Paul Biya, au pouvoir depuis 42 ans ce 6 novembre, n'a jamais réussi à résoudre la crise anglophone, ou encore à trouver une réponse à Boko Haram.
Alors que ce 6 novembre marque 42 ans de pouvoir de Paul Byia, le président du Cameroun n'est pour l'heure pas parvenu à régler la crise dans les régions anglophones qui dure depuis huit ans. Au moins 6.000 civils ont été tués durant ce conflit par les forces gouvernementales et les combattants séparatistes, selon l'organisation Human Rights Watch.
C'est un conflit qui a débuté fin 2016 par les revendications des régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, notamment des demandes pour une meilleure représentation politique et des réformes éducatives. Le 11 octobre 2016, des dizaines d'avocats des régions anglophones ont ainsi manifesté dans la ville de Bamenda, le chef-lieu de la capitale du Nord-Ouest. Ces avocats exprimaient leur exaspération face à l'absence de version anglaise de textes juridiques essentiels.
Le recours à la force
Face à cela, la réponse du gouvernement a été essentiellement répressive avec l'envoi de forces de police sur place. La militarisation des régions anglophones puis l'emprisonnement des leaders séparatistes ont contribué à intensifier le conflit. En 2017, les séparatistes anglophones radicalisés ont ainsi lancé leurs premières attaques contre l'armée camerounaise.
Cyrille Rolande Bechon, directrice exécutive de l'ONG Nouveaux droits de l'Homme, estime que la réponse du gouvernement face à cette crise est depuis le début en déphasage avec la réalité.
Selon lui, "on est dans un système où tout est centralisé, avec une décentralisation qui ne marche pas. Le statut spécial aurait pu marcher si le régime de Yaoundé avait véritablement donné tous les pouvoirs. Là, on a le sentiment d'avoir eu des réponses "habillées", il aurait fallu du contenu réel en termes de ressources pour que ces réponses aient un effet réel sur les populations. Résultats des courses : le conflit continue".
Mais ce n'est pas la seule crise. Yaoundé fait également face à l'insurrection de Boko Haram dans l'Extrême-Nord, et l'instabilité causée par les rebelles centrafricains dans l'Est. Chacune de ces crises a des répercussions profondes sur la sécurité, la stabilité et le bien-être des populations, entraînant un nombre considérable de déplacés et de réfugiés.
Des centaines de milliers de déplacés
En 2023, on a enregistré plus de 638.000 personnes déplacées à l'intérieur du pays dans ces régions et au moins 1,7 million ayant besoin d'une aide humanitaire, selon Human Rights Watch. Felix Agbor Balla Nkongho, président du Centre pour les droits de l'Homme et la démocratie en Afrique, salue tout de même quelques initiatives du gouvernement telles que le Grand dialogue national tenu en 2019.
Il estime que "pour résoudre cette crise, cela ne dépend pas que du gouvernement. Il faut que les séparatistes comprennent qu'on ne peut pas gagner cette guerre en utilisant les armes contre la population qu'il faut protéger. Ils doivent aussi faire des concessions. Il ne faut pas dire séparation ou rien".
Cependant, l'impact réel de ce dialogue reste limité et les perspectives de paix semblent lointaines. A la veille du 42e anniversaire au pouvoir de l'homme du 6 novembre 1982, la situation reste tendue, avec des affrontements sporadiques entre les forces gouvernementales et les groupes sécessionnistes. Tandis que plusieurs leaders sécessionnistes, à l'instar de Sisiku Ayuk Tabe, sont toujours en prison.