Cameroun: Un éminent avocat des droits humains passé à tabac au pays

Douala, Cameroun en 2019 (photo d'archives).
communiqué de presse

Le gouvernement devrait garantir qu'une enquête impartiale soit menée et obliger les responsables à rendre des comptes

Le 27 novembre, des gendarmes au Cameroun ont arrêté et violemment battu Richard Tamfu, éminent avocat des droits humains, à Douala, la plus grande ville du pays. Cette attaque vicieuse s'inscrit dans le cadre d'attaques officielles contre des avocats, vraisemblablement destinées à les dissuader de faire leur travail.

Ce jour-là, trois gendarmes sont venus arrêter une cliente de Richard Tamfu dans le quartier de Bonaberi. Il a par la suite déclaré à Human Rights Watch qu'il était là pour aider sa cliente et qu'il avait contesté l'autorité des gendarmes, qui n'avaient pas présenté de mandat d'arrêt. « Ils m'ont alors fait monter à l'arrière de leur camionnette et ont commencé à me battre », a-t-il déclaré. « Ils m'ont donné des coups de pied, ont fortement appuyé leurs mains sur mon cou et m'ont sauté dessus avec leurs bottes. »

Une vidéo de l'incident prise par un passant a été largement diffusée sur les médias sociaux. On y voit deux hommes portant des uniformes de gendarme piétiner Richard Tamfu, qui est allongé à l'arrière de la camionnette, tandis que des personnes dans la foule crient en leur demandant d'arrêter. Richard Tamfu a confirmé l'authenticité de la vidéo.

Les gendarmes l'ont ensuite emmené dans un poste de gendarmerie, et l'ont relâché peu après. Richard Tamfu, qui est actuellement hospitalisé, souffre de graves blessures. Le 29 novembre, il a porté plainte contre le chef de la gendarmerie de la région du Littoral pour « complicité de torture ». La veille, le Secrétaire d'État à la Défense chargé de la Gendarmerie nationale avait annoncé qu'une enquête serait ouverte sur ce passage à tabac.

Les arrestations arbitraires, le harcèlement et les autres formes de violences policières, y compris les agressions verbales et physiques, à l'encontre des avocats sont monnaie courante au Cameroun. En décembre 2023, des policiers ont agressé Atoh Walter M. Tchemi, un éminent avocat des droits humains, à Kumba, dans la région du Sud-Ouest, alors qu'il aidait un client.

En mai 2021, des gendarmes de Yaoundé, la capitale du Cameroun, ont arrêté un autre éminent défenseur des droits, Amungwa Tanyi Nicodemus, sous prétexte de fausses accusations d'incitation au terrorisme parce qu'il possédait des photographies montrant des preuves d'abus dans les régions anglophones du pays. En novembre 2020, les forces de sécurité ont utilisé des gaz lacrymogènes et des balles réelles pour disperser des avocats dans une salle d'audience à Douala. Les avocats manifestaient contre l'arrestation de deux collègues accusés de corruption.

Les autorités camerounaises devraient cesser de s'en prendre aux avocats et veiller à ce que l'enquête promise sur l'attaque contre Richard Tamfu soit crédible, approfondie et impartiale, et à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes.

Ilaria Allegrozzi, Chercheuse senior sur le Sahel

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