Le ministre de l'Énergie, la Jirama et la société Jovena apportent des explications à la persistance du délestage malgré les instructions présidentielles. Selon le directeur général de la Jirama, les consignes du chef de l'État seront respectées dans une semaine.
Une réduction significative du délestage. C'est ce qu'a assuré Ron Weiss, directeur général de la Jirama, hier, durant une rencontre avec la presse sur le site de production d'électricité, à Ambohimanambola. «Dans moins d'une semaine, les objectifs fixés par le président de la République seront atteints», affirme-t-il.
Pour tenir parole, le patron de la Jirama compte sur une cadence soutenue de la livraison de fuel lourd aux centrales thermiques, dont la plupart sont situées à Ambohimanambola. Une livraison de fuel lourd de seize à vingt camions, soit 450 000 litres, serait nécessaire pour faire tourner à plein régime les centrales thermiques du Réseau interconnecté d'Antananarivo (RIA), selon Jean-Baptiste Olivier, ministre de l'Énergie et des Hydrocarbures, également présent à Ambohimanambola.
Lors d'une descente à Ambohimanambola, le 30 octobre, Andry Rajoelina, président de la République, a donné comme instruction que toutes les centrales thermiques du RIA soient actionnées à plein régime. Ceci, pour renforcer la production et réduire jusqu'à 80 % le délestage. Bien que la décision soit «douloureuse», l'État s'est même résolu à payer le prix fort, à savoir 300 millions d'ariary par jour, pour l'utilisation des deux Turbines à combustion (TAC) de 30 mégawatts.
Fonctionnant au gasoil, les TAC en consomment 14 000 litres pour cinq heures de fonctionnement. Par ailleurs, le surplus des coûts pour l'achat du fuel lourd pour les autres centrales thermiques est aussi pris en charge par l'État. En temps normal, ces centrales fonctionnent entre 60 % et 70 % de leur capacité. Ce qui donne une consommation journalière de 300 000 litres de fuel lourd tout au plus, contre 450 000 litres actuellement.
Le souci est que depuis la descente présidentielle à Ambohimanambola, le délestage s'est renforcé. Jusqu'à hier, plusieurs quartiers n'ont eu droit qu'à cinq heures d'électricité sur vingt-quatre heures. En conséquence, des manifestations, et même des émeutes pour contester le délestage, ont secoué les rues de plusieurs secteurs d'Antananarivo et ses environs, chaque soir, depuis samedi. La tension est montée d'un cran durant la soirée de lundi.
Rétention d'informations
En parallèle, des acteurs politiques au sein du pouvoir affirment une suspicion de «sabotage». Le député Fetra Rakotondrasoa, élu sous les couleurs de l'Irmar, s'interroge : «Pourquoi, malgré les solutions données par l'État aux problèmes avancés par la Jirama, et qui pèsent lourd sur les finances publiques, le délestage persiste-t-il ?». Il ajoute : «À qui profite ou qui veut profiter de la frustration et des contestations populaires face au délestage?» Face à la situation, l'idée d'une probable «insubordination» face aux instructions présidentielles est évoquée.
La sortie médiatique à Ambohimanambola, hier, a eu pour objectif d'apporter des explications à l'enlisement du délestage. Pour l'occasion, Donald Emerant, directeur général de Jovena, qui fournit le fuel lourd, était aussi présent. Ce dernier a rassuré sur la suffisance des réserves entreposées à Toamasina et qu'une autre cargaison arrive en prévision des besoins de début d'année prochaine.
D'une seule voix, les trois responsables qui ont fait face à la presse, hier, expliquent que cette fois-ci, la persistance des longues heures de délestage est due au retard de livraison de fuel lourd. Ceci, en raison de la fermeture du dépôt de carburant à Toamasina, les 1er et 2 novembre. En conséquence, dimanche, il n'y a eu que cinq camions qui ont livré du fuel lourd et lundi huit camions.
Ce n'est qu'hier que la livraison se serait rapprochée des besoins des centrales d'Ambohimanambola, avec quatorze camions. «Au fur et à mesure, on va arriver au nombre de 20 camions par jour, nécessaire», affirme le directeur général de Jovena. Il a fallu que la grogne populaire frise l'émeute pour que les responsables apportent une explication. D'autant plus que les déclarations sont confuses.
Le ministre Jean-Baptiste Olivier explique que la fermeture du dépôt de Toamasina est due au jour férié de la semaine dernière. Donald Emerant, lui, parle de «deux jours de maintenance». Visiblement, il y a un problème de remontée et de partage d'informations. Cette fermeture du dépôt de Toamasina, les 1er et 2 novembre, n'aurait pas été évoquée durant la réunion avec le Président, mercredi dernier. Pourtant, les conséquences de ces deux jours de «off», dans l'approvisionnement en électricité, sont désastreuses.
Une exception aurait pu être faite étant donné que la situation relève de la survie de l'économie, et même de l'ordre public, un cas de force majeure. «D'aucuns savent à la Jirama que le terminal de stockage du carburant à Toamasina est fermé les jours fériés, sauf à la demande. Pourquoi personne n'a anticipé cela, ni n'en a fait part aux responsables ?», s'insurge une source en interne, déplorant l'existence «de rétentions d'informations et d'éventuelles mauvaises intentions».