Depuis le 15 avril 2023, la capitale du Soudan, Khartoum, est l'épicentre des combats entre les Forces armées soudanaises du général al-Burhan et les paramilitaires des Forces de soutien rapide du général Hemedti. Dix-neuf mois de guerre ont ravagé de larges pans de la ville, menant à l'exode de plus de la moitié de la population estimée, avant-guerre, à près de 8 millions de personnes. Dans la banlieue ouest de Khartoum, à Omdourman, reconquise par l'armée régulière en février dernier, quelques habitants reviennent au compte-gouttes s'installer dans les ruines.
Partout, le sol est jonché de verre brisé, de douilles de mitrailleuses, de brosses à dent, de photos de famille calcinées.
Les services de déminage et une poignée d'habitants comme Mohammed Omar ont débarrassé les maisons des cadavres et des obus non explosés : « Les Forces de soutien rapide étaient disséminées dans le quartier, en position défensive. L'armée avançait rue par rue, ralentie par les snipers, mais aussi parce qu'il avait de nombreux civils dans les maisons. Les paramilitaires les utilisaient comme des boucliers humains. »
« Guidés par la haine »
Si l'armée régulière a repris le quartier, c'est au prix d'immenses destructions, comme en témoigne Tarik : « Il n'y a plus rien à voir. Ma maison est en ruine. À l'intérieur, tout est détruit. Ici, le mur s'est effondré. Là, il n'y a plus de toit. L'armée était postée dans la rue là-bas et les paramilitaires, de l'autre côté. Ils sont tous irresponsables ! Les deux camps... Irresponsables ! Qui est-ce qui meurt finalement ? Hein ? Ce sont les pauvres gens. »
Tarik Abdallah se tient dans une cour lacérée par les obus. Cet ancien commerçant n'a plus d'argent pour vivre ailleurs : « Tous les deux, trois jours, ici, il y a un habitant qui meurt. Et qu'est-ce qui les tue ? Maintenant, c'est la famine. Les gens sont faibles, ils mangent à peine quelques lentilles. Il suffit d'un moustique qui te pique pour que tu meures. Ils auraient pu mettre un terme à cette guerre, il y a longtemps. Aujourd'hui, elle mène à notre perdition. Ils ont perdu la raison, ils sont guidés par la haine. Notre pays est perdu. »
Quelques habitants déblayent les gravats. Mais ici, personne ne reconstruit. La guerre n'est pas finie.