Lors de la discussion de l'article 32 du projet de loi de finances 2025, les membres des commissions des Finances et du Budget des deux chambres, à savoir la Chambre des Députés et celle des régions et des districts, ont exprimé leurs inquiétudes concernant l'instauration de taux progressifs d'imposition sur les sociétés.
Selon eux, cette mesure compromet le principe de stabilité fiscale, indispensable pour encourager l'investissement, particulièrement dans un contexte marqué par la concurrence accrue des pays voisins pour attirer les investisseurs étrangers.
Lors d'une réunion tenue vendredi dernier avec les cadres du ministère des Finances, les membres des deux commissions ont appelé à abandonner le critère du chiffre d'affaires pour le classement des entreprises. Ils ont jugé ce critère inéquitable, estimant qu'il ne reflète pas la réalité économique des entreprises. En effet, certaines entités affichant un chiffre d'affaires élevé peuvent ne générer que de faibles bénéfices, comme c'est souvent le cas pour les entreprises commerciales.
Ils ont également averti que ce critère pourrait inciter à l'évasion fiscale et pousser les grandes entreprises à se fragmenter en plusieurs entités de moindre taille pour réduire artificiellement leur chiffre d'affaires.
Les représentants du ministère des Finances ont défendu la mesure en expliquant qu'elle vise à instaurer une plus grande équité fiscale entre les entreprises. Le principe repose sur l'imposition progressive, avec des taux majorés pour les entreprises moyennes et grandes réalisant d'importants chiffres d'affaires et bénéfices.
Ils ont souligné que cette réforme s'inspire de systèmes comparés, qui modulent les taux d'imposition en fonction de la taille des entreprises et de leur secteur d'activité. Le chiffre d'affaires est utilisé uniquement comme critère de classification, tandis que l'impôt est appliqué sur les bénéfices nets.
En outre, le taux général de l'impôt sur les sociétés reste fixé à 15 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 5 millions de dinars, ce qui représente 94,5 % des entreprises déclarées. Les autres 5,5 % seront soumises à une augmentation d'impôt, avec des taux variant entre 20 et 40 %, selon leur secteur et leur chiffre d'affaires.
Les représentants du ministère ont rappelé que le taux général d'imposition des sociétés était de 35 % en 2006 avant d'être réduit de 10 points par la loi de finances 2021. L'adoption de cet article a été reportée pour permettre au ministère d'examiner les propositions des commissions.
La discussion s'est poursuivie avec l'examen de l'article 34 portant sur la fiscalité appliquée au lait en poudre et au beurre, ainsi que sur la mise à jour des codes tarifaires de certains produits. Selon les représentants du ministère, l'objectif est d'adapter les avantages fiscaux en ajoutant des taxes pour répondre aux besoins spécifiques de secteurs comme le commerce, l'industrie et la santé.
Cependant, certains députés ont insisté sur l'importance de soutenir davantage les agriculteurs tunisiens et de renforcer la filière laitière locale, estimant que cette démarche aurait un impact plus positif qu'un simple allègement fiscal sur le lait en poudre. L'article a néanmoins été adopté sans modification.
La commission a également examiné l'article 35 relatif à l'unification des compétences territoriales des tribunaux de première instance pour les litiges liés aux décisions d'imposition forcée. L'article 36, concernant l'utilisation des constatations sur le terrain pour évaluer la valeur commerciale des biens immobiliers et actifs dans le cadre des révisions fiscales, a également été débattu.
Les députés ont demandé des éclaircissements sur l'adoption des valeurs ajustées après les révisions fiscales et sur la transmission des résultats aux bureaux compétents. Ces deux articles ont été adoptés sans modification.