Au Mali, l'ex-ministre de l'Économie Bouaré Fily Sissoko tente d'obtenir sa libération. Le procès fleuve de l'affaire de l'avion présidentiel et des contrats militaires surfacturés a été suspendu le 9 octobre dernier. L'ex-ministre est poursuivie notamment pour « corruption » et « atteinte aux biens publics ». Elle clame son innocence. En détention préventive depuis plus de 3 ans, son énième demande de libération, sous contrôle judiciaire, a une nouvelle fois été rejetée le 13 novembre par la chambre d'accusation de la Cour suprême. Le 25 novembre, son avocat s'est pourvu en cassation auprès de la chambre criminelle de la Cour suprême.
« L'article 135 du code de procédure pénale du Mali dispose que personne ne peut être détenu provisoirement au-delà de 3 ans, pose d'emblée Maître Djanguina Tounkara. Aucunement ! L'article est on ne peut plus clair ! Madame la ministre garde prison depuis le 26 août 2021, soit plus de 3 ans, rappelle l'avocat de Bouaré Fily Sissoko. Rien ne justifie son maintien en détention, si ce n'est des considérations extra-juridiques. Madame la ministre ne représente aucun danger pour l'ordre public, elle n'a jamais cherché à fuir ».
Bien au contraire, depuis son arrestation, Bouaré Fily Sissoko ne cesse de réclamer d'être jugée. En août 2022, elle avait même adressé une lettre ouverte au Président de transition Assimi Goïta, non pour implorer sa clémence mais pour que son procès puisse enfin se tenir. L'ex-ministre assurait vouloir « sortir blanchie de tout soupçon » pour que « [ses] enfants [...] puissent toujours marcher la tête haute » au Mali.
Calendes grecques
« Soit on organise un procès, soit on la libère, s'indigne encore son avocat, maître Tounkara. La détention provisoire, c'est pour accumuler des preuves, pour bâtir une accusation, mais au-delà de 3 ans, après 36 mois de détention, qu'est-ce qu'on va chercher ? Elle a été entendue plusieurs fois, et au cours du procès [qui s'est ouvert en septembre dernier avant d'être suspendu pour une durée indéterminée, NDLR], pendant trois semaines, on a vu que l'accusation pataugeait ! C'est pourquoi ils ont été obligés de renvoyer ce procès aux calendes grecques ! Cette détention provisoire ne se justifie plus ».
Après trois semaines d'audience, les représentants de l'État ont demandé de nouvelles auditions de personnalités politiques ainsi que le versement au dossier de nouveaux documents. L'affaire a été renvoyée pour complément d'informations.
Au total, une dizaine de personnalités - hommes d'affaires, politiques, militaires - pour la plupart hors du Mali sont jugés dans cette vaste affaire de corruption et de détournements de fonds publics, datant de 2014 et portant sur plus de 130 milliards de francs CFA (environ 198 millions d'euros).
C'est dans le cadre de cette procédure que l'ancien Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga avait été incarcéré, avant de mourir en détention en mars 2022. En dépit de son état de santé et des recommandations médicales, les autorités maliennes de transition s'étaient opposées à son évacuation sanitaire.