Ridha Ben Cheikh, Enit : «La recherche tunisienne est prête à répondre aux défis écologiques et à construire des ponts solides entre les laboratoires et le tissu socioéconomique»
Dans le cadre du projet «Green Impact» (projet Aresse), s'est tenue hier une Journée d'information organisée par l'Agence nationale de promotion de la recherche scientifique (Anrp) et la Direction générale de la recherche scientifique (Dgrs), avec le soutien de l'Union européenne. Une initiative qui a eu le mérite de rassemblé des chercheurs, des acteurs socioéconomiques et des associations pour réfléchir sur les défis environnementaux et proposer des solutions concrètes.
Représentante de l'Association tunisienne de protection de la nature et de l'environnement de Korba (Atpne), et par ailleurs une scientifique, Imen Rabeh, a dressé un tableau sombre mais réaliste des enjeux actuels. «La pollution est omniprésente, et il est urgent d'agir», a-t-elle martelé. Selon elle, le lien entre l'utilisation de pesticides et de perturbateurs endocriniens et l'augmentation de certaines maladies comme les mélanomes et certains types de cancers au Cap Bon ne peut plus être ignoré. La militante a également dénoncé le manque de valorisation des déchets en Tunisie.
Un impact bien réel
Au-delà des chiffres et des constats, la Imen Rabeh a souligné l'impact du changement climatique sur les populations les plus vulnérables, notamment les femmes rurales et les agriculteurs. Là aussi, la souffrance des populations locales ne peut plus être reléguée au second plan.
Comme d'autres scientifiques, Hakim Gabtni, du Centre de Recherche et Technologie des Eaux (Certe) à Borj Cedria, a exposé une réalité alarmante et véritablement urgente, celle de la gestion des ressources en eau. Hakim Gabtni, en bon orateur, a pointé du doigt l'industrie de l'embouteillage, sans la nommer clairement, comme étant un double fléau : celui de la surexploitation des ressources hydriques et de la prolifération des déchets plastiques.
Un discours qui rappelle combien il est urgent de réglementer de manière plus stricte cette industrie maintes fois dénoncée, et de repenser un modèle de consommation plus durable. Malheureusement, en dépit de l'approbation du public présent, le représentant de la Conect, un des représentants du patronat, a seulement fait une apparition éclair dans la salle, alors que beaucoup d'acteurs environnementaux auraient aimé l'interpeller sur un certain nombre de questions.
Au-delà des constats alarmants, la Journée a également été l'occasion de célébrer les progrès réalisés par la recherche scientifique en Tunisie. Des figures éminentes telles que Pr. Ridha Ben Cheikh (Enit), Pr. Mongi Bouaicha (Crten), et Pr Yesser Ben Amor (Cnrsm) ont présenté leurs travaux respectifs et ceux de leurs équipes, mettant en relief des solutions novatrices pour atténuer les effets du changement climatique et réduire la pollution.
«La recherche tunisienne est prête à répondre aux défis écologiques et à construire des ponts solides entre les laboratoires et le tissu socioéconomique», a insisté Pr Ben Cheikh.
Le devoir de sensibiliser davantage
Par ailleurs, dans la salle, la discussion s'est cristallisée autour de l'importance de sensibiliser les jeunes générations aux enjeux environnementaux. Les intervenants ont également insisté sur l'éducation comme moteur du changement, qu'il s'agisse d'intégrer les principes de développement durable dans les programmes scolaires ou d'organiser des visites directement dans les centres de recherche, ou encore d'accentuer la collaboration avec les médias sur les thématiques et les enjeux environnementaux.
Le programme «Green Impact», avec un budget pouvant aller jusqu'à 700.000 dinars par projet, vise à financer des solutions innovantes dans des domaines clés tels que l'économie circulaire, la préservation de la biodiversité ou encore les énergies renouvelables.
Le mécanisme «Green Impact» vise à soutenir des projets collaboratifs innovants et à fort impact dans le domaine de l'environnement et lance d'ailleurs un appel à projets à destination des associations de la société civile.
«Ces projets doivent répondre aux défis environnementaux actuels et futurs et aux exigences du développement durable en proposant des solutions concrètes et durables qui s'inscrivent dans le cadre des priorités nationales de transition écologique» a expliqué Mariem Jaouadi, cheffe du projet Aresse.