Mali: MSF reprend ses activités ambulatoires dans la région de Ténenkou, confrontée aux violences et aux inondations

communiqué de presse

La situation humanitaire dans le cercle de Ténenkou, dans le centre du Mali, continue de se dégrader après plusieurs années de crise. Les habitants sont pris en étau entre opérations militaires et violences des groupes armés, avec de nombreuses répercussions sur leur vie quotidienne, notamment une diminution de l'accès aux soins de santé. Les équipes MSF ont repris leurs activités de cliniques mobiles après deux ans d'inactivité due à l'insécurité.

« Les groupes armés imposent des restrictions de mouvements et exercent une pression constante sur les communautés du cercle de Ténenkou, à travers des enlèvements, des actes d'intimidation et d'autres exactions, déplore Assane Compaoré, chef de mission pour MSF au Mali. Les habitants ont de plus en plus de difficultés à mener des activités génératrices de revenus, comme le commerce ou la pêche, à cause de l'escalade des violences. Même pour les familles qui se consacrent à l'agriculture, il est difficile de cultiver suffisamment pour subvenir à leurs besoins. »

Les quelque 257 000 habitants du cercle de Ténenkou, répartis dans une dizaine de communes, souvent séparées les unes des autres par les affluents du fleuve Niger, vivent dans une insécurité grandissante provoquée par des attaques et affrontements entre groupes armés, milices et forces régulières. Entre janvier et août 2024, plus de 50 personnes blessées à la suite de violences ont été admises aux urgences de l'hôpital de Ténenkou ou dans les centres de santé soutenus par MSF. Autre particularité de cette zone dans laquelle les équipes MSF travaillent depuis 2016 : les crues du fleuve et de ses affluents inondent les axes routiers et isolent de nombreuses localités plusieurs mois par an. En 2024, des pluies diluviennes se sont abattues sur le Mali et ont provoqué des crues d'une ampleur inhabituelle.

Reprise des cliniques mobiles

En 2022, l'insécurité avait poussé MSF à suspendre ses cliniques mobiles dans les villages du cercle de Ténenkou. « Cette zone est un véritable désert médical et humanitaire. Face aux besoins croissants dans les villages reculés, où les structures de santé ne sont plus approvisionnées, nous reprenons actuellement nos cliniques mobiles, explique Assane Compaoré. Nous multiplions les efforts pour offrir des soins essentiels à la population, même si ce n'est pas une activité sans risque, compte tenu du contexte sécuritaire et de la géographie du cercle, inondé la majeure partie de l'année. »

Les cliniques mobiles de MSF sont composées d'infirmiers, de sage-femmes et de personnel paramédical qui se déplacent de village en village pour prodiguer des soins de santé primaire et orienter les patients qui en ont besoin vers le centre de santé de référence de Ténenkou.

L'arrêt des cliniques mobiles avait poussé MSF à développer une approche décentralisée et communautaire afin de maintenir des soins de santé dans des villages isolés. Une centaine d'agents de santé communautaire travaillent actuellement avec MSF dans le cercle de Ténenkou. Le personnel est recruté par le ministère de la Santé directement dans les villages concernés, et il est mis à disposition de MSF qui les forme à la prise en charge des cas simples de paludisme, de diarrhée et d'infection respiratoire et les approvisionne en médicaments et fournitures.

Les « Village mamans », pour le suivi des grossesses à risque

« C'est difficile de venir à l'hôpital, car notre village est isolé. Le niveau de l'eau est trop haut et même en pirogue, c'est compliqué. Cela fait un mois que j'habite dans le "Village mamans" et les docteurs suivent ma grossesse. Cela m'évite les risques liés au trajet », témoignait en août 2024 Binta Sow, dont la grossesse était bientôt à terme. Elle habite un village nommé Guillé, situé à 25 km de la ville de Ténenkou.

Ce « Village mamans » existe depuis 2018 et permet aux femmes, dont la grossesse comporte des risques de complications, d'être hébergées à proximité de la maternité et de bénéficier d'un suivi poussé. Elles viennent souvent de localités en proie aux violences et situées très loin de l'hôpital et leurs accompagnants peuvent également être accueillis.

« Il y avait beaucoup de complications et de décès maternels liés à l'accouchement. Certaines femmes devaient parcourir de longues distances, explique Mariam Dembélé, sage-femme superviseur pour MSF à Ténenkou. Elles étaient victimes d'accidents, et d'autres préféraient accoucher à domicile, malgré les risques ; car les routes ne sont pas sûres. On recevait une partie de ces femmes à la maternité, mais elles arrivaient dans un état critique. Pour les aider, nous avons mis en place ce lieu d'accueil et de suivi qui a vraiment contribué à faire diminuer les cas de complications au cours de la grossesse. Sur les 1 029 femmes qui ont accouché à la maternité entre janvier et septembre 2024, 109 étaient accueillies au "Village Mamans". »

En plus du service de maternité et des consultations gynécologiques, les équipes MSF de l'hôpital de Ténenkou travaillent dans les services des urgences, d'hospitalisation pédiatrique et adulte, et de néonatologie. Elles assurent les orientations vers d'autres hôpitaux, généralement vers Ségou ou Macina, pour les patients qui ont urgemment besoin de soins non disponibles à Ténenkou.

« Nous avons pris en charge plus de 2 400 patients au service des urgences depuis le début de l'année, soit 25 % de plus que l'année dernière. Parmi eux, une cinquantaine ont été orientés vers l'hôpital de Ségou », précise Koné Youssouf, infirmier superviseur des urgences de la médecine interne et pédiatrie de MSF à Ténenkou. Dans ces cas-là, MSF prend en charge tous les frais médicaux et le transport.

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