Une première dans l'histoire. Les bancs de l'opposition à l'Assemblée nationale se retrouveront avec uniquement deux députés alors que le camp de la majorité pourrait être renforcé par quatre députés de Rodrigues.
Après l'éclatante victoire par 60-0 de l'Alliance du changement, la commission électorale a attribué les postes de députés correctifs à Dianette Henriette-Manan et Jacques Edouard, les deux candidats malheureux de l'Alliance de Libération de Rodrigues, ainsi qu'à Adrien Duval et Joe Lesjongard de l'Alliance Lepep. Johnson Roussety, le commissaire adjoint de Rodrigues et dirigeant de l'Alliance de Libération, maintient que les deux députés correctifs rodriguais siégeront avec le gouvernement de Navin Ramgoolam.
Même son de cloche du côté des deux autres élus de Rodrigues, Francisco François et Roxana Collet, membres de l'Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR). Les quatre représentants de Rodrigues à l'Assemblée nationale, ainsi que le chef commissaire de l'île, Franceau Grandcourt et son adjoint, ont été invités à assister à la prestation de serment de Navin Ramgoolam en tant que Premier ministre, à Réduit, hier. D'où le changement d'heure pour cet exercice. Les invités rodriguais ne pouvaient pas arriver à 13 heures à Réduit.
Un haut cadre de l'OPR nous a déclaré que les deux députés de ce parti soutiendront également le gouvernement. «Cela a été notre ligne de conduite. Nos députés sont des élus et nous avons toujours été du côté du gouvernement du jour. Cependant, tout dépendra de Navin Ramgoolam. Il faudra savoir s'il l'accepte, sinon nous siégerons sur les bancs de l'opposition», déclare-t-il. Or, l'OPR siège dans l'opposition à l'Assemblée régionale de Rodrigues tandis que l'Alliance de Libération est dans le gouvernement régional. Johnson Roussety, le chef commissaire adjoint, déclare que même si l'OPR siège dans le camp du gouvernement au Parlement, cela ne change rien. «Rodrigues aura quatre députés au gouvernement dans ce cas», dit-il.
Dans l'éventualité que les quatre députés de Rodrigues siègent au sein du gouvernement, le Parlement n'aura qu'Adrien Duval et Joe Lesjongard comme députés de l'opposition.
D'après la Constitution, il n'y a aucune mention interdisant aux députés correctifs de soutenir le gouvernement. Il n'y a aucune loi anti-transfuge non plus pour empêcher, à titre d'exemple, Joe Lesjongard et Adrien Duval de rejoindre le gouvernement plus tard au cours de leur mandat.
L'historien Jocelyn Chan Low maintient que ce sera la toute la première fois qu'un Parlement pourrait se retrouver rien qu'avec deux députés dans l'opposition. En 1982, il y avait Gaëtan Duval, Nicol François, Marie-France Roussety et Michael Glover sur les bancs de l'opposition tandis qu'en 1995, Gaëtan Duval était dans l'opposition, tout comme Nicolas Von Mally, Mustapha Beeharry et Alex Nancy.
Ce dernier et Nicolas Von Mally avaient siégé dans l'opposition tandis que Serge Clair et Benoît Jolicoeur, des élus de Rodrigues, étaient au gouvernement. «Une opposition peut fonctionner avec deux députés mais il y aura beaucoup de complications pour le fonctionnement des comités. Par exemple, l'un d'entre eux sera leader de l'opposition et l'autre whip de l'opposition mais il faut aussi présider le Public Accounts Committee et ils doivent siéger sur d'autres comités parlementaires également», explique-t-il.
Cette situation, explique Jocelyn Chan Low, démontre que le système électoral avec son Best Loser system a des limites. «C'est pour cette raison qu'il faudrait une dose de proportionnalité. 26 % de votants ont soutenu l'Alliance Lepep mais ils n'ont eu que deux députés. J'espère que le nouveau gouvernement, qui a la majorité, fera une réforme de notre système électoral», réclame-t-il.