C'est une victoire du peuple qui est gravée à jamais dans les annales de l'histoire du Burkina Faso. Les 30 et 31 octobre 2014, des milliers de manifestants s'étaient rassemblés à Ouagadougou et dans plusieurs autres villes pour exiger le départ du Président Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 27 ans.
Face à la pression populaire très forte, l'«enfant terrible de Ziniaré» n'eut d'autre choix que de jeter l'éponge et de prendre la route de la Côte d'Ivoire où il vit en exil depuis ce temps. Le projet de modification de l'article 37 de la Constitution portant limitation des mandats présidentiels, qui devait lui permettre de s'éterniser au pouvoir, avait tourné court et précipiter sa chute.
Personne ne pouvait s'imaginer à l'époque que le très craint et redouté Blaise Compaoré, protégé par l'ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP), allait quitter le pouvoir en 48 heures. Mais tel a été le sort de cette figure politique pour la moins énigmatique, qui a connu ses hauts et ses bas à la tête du Burkina Faso.
Ce départ sur la pointe des pieds de Blaise Compaoré a été obtenu au prix d'énormes sacrifices, puisqu'une trentaine de dignes fils du pays sont morts, pour que plus rien ne soit comme avant. Dix ans après cet évènement, les réflexions autour d'un Burkina Faso, débarrassé de certaines tares, comme la corruption, les détournements de deniers publics, le favoritisme et le népotisme, sont toujours d'actualité.
La chûte de Blaise Compaoré a certes ouvert la voie à une nouvelle ère au pays des Homme intègres, mais les fruits ont-ils tenu la promesse des fleurs ? De toute évidence, l'insurrection populaire d'octobre 2014, qui a tour à tour débouché sur une Transition conduite par Michel Kafando, un régime démocratique avec Roch Marc Christian Kabore et l'avènement au pouvoir du Mouvement pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), a permis de poser de nouveaux jalons en matière de gouvernance.
Les insurgés qui y voyaient un nouveau départ pour la patrie, espéraient de nombreuses réformes en matière de gouvernance politique, sociale et économique. Dans un esprit de continuité de l'Etat, les gouvernants de l'ère post-Compaoré ont répondu à ces aspirations, en posant des actions significatives.
Entre autres, y figurent, la réforme de la Constitution qui interdit la modification de la durée du mandat présidentiel et fixe une limitation stricte à deux mandats de cinq ans, le renforcement des compétences du Conseil constitutionnel et de l'Autorité supérieure du contrôle d'Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC), l'opérationnalisation du Pacte national du renouveau de la justice burkinabè. Dans le domaine judiciaire, un dossier emblématique, comme l'assassinat du père de la Révolution burkinabè, Thomas Sankara, a connu son épilogue en avril 2022, plus de 34 ans après.
Le jugement a été soldé par la condamnation à vie de Blaise Compaoré, considéré comme le commanditaire principal de ce meurtre. Cette affaire n'aurait certainement pas été conduite à terme, sans l'avènement de l'insurrection populaire. Favorisées par la chute de Blaise Compaoré, les réformes engagées pour refonder la Nation viennent à point nommé, mais des efforts restent à consentir pour combattre les pratiques aux antipodes de la bonne gouvernance qui persistent. Si l'insurrection populaire d'octobre 2014 a révélé la fragilité des institutions, ce que les reformes sont censées corriger, son principal héritage reste l'éveil citoyen.
Elle a cultivé dans l'esprit des Burkinabè, la vigilance et la promptitude à se mobiliser pour défendre leurs droits et la démocratie. Cet éveil citoyen inspire d'ailleurs le reste du continent africain. Ce qui constitue une fierté à l'échelle nationale. L'insurrection populaire d'octobre 2014 qui a mis fin au règne de Blaise Compaoré enseigne que tout gouvernant doit toujours aller dans le sens des aspirations légitimes, s'il ne veut pas se mettre à dos le peuple. Toutefois, son départ n'a pas été une panacée, malgré les espoirs suscités. De nombreux défis, avec l'insécurité au premier plan, minent le Burkina post-insurrectionnel toujours à la recherche de ses marques. A la tête du pays depuis le 30 septembre 2022, le capitaine Ibrahim Traoré a fait de ces défis, son combat personnel.
Le chef de l'Etat, qui a inscrit son action dans la lutte acharnée contre le terrorisme, l'affirmation de la souveraineté et le développement du pays, travaille à léguer à la postérité, épouse les aspirations de l'insurrection populaire d'octobre 2014.