L'avenir de l'archipel des Chagos continue de diviser et d'alimenter les controverses, tant au niveau national qu'international. Hier, une rencontre entre deux groupes représentant les Chagossiens, BIOT Citizens et le Groupe Réfugiés Chagos, au centre Lisette Talate à Pointe-aux-Sables, a tourné en confrontation animée.
Le groupe BIOT Citizens, fervent défenseur du maintien de l'archipel sous souveraineté britannique et le Groupe Réfugiés Chagos (GRC), dirigé par Olivier Bancoult, s'accusent mutuellement de trahison. Cette scène de division au centre Lisette Talate démontre que la communauté chagossienne elle-même peine à s'unir sur une vision commune. Misley Mandarin, porte-parole de BIOT Citizens, critique vivement Olivier Bancoult, leader du GRC, l'accusant d'agir sans mandat des natifs de l'archipel.
Selon Misley Mandarin,«les natifs des Chagos n'ont jamais donné leur aval à Olivier Bancoult pour négocier en leur nom». De leur côté, les membres du GRC défendent leur leader, affirmant qu'il a été désigné par consensus pour représenter la communauté. «Quand nos ancêtres ont été déracinés des îles Chagos, le gouvernement britannique ne nous a pas emmenés en Angleterre. Nous sommes venus à Maurice. Pourquoi aujourd'hui insister pour que les Chagos restent sous administration britannique ?», a scandé une femme, exprimant la frustration d'une partie des Chagossiens.
La tension était palpable. Des slogans accusateurs ont résonné à l'extérieur du centre, tandis que des échanges houleux reflétaient l'absence d'unité parmi les descendants chagossiens sur l'avenir de l'archipel. Certains manifestants ont également dénoncé l'accord négocié par Maurice et le Royaume-Uni, estimant qu'il exclut les véritables natifs et leurs descendants. Le fait que les Chagossiens ont été tenus à l'écart tout au long des négociations est l'autre point de discorde.
La veille de cette rencontre, lundi, des natifs chagossiens avaient également manifesté devant le haut-commissariat britannique à Floréal pour exprimer leur mécontentement de l'accord en discussions. Olivier Bancoult a été une fois de plus la cible principale de ces manifestations, certains remettant en question son rôle et son implication dans les négociations avec le Royaume-Uni et Maurice. Le leader du GRC a porté plainte au poste de police de Roche-Bois, demandant à ses accusateurs de fournir des preuves concrètes des allégations contre lui.
Réserves sur l'accord de PKJ
Sur le plan diplomatique, le Premier ministre mauricien, Navin Ramgoolam, a rencontré lundi, le conseiller à la sécurité nationale britannique, Jonathan Powell. Cette réunion visait à avancer sur le dossier de la rétrocession des Chagos à Maurice. Selon un article de la BBC, publié sur son site en ligne mardi, Navin Ramgoolam a exprimé des réserves sur l'accord conclu par son prédécesseur avec le Royaume-Uni. Durant cette rencontre lundi, il a informé ses interlocuteurs qu'il souhaitait disposer de plus de temps pour étudier les détails avec ses conseillers juridiques. Il a également souligné son étonnement face à la finalisation des détails de l'accord à peine un mois avant les élections générales et à la veille de la dissolution du Parlement.
Jonathan Powell a assuré que les négociations se poursuivraient et a convenu avec le Premier ministre d'une nouvelle réunion dans deux semaines pour faire le point sur les avancées. Le gouvernement britannique semble, pour sa part, confronté à des défis sur ce dossier. Selon The Guardian, Jonathan Powell doit prochainement se rendre à Washington pour persuader l'administration Trump de ne pas bloquer l'accord. Le président-élu et son équipe auraient exprimé des réticences, envisageant même des solutions alternatives pour repousser ou modifier l'accord tout en sauvant les apparences.
D'autre part, des Chagossiens, frustrés par leur exclusion des négociations, ont lancé une demande de révision judiciaire de l'accord. Cette audience, prévue le 5 décembre, pourrait ralentir le processus et compliquer davantage la situation. L'archipel des Chagos reste au centre d'intérêts divergents. Si certains Chagossiens considèrent que le retour des îles sous souveraineté mauricienne est une étape essentielle pour réparer l'injustice historique, d'autres, comme le groupe BIOT Citizens, jugent que rester sous administration britannique est plus bénéfique pour leur communauté. En Angleterre également, la voix des descendants chagossiens, qui insistent pour être parties prenantes de cet accord, se fait de plus en plus entendre lors de manifestations fréquentes devant la Chambre des Communes.