice exécutive de l'ADEP Hortense Lougué, le phénomène s'est exacerbé avec la crise sécuritaire et humanitaire que connait le Burkina depuis quelques années.
Notant par ailleurs que les efforts de la société civile, des communautés et des leaders communautaires avec le soutien des PTF ont permis d'engranger des résultats (De 2015 à 2021, la proportion de femmes âgées de 20 à 24 ans mariées avant leurs 18 ans a chuté de 51,3 % à 38,2 % et celle des femmes âgées de 20 à 24 ans qui se sont mariées avant l'âge de 15 ans, a baissé de 8,9% à 7,8%), elle a indiqué que des défis demeurent. Le plus grand est la fixation de l'âge du mariage à 18 ans pour les filles et les garçons. En effet, le Code des personnes et de la famille (CPF) actuel du Burkina permet à une jeune fille d'être mariée à 17 ans, contre un âge minimum légal de 20 ans pour les garçons.
C'est ainsi qu'en 2018, une vingtaine d'organisations a formé un groupe de plaidoyer sous le leadership de la CONAMEB en vue de mener le plaidoyer auprès du gouvernement pour la révision du CPF. Après un long processus, il a été adopté en conseil des Ministres le 10 juillet 2024, au plus grand bonheur du groupe de plaidoyer et de tous les acteurs qui portent la thématique. Mais, ce bonheur reste non comblé car le dernier acte demeure l'adoption du CPF par les députés. C'est pourquoi, les acteurs restent en éveil et continuent la veille et le plaidoyer.
C'est ainsi que le 12 septembre 2024, une équipe de la CONAMEB et de Save the Children a rencontré les députés du Réseau de protection pour la protection des Droits de l'enfant (REPRODEN) pour discuter de la thématique de la protection des enfants et surtout du mariage d'enfants dans le but que les députés s'engagent à soutenir l'adoption du CPF révisé qui fixerait l'âge légal du mariage à 18 ans.
Les journalistes présents à l'atelier de formation ont été également invités à mettre leur plume et leur micro à contribution pour l'adoption du CPF tel que voulu par les acteurs. « Certaines indiscrétions susurrent qu'une dérogation a été ajoutée pour que la fille soit mariée à 16 ans sur autorisation du juge mais notre souhait est qu'il n'y ait même pas de dérogation », a indiqué Mme Yerbanga.