Dans sa dernière édition du rapport sur la conjoncture économique intitulé « Équité et efficience du système fiscal tunisien », la Banque mondiale souligne que, bien que les recettes fiscales ne suffisent pas à couvrir les dépenses, la Tunisie parvient à collecter proportionnellement plus de recettes fiscales que la majorité de ses pairs.
Depuis deux décennies, ces recettes ont progressé plus rapidement que l'économie, principalement grâce à l'augmentation de l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). À l'inverse, l'impôt sur les sociétés a diminué en proportion des recettes totales et du PIB, en raison de la baisse du taux d'imposition légal. Toutefois, une analyse récente de la Banque mondiale laisse entendre que cette réduction ne contribue pas efficacement à stimuler l'investissement et l'emploi.
Cette politique fiscale, qui a allégé la fiscalité sur le capital, a progressivement transféré la charge fiscale vers les revenus du travail. Le système fiscal tunisien impose un poids conséquent sur les revenus salariaux, aggravé par le rôle important des cotisations de sécurité sociale.
Malgré un IRPP progressif, les bas revenus se retrouvent eux aussi lourdement taxés en raison des cotisations sociales et du système de déductions, ce qui alourdit le coût du travail pour les employeurs et limite leurs incitations à embaucher. Cette situation affecte également la progressivité du système fiscal. En parallèle, les revenus du capital bénéficient de nombreuses concessions et exonérations, diminuant ainsi leur contribution aux recettes fiscales. Le résultat est un taux effectif d'imposition du travail en Tunisie nettement plus élevé que celui du capital, un écart parmi les plus élevés dans les pays en développement selon les nouvelles données.
Cela accentue les inégalités, les revenus des plus riches provenant principalement du capital, tandis que ceux des moins fortunés dépendent davantage du travail. Pour rétablir un équilibre, la Banque mondiale recommande d'ajuster la fiscalité en allégeant celle pesant sur les revenus du travail, tout en rationalisant l'imposition du capital. De plus, une utilisation plus stratégique de la fiscalité indirecte - incluant l'instauration d'une taxe carbone - pourrait améliorer l'efficience et l'équité du système fiscal tunisien.