Le procès de détournement de capitaux au ministère de l'Action humanitaire et de la Solidarité a repris, hier mardi 3 décembre 2024, au Tribunal de grande instance Ouaga I. Les juges ont ordonné au prévenu, Amidou Tiégnan, principal accusé de trouver un autre conseil après que ses avocats se soient déportés. L'audience a été renvoyée, le lundi 9 décembre prochain.
L'audience du mardi 3 décembre 2024 du procès de détournement de capitaux au ministère de l'Action humanitaire et de la Solidarité mettant en cause quatre agents de l'Etat n'a duré que trois heures. Débutée à 9 h 20 minutes, malgré que le principal accusé, Amidou Tiégnan s'est dit apte à être jugé contrairement à l'audience du 29 novembre dernier où il s'était déclaré inapte à comparaitre pour des raisons de santé, l'audience d'hier a été suspendue à 12 heures 30 minutes et renvoyée au lundi 9 décembre prochain.
En effet, les avocats de l'accusé se sont déportés du dossier. Se retrouvant sans défense, M. Tiégnan a plaidé afin que le tribunal lui accorde au moins deux semaines pour trouver un autre conseil. Les juges ont accédé à sa requête, mais lui ont donné jusqu'à la prochaine audience (9 décembre) pour trouver un conseil. Les raisons qui ont conduit les avocats de M. Tiégnan à se déporter sont consécutives à l'exception d'inconstitutionnalité soulevée à l'audience.
Selon eux, l'article 118 de la loi 16 du 03 mai 2016 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au Burkina Faso est contraire à plusieurs dispositions de la Constitution notamment en ses articles 1, 4 et 5. « L'article 1 alinéa 1 de la Constitution dispose que tous les Burkinabè naissent libres et égaux en droit. Cependant, l'article 118 de la loi 16 opère une discrimination car il interdit à mon client le bénéfice du sursis pour des faits de blanchiment de capitaux », a déploré, Geneviève Ouédraogo, l'une des avocats du prévenu. Lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée, a-t-elle relevé, il faut faire recours au Conseil constitutionnel pour statuer sur la question. Pour le parquet, il n'y a pas de discrimination dans la mesure où la disposition de l'article 118 s'applique à tous les citoyens.
Une décision qui divise
Cette position est soutenue par l'Agent judiciaire de l'Etat (AJE), Karfa Gnanou représentant de l'Etat dans le dossier. Cependant, Prosper Farama représentant du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) qui s'est constitué partie civile dans le dossier a soutenu que l'exception d'inconstitutionnalité implique que le juge constitutionnel se prononce sur la question concernée. Dans ce cas d'espèce, il convient d'accéder à la requête de la défense, a-t-il précisé.
Après plus de 30 minutes de suspension, le tribunal a accédé à la requête du conseil de M. Tiégnan de saisir le Conseil constitutionnel, mais a ordonné la poursuite de l'audience sur les quatre chefs d'accusation sur cinq qui pèsent sur le prévenu. Cette décision n'a pas été du « goût » des avocats de la défense qui ont estimé que les 5 infractions reprochées à leur client ne peuvent pas être dissociées. D'où leur déportation du dossier. En rappel, M. Tiegnan né le 5 novembre 1984, conseiller en éducation féminine marié père de quatre enfants est poursuivi pour faux en écriture publique, usage de faux en écriture publique, détournement de deniers publics, enrichissement illicite et de blanchiment de capitaux.
L'intéressé a reconnu à la barre tous les 5 faits qui lui sont reprochés. Ses coaccusés, Salifou Ouédraogo, Philippe Bayoulou et Petroné Tarpaga sont poursuivis, entre autres, pour faux en écriture publique, usage de faux en écriture publique, détournement de deniers publics, enrichissement illicite, complicité de détournement de deniers publics, complicité d'usage de faux en écriture publique, complicité de faux en écriture publique. Les quatre accusés étaient tous présents à la barre à l'audience d'hier 3 décembre.