Au Mali, se dirige-t-on vers la libération de plusieurs prisonniers politiques ? Onze dirigeants de partis signataires de la Déclaration du 31-Mars pour le retour à l'ordre constitutionnel, arrêtés le 20 juin dernier, sont toujours détenus dans l'attente de leur procès pour « opposition à l'exercice de l'autorité légitime ». Mais une nouvelle initiative politique suscite l'espoir de leurs proches. Quant à l'universitaire Etienne Fakaba Sissoko, en prison depuis le 25 mars et condamné en mai pour « atteinte au crédit de l'État » après avoir dénoncé dans un livre la « propagande » du gouvernement malien de transition, il a comparu lundi 2 décembre devant la Cour d'appel.
Maître Ibrahim Marouf Sacko se dit « confiant » dans le fait que l'enseignant-chercheur « pourra bientôt retrouver sa famille et ses étudiants ». Au cours de l'audience d'hier, selon l'avocat, son client a pu justifier l'emploi dans son livre des termes qui lui sont reprochés comme « propagande », « manipulation » ou « communication agressive ». « Leur utilisation ne constitue pas une infraction, il n'y a ni une injure, ni atteinte au crédit de l'État, ni trouble à l'ordre public », estime l'avocat, qui dénonce depuis le début une procédure visant à faire taire Etienne Fakaba Sissoko et à dissuader toute voix critique du régime.
La défense plaide la relaxe
L'ONG de défense des droits humains Amnesty International considère que la détention d'Etienne Fakaba Sissoko est « arbitraire » et que sa peine doit être « révoquée ».
La défense a plaidé la relaxe pure et simple, et compte pour le moins sur une condamnation à une peine avec sursis ou déjà purgée - Etienne Fakaba Sissoko est en prison depuis plus de huit mois. Le délibéré a été fixé au 16 décembre, dans deux semaines.
Les onze rassemblés à Kenioroba
Dans une autre procédure, l'espoir est aussi permis pour les onze membres de la Déclaration du 31-Mars, arrêtés en juin dernier. En fin de semaine dernière, les onze anciens ministres ou chefs de partis, qui étaient dispersés dans plusieurs prisons à travers le pays, ont été rassemblés à la maison d'arrêt de Kenioroba, à 75 km de Bamako.
Un regroupement organisé pour permettre à l'ancien Premier ministre Ousmane Issoufi Maïga de leur rendre discrètement visite. Réputé proche de la présidence, il avait organisé le Dialogue inter-Maliens voulu par les autorités de transition au printemps dernier et est actuellement chargé de la rédaction d'une nouvelle « charte pour la paix et la réconciliation ».
Initiative d'Ousmane Issoufi Maïga
Ousmane Issoufi Maïga s'est donc entretenu avec les onze détenus. Selon leur entourage, il les a rassurés et leur a demandé de déposer de nouvelles demandes de libération. Toutes les précédentes demandes de libération provisoire, dans l'attente de leur procès à une date qui n'a toujours pas été fixée, ont jusqu'ici été refusées. Les tentatives de médiation initiées par leurs « camarades » politiques auprès du gouvernement de transition, avec l'appui du Haut conseil islamique, n'avaient pas davantage abouti.
Cette fois, les proches des onze cadres politiques détenus espèrent un geste d'apaisement de la part du pouvoir, dans un contexte où la perspective possible de l'organisation d'élections pourrait justifier des mesures de décrispation afin d'obtenir l'adhésion de la classe politique au processus électoral. Mais « tant que ce n'est pas fait, souffle un proche, nous restons prudents ». Sollicité par RFI sur cette initiative, Ousmane Issoufi Maïga n'a pas donné suite.