L'électricité ou l'éducation ? C'est le dilemme à résoudre pour alléger le délestage. L'État a décidé de mettre en marche un groupe dont le fonctionnement coûte 300 millions d'ariary par jour. Jusqu'ici, ce groupe n'a jamais été utilisé, vu le budget nécessaire pour l'actionner. Une somme hors de portée de la trésorerie de la Jirama, dont la situation financière précaire a nécessité la nomination d'un DG israélien par la Banque mondiale. Un plan de redressement qui passe obligatoirement par la réduction des charges de la société. La Jirama a donc cessé de recourir aux services des fournisseurs d'énergie privés par l'entremise des centrales thermiques. La Jirama n'était plus en mesure de régler la facture de ses prestataires, qui s'élève à plusieurs centaines de milliards d'ariary.
Les intérêts sont donc divergents entre l'État et les bailleurs de fonds. L'assainissement des finances de la Jirama passe par des mesures impopulaires et anti-économiques, à l'instar des délestages en vigueur depuis la fin des années 90. À cette nuance près que cette année, les délestages ont pris des proportions énormes susceptibles de créer des secousses sociales graves et mettent en péril toutes les activités économiques. Sentant le danger venir et pour éviter un marasme économique absolu, l'État a décidé de consacrer tous les efforts pour aider la Jirama et alléger les affres du délestage. Un grand ouf de soulagement pour les usagers en général et les entreprises, prises à la gorge, en particulier.
Tant mieux, mais comme chaque médaille a son revers, la contrepartie de cette décision a été prise, à contrecœur, sur le budget de l'éducation, à en croire le chef de l'État, hier à Ambohimanambola. Il a reconnu que c'est une décision qui fait mal. L'éducation est un domaine également en plein redressement après des années de descente aux enfers. Cette amputation de son budget aura inévitablement des conséquences désastreuses à court ou moyen terme. Mais il fallait trancher, et l'État a divisé la poisse en deux.
L'éducation ne doit pas être la seule à en faire les frais de cette mesure. Des priorités doivent désormais être établies. Comme il s'agit véritablement de l'intérêt supérieur de la Nation, tout le monde doit serrer la ceinture et contribuer au sacrifice. À commencer par les députés, représentants du peuple, citoyens honorables comme ils se font appeler. Vu l'urgence, la pauvreté généralisée et la situation de la Jirama, les députés seraient dignes de leur rang en abandonnant toutes les revendications matérielles et financières faites à l'État.
D'une façon plus générale, l'austérité devra être le maître mot dans la gouvernance. Le renouvellement du parc automobile, avec des véhicules de luxe, dans les ministères, les ateliers et séminaires improductifs depuis 65 ans, les missions et tournées sans intérêt, les indemnités injustifiées, les tickets de carburant... devraient être supprimés. Il est immoral que, dans l'un des pays les plus pauvres au monde, les ministères se permettent chaque année, dans leur budget d'investissement, d'inscrire un renouvellement du parc automobile pour les directeurs, avec en prime des limousines.
Il faut bien comprendre que la situation est grave et qu'elle nécessite une prise de conscience de tous les citoyens, toutes tendances politiques confondues.