Ile Maurice: Navin Beekarry démissionne de la Financial Crimes Commission

16 Novembre 2024

La scène politique et institutionnelle de Maurice connaît de nouveaux bouleversements. Hier, la Financial Crimes Commission (FCC) a officiellement annoncé la démission de son directeur général, Navin Beekarry. Dans un communiqué, l'institution a confirmé que Navin Beekarry a remis sa lettre de démission au président de la République. Cette décision intervient à la suite de la victoire de l'Alliance du changement aux élections générales du 10 novembre.

Nommé à la tête de la FCC en mars dernier, Navin Beekarry avait déjà occupé un poste similaire lorsqu'il dirigeait l'ancienne Independent Commission Against Corruption (ICAC), remplacée par la FCC en décembre 2023, dans le cadre d'une réforme controversée. Cependant, depuis l'annonce des résultats des législatives, les appels pour qu'il démissionne se sont intensifiés.

Le jeudi 14 novembre, lors d'une conférence de presse, le Premier ministre, le Dr Navin Ramgoolam, avait publiquement exigé son départ. «Il doit savoir ce qu'il a à faire», a-t-il déclaré, ajoutant que plusieurs autres nominés politiques avaient déjà eu la décence de quitter leurs fonctions. Cette déclaration a marqué un tournant, intensifiant la pression sur Navin Beekarry.

Quelques jours avant cette annonce, le 12 novembre, la FCC avait publié un communiqué pour répondre à des rumeurs circulant dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ces rumeurs accusaient l'institution de procéder à la destruction de documents sensibles après les élections. La FCC avait alors assuré le public que toutes ses archives, tant physiques qu'électroniques, étaient sécurisées et que toute tentative de manipulation était traçable.

Passé controversé

Néanmoins, les critiques envers Navin Beekarry ne datent pas d'hier. Parmi les polémiques notables figure l'affaire Med-Point, qui a marqué son mandat à l'ICAC. En 2019, avant une audience cruciale au Privy Council, la commission, sous sa direction, avait changé de position, s'alignant sur les arguments de Pravind Jugnauth contre le Directeur des poursuites publiques (DPP), Satyajit Boolell. Ce revirement stratégique avait soulevé de sérieuses questions sur l'indépendance de l'institution, notamment parce que l'ICAC avait initialement adopté une position opposée devant la Cour suprême.

De plus, le salaire de Navin Beekarry a fait l'objet de multiples interpellations parlementaires. Ni l'ancien Premier ministre Pravind Jugnauth ni la FCC n'avaient confirmé le montant, alimentant davantage la controverse. Le leader de l'opposition de l'époque, Xavier-Luc Duval, avait martelé que «c'était le Premier ministre qui désignait le directeur général, ainsi que les membres du conseil d'administration de l'ICAC, tout en fixant leur salaire.» Toutefois, le Premier ministre avait refusé de confirmer ou d'infirmer que Navin Beekarry percevait un salaire de Rs 650 000, «soit trois fois celui d'un juge».

La démission de Navin Beekarry intervient également dans un contexte de remise en question profonde de l'efficacité et de l'indépendance de la FCC. Le 14 novembre, le bureau du DPP a publié un communiqué appelant à des réformes légales urgentes pour garantir l'autonomie totale de son institution. Le DPP a dénoncé la Financial Crimes Commission Act, estimant qu'elle contrevient aux articles 1 et 72 de la Constitution, et a demandé son abrogation immédiate.

Le Premier ministre et leader du Parti travailliste, le Dr Navin Ramgoolam et Paul Bérenger, leader du Mouvement militant mauricien, ont également exprimé leur volonté de remplacer la FCC par un Serious Fraud Office, inspiré du modèle britannique, lors de leur sortie durant la campagne électorale. Paul Bérenger a notamment souligné, lors d'un entretien à la radio, que cette nouvelle instance devra fonctionner dans le respect des principes constitutionnels et être dirigée par une personnalité indépendante.

Le départ de Navin Beekarry laisse un vide à la tête de la FCC. Les noms de deux figures juridiques, Me Rajesh Unnuth et Me Sanjay Bhuckory, ont circulé comme potentiels remplaçants. Cependant, contactés, les deux avocats ont fermement démenti ces informations.

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