L'Indice Ibrahim de la Gouvernance en Afrique (IIAG) 2024 dresse un constat alarmant : après des années de progrès constants, la gouvernance s'est arrêtée en 2022, marquant ainsi une régression inquiétante.
Une stagnation responsable d'un ralentissement amorcé dès 2018, particulièrement préoccupante du fait qu'elle touche près de la moitié de la population africaine, qui vit dans des pays où la situation s'est détériorée depuis 2014.
Le rapport sur l'IIAG révèle des trajectoires très contrastées. D'un côté, des avancées notables sont enregistrées dans les domaines des infrastructures (+7,1 points), de l'égalité femmes-hommes (+6,9 points) et de la santé (+3,5 points). De l'autre, une détérioration continue de la sécurité et de la démocratie menace ces acquis, avec plus de 77% de la population africaine vivant dans des pays où ces deux dimensions fondamentales se sont dégradées depuis 2014. Certains pays progressent même dans ce contexte difficile. Les Seychelles, qui ont gagné 10 points sur la décennie, occupent désormais la première place du classement, dépassant Maurice. Le Maroc, la Côte d'Ivoire, le Bénin et l'Angola ont également réalisé des progrès substantiels.
Les Seychelles se distinguent en étant le seul pays, avec la Sierra Leone, à s'être améliorées dans l'ensemble des 16 sous-catégories évaluées. Cependant, les tendances globales restent préoccupantes. La sécurité et la participation citoyenne se détériorent dans de nombreux pays, compromettant le développement humain et économique. Les sous-catégories Sécurité & Sûreté (-5,0 points) et Participation (-4,5 points) enregistrent les plus fortes baisses. Plus inquiétant encore, ces reculs s'accélèrent depuis 2019 dans plusieurs pays.
Un fossé croissant entre progrès et perceptions
Une découverte notable du rapport est le décalage entre les améliorations objectives dans certains domaines et la perception des citoyens. Même lorsque des progrès sont réalisés en matière d'infrastructures ou d'opportunités économiques, de nombreux Africains ne ressentent pas d'amélioration tangible dans leur vie quotidienne. Ce fossé entre réalités et perceptions constitue un défi supplémentaire pour la stabilité et le développement du continent. « L'Afrique ne peut être réduite à une simple moyenne », souligne Mo Ibrahim, président de la Fondation.
L'Afrique présente une mosaïque de situations où coexistent succès remarquables et défis persistants. Si les progrès en matière d'infrastructures, d'égalité des genres et de développement économique nourrissent l'optimisme, la montée des conflits, les reculs démocratiques et le mécontentement croissant des populations, en particulier des jeunes, appellent à une vigilance accrue et des actions concrètes pour consolider les acquis et inverser les tendances négatives.