Ile Maurice: Les visions des partis politiques pour sortir du blocage actuel

Les trois grands blocs politiques s'engagent à redynamiser le secteur de l'éducation dans leurs manifestes électoraux. Tous reconnaissent les nombreuses lacunes existantes et proposent diverses approches. Cependant, selon Arvind Bhojun, président de l'Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE), c'est à la base que des changements profonds doivent être apportés.

L'Alliance Lepep propose de «remodeler l'Extended Programme» en orientant davantage vers une formation professionnelle, afin de mieux répondre aux besoins du marché du travail. Elle envisage également d'introduire une méthode d'évaluation différenciée dans le cadre du Nine-year Schooling, pour valoriser les compétences individuelles des élèves en fonction de leurs différents niveaux de performance. Parmi ses autres propositions, elle souhaite également favoriser des classes de petite taille pour assurer un meilleur suivi.

De son côté, l'Alliance du changement propose de détecter les difficultés d'apprentissage dès le primaire et de mettre en place des classes de rattrapage. Elle suggère également de supprimer l'Extended Programme au profit d'un cursus alternatif et de réintroduire un critère d'au moins trois credits au School Certificate (SC) pour accéder au Higher School Certificate (HSC). Quant à Linion Reform, elle prône une éducation inclusive, sans laisser personne de côté. Parmi ses propositions, elle souhaite introduire 1 000 bourses, augmentant ainsi le nombre de lauréats dans plusieurs filières.

Arvind Bhojun estime que ces propositions peuvent redynamiser le secteur de l'éducation, mais il souligne que l'Extended Programme, malgré ses faiblesses, n'a pas été supprimé dans les propositions de l'Alliance Lepep. «Ils envisagent plutôt d'améliorer cette formule. Ils mettent l'accent sur des cours vocationnels, permettant aux élèves de poursuivre, éventuellement, des études universitaires. Ces mesures sont intéressantes, mais elles soulignent l'échec du système actuel, en particulier de l'Extended Programme. Nous atteignons des points de blocage où certains élèves se retrouvent hors du système éducatif, malgré la gratuité de l'éducation.»

Concernant l'Alliance du changement, Arvind Bhojun souligne que la mention de l'exigence des trois credits au SC pour accéder au HSC refait surface, mais il regrette que peu d'informations soient fournies sur cette mesure, ainsi que sur les moyens concrets d'améliorer la base de l'enseignement, notamment l'école primaire. Quant à Linion Reform, elle rappelle que le Reform Party avait précédemment mené une étude sur le nombre d'enfants entrant à l'école primaire et le faible taux d'élèves parvenant à terminer leurs études. «Avec leurs 1 000 bourses, ils espèrent réduire le nombre de jeunes qui partent étudier à l'étranger en favorisant les institutions locales.»

Défaillances

En fin de compte, tous les partis semblent reconnaître les défaillances du système éducatif et la nécessité de réviser les réformes initiées sous Leela Devi Dookun-Luchoomun. «Le plus grand problème réside toutefois dans l'enseignement primaire. Les correcteurs sont parfois contraints de réduire les barèmes pour permettre aux jeunes de passer les examens de rattrapage, ce qui en dit long sur le niveau des élèves, surtout après six ans de scolarité. Il est crucial de définir les piliers éducatifs sur lesquels nous voulons bâtir l'avenir de notre pays», conclut Arvind Bhojun.

Selon le président de l'UPSEE, il est essentiel, pour les cinq prochaines années, de nommer un ministre de l'Éducation inspiré, en phase avec le Premier ministre et la vision de son gouvernement. À ses yeux, ce ministre doit être un pédagogue doté d'une véritable vision à long terme. «Nous devons déterminer quel secteur économique nous souhaitons développer et orienter notre système éducatif en conséquence. Il est crucial d'introduire, dès le primaire, une variété de matières permettant aux enfants de découvrir leurs talents et d'explorer différentes voies. Ainsi, chaque enfant pourra trouver sa voie, qu'elle soit sportive, vocationnelle, académique ou artistique. Au secondaire, il pourra approfondir cette spécialité et, au niveau tertiaire, devenir un professionnel accompli dans son domaine.»

Une réflexion approfondie s'impose sur ce secteur. Arvind Bhojun espère qu'un dialogue renforcé s'établira entre le ministère et les différents acteurs lors du prochain gouvernement. Mirella Chauvin partage cet avis. Avant de se présenter comme candidate de Linion Reform dans la circonscription no 17, elle était avant tout enseignante. Selon elle, il est impératif de supprimer l'Extended Programme. «C'est une catastrophe qui a nui aux enfants depuis le primaire. Il est inadmissible qu'un enfant, même en cas d'échec, progresse automatiquement du Grade 1 au Grade 6. En grandissant, ces enfants n'ont connu que l'échec et finissent par se percevoir eux-mêmes comme des échecs. Ce sentiment doit être brisé.»

Elle propose de redynamiser et repenser un programme adapté aux besoins des enfants. «Il faut savoir détecter leurs talents, aller à leur rencontre pour découvrir leur soif d'apprendre. L'école ne doit pas se limiter à l'aspect académique.» Mirella Chauvin suggère également de revoir l'organisation des journées scolaires, afin d'éviter que les enfants ne subissent neuf sessions consécutives. «Ils n'arrivent pas à assimiler tout cela. Je connais des enfants qui viennent à l'école le ventre vide le matin. Dans ces conditions, comment peuvent-ils se concentrer ? Il faut que l'école devienne un plaisir et non une corvée. Permettons-leur de choisir des activités comme la musique, la danse ou le sport, et pas seulement une fois par semaine.»

Elle ajoute que d'autres activités, telles que la peinture et le théâtre, pourraient aussi être intégrées pour encourager les jeunes. «Nous avons des talents cachés qui ne demandent qu'à s'exprimer.» Après les cours, les élèves enchaînent souvent avec des leçons particulières, y compris le week-end, constatet- elle. «Il n'y a plus d'enfance ni d'adolescence. Il est temps de repenser cela.»

Mirella Chauvin critique aussi l'exigence des cinq credit au SC. «On ne peut pas compromettre l'avenir d'un enfant de 15 ou 16 ans pour quelques credits manquants. Certains jeunes, des late bloomers, finissent même par devenir médecins. Il suffit de deux A-Levels pour obtenir un diplôme. Pourtant, pour intégrer le secteur public, cinq credits au SC sont requis, même pour ceux qui ont un doctorat. Cela n'a aucun sens !» Elle espère que le gouvernement qui prendra ses fonctions à partir du 12 novembre saura mieux répondre aux besoins des enfants, afin qu'ils ne soient pas les grands perdants du système actuel.

L'éducation est un sujet central pour Xavier-Luc Duval, leader du PMSD, qui s'engage à lui redonner ses lettres de noblesse. Il aborde ce thème dans chacune de ses interventions, soulignant que l'Extended Programme est un véritable échec. Il plaide également pour que les écoles et collèges confessionnels retrouvent leur prestige d'antan, afin de pouvoir remplir pleinement leur mission éducative. «Les écoles et collèges privés ne seront pas non plus oubliés», ajoute-t-il. Xavier-Luc Duval propose par ailleurs la création d'un fonds de solidarité scolaire de Rs 40 000 par an, destiné aux collèges. «Ce sera ainsi au directeur de décider si certains élèves ont besoin d'un soutien particulier ou de repas chauds», précise-t-il.

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.