Ville historique et emblématique, Foulassi, petite localité située à quelques kilomètres de Sangmelima est peu connue de nombreux Camerounais. Pourtant Foulassi est le berceau de l'hymne national du Cameroun. C'est ici qu'en 1928, les élèves de la première promotion de l'Ecole normale de la même localité composeront les strophes de l'hymne national.
L'histoire retiendra aussi que René Jam Afane, compositeur des paroles et Samuel Minkyo Bamba, compositeur de la musique comme principaux auteurs. Camer.be votre média de proximité revient ce jour dans le cadre d'un dossier sur ces deux personnages méconnus par la jeune génération des Camerounais. La Fondation Moumié leur avait décerné en novembre 2009 à titre posthume, un prix spécial .
Retour sur les traces de ces deux héros.
En 1928, Foulassi est l'une de nombreuses stations de la Mission Presbytérienne américaine au Cameroun. Cette petite localité abrite une Ecole normale qui forme en trois ans des instituteurs. Cette année là, comme nous l'apprend Antoine Edo (Cf. Fleurs du nationalisme Camerounais Vol.1 FMPS.Ebwa, pp.110-113), l'école est dirigée par un pasteur de nationalité française, le révérend Camille Armand Chazeau. Il fut proposé aux élèves de fin de formation un devoir d'instruction civique au titre évocateur : « exprimer leur espoir en l'avenir du Cameroun ».
« Les élèves se mettent au travail dans la salle d'étude qui leur sert en même temps de bibliothèque. Le lendemain matin, en classe, chacun lit son devoir à haute voix. Les meilleures phrases sont portées sur le tableau noir.
Certains élèves qui s'intéressent à la poésie, comme René Jam Afane, le plus doué de tous ces poètes en herbe, fait la synthèse de toutes les phrases et sort finalement des paroles qui sont contenues dans les deux strophes ( version originale) de notre hymne national. Il leur donne le titre de « chant de ralliement camerounais.
Après la lecture de ces paroles devant tous ses camarades de promotion.[...] Il est alors question de composer une mélodie devant accompagner ces paroles, les camarades font appel aux trois musiciens de la promotion : Michel Nkomo Nanga, Moïse Nyatte Nko'o et Samuel Minkyo Bamba. Les trois musiciens se mettent au travail, séparément. » (Cf.P-P23-24, Le Cameroun. Arts, histoire et traditions de Bernard Puepi et Henri Njomgang, Ed harmattan)
Selon la même source, ces compatriotes musiciens vont travailler assidûment et sans arrêt pendant deux mois. Leurs oeuvres seront auditionnées et celle de Samuel Minkyo Bamba retiendra l'attention des deux autres musiciens et des camarades de promotion.
Selon les propos de Samuel Minkyo Bamba diffusés en 1991 lors d'une émission de la télévision nationale la CRTV (Cameroon Radio Television), il se devait dès lors d'enseigner cette chanson à ses camarades.
Ce chant de ralliement fut ainsi enseigné dans toutes les écoles du Cameroun et fut adopté par la première assemblée législative (1957-1959) comme hymne national du Cameroun (loi n°57 -47 du 5 novembre 1957)
Toujours en 1991, la CRTV au cours de cette même émission avait présenté à l'une de ses éditions des journaux parlés, la rétrocession d'un grand bâtiment à Minkyo Bamba de son vivant pour lui manifester « la reconnaissance de la nation » pour son oeuvre. L'un de nos confrères du quotidien Le jour s'étant rendu à Bikala en novembre 2007 avait entendu dire des membres de la famille de Minkyo Bamba qu'il s'agissait d'une « fausse image » et que rien n'avait été fait en guise de reconnaissance des oeuvres de ce héros.
Quant aux droits d'auteurs, le flou persiste au niveau des ayants droits
Pour la fondation Moumié, les deux génies qui ont eu l'inspiration éternelle de l'Hymne National du Cameroun, mais qui sont tous les deux morts dans un dénuement insultant, et dont la Mémoire éternelle sombre aujourd'hui comme hier dans l'oubli total des faiseurs de destins qui dirigent le Cameroun. Leurs tombes sont abandonnées dans une broussaille dans le Sud du Cameroun, et l'Ecole de Foulassi où ils ont écrit l'Hymne se trouve dans un état de délabrement qui tue pour la deuxième fois leurs Mémoires constate t-elle. La Fondation Moumié entend d'ailleurs ajoute t-elle lancer une campagne pour la réhabilitation de la Mémoire de ces deux « grands hommes », et appelle « le gouvernement camerounais à prendre ses responsabilités ».
Quant aux allégations avancées sur le non payement de ces droits depuis des decennies, des problèmes subsistent dans le calcul des droits, notamment le remplissage des différentes fiches de programmation de dites oeuvres sur les antennes de la Crtv.
Quand bien même ses droits seraient payés dans leur totalité à ses ayant droits, cela ne saurait suffire, pour la dimension grandiose de l'ouvre accomplie par ces héros. Des initiatives allant dans le sens de perpétuer sa mémoire comme celle de la Fondation Moumié ne sont pas de trop. C'est la condition sine qua non pour que ce nom ne soit pas relégué aux calendes bantoues.