Les bateaux battant pavillon européen ont cessé de pêcher dans les eaux sénégalaises à partir du 10 novembre au soir après le non-renouvellement d'un accord entre Bruxelles et Dakar, en vigueur depuis 2019 et arrivé à expiration, a annoncé l'ambassadeur de l'Union européenne (UE), Jean-Marc Pisani.
"Les bateaux européens cesseront de pêcher dans la zone économique exclusive du Sénégal à partir du 17 novembre à minuit. Ces bateaux européens pourront- ce sera le choix des armateurs- continuer de pêcher ailleurs", a indiqué Jean-Marc Pisani. L'accord n'aurait pas été reconduit en raison de "défaillances" dans la lutte contre la pêche illégale. "Il ne serait pas cohérent pour l'Union européenne, qui a une politique de tolérance zéro à l'égard de la pêche INN (illicite, non déclarée et non réglementée), de renouveler un accord avec des pays qui ont été notifiés de ce type de difficultés", a-t-il poursuivi.
L'arrêt de la pêche dans les eaux sénégalaises concernera dix-huit bateaux espagnols et français. La Commission européenne déplorait de "graves lacunes" et des "défaillances dans les dispositifs de suivi, contrôle et surveillance" pour les navires battant pavillon sénégalais dans les eaux extra-territoriales comme pour les navires étrangers au port de Dakar. Elle rapportait "des exportations illégales du Sénégal vers l'UE".
Concurrence
La pêche est un secteur essentiel au Sénégal, économiquement et culturellement. C'est aussi un secteur en crise. Les localités côtières fournissent une part importante des centaines de migrants clandestins qui tentent chaque mois de rallier l'Europe par l'Atlantique au péril de leur vie à bord de pirogues surchargées et vétustes. La pêche fait vivre environ 600 000 Sénégalais pour une population d'environ 18 millions. 50 000 pêcheurs sénégalais travaillent essentiellement sur des pirogues traditionnelles.
Les pêcheurs dénoncent la concurrence des bateaux usines contrôlés par des étrangers, auxquels ils imputent la raréfaction du poisson. La controverse sur la part de la pêche étrangère dans la crise a été ranimée avec l'élection à la présidence, en mars, de Bassirou Diomaye Faye qui a promis de rétablir une souveraineté qu'il juge bradée dans le domaine de la pêche et d'autres.
« Alors que l'accord permettait de pêcher 10 000 tonnes tous les ans, les bateaux européens n'ont remonté que 10 000 tonnes sur cinq ans », a déclaré l'ambassadeur européen. Des diplomates ont indiqué sous couvert de l'anonymat que les carences sont identifiées et donnent lieu à un dialogue régulier depuis plusieurs années, et que l'arrêt de l'accord n'est pas lié à la situation intérieure sénégalaise. Conclure un éventuel nouvel accord "ne peut pas se faire du jour au lendemain, il y aura un certain nombre d'actions qui devront être mises en oeuvre et qui vont prendre raisonnablement plusieurs mois", a conclu Jean-Marc Pisani.