Telma devient Yas. Telecom Malagasy cesse d'être. Surtout, "Malagasy" disparaît des activités télécoms à Madagascar.
Pourtant, le nom de son pays dans une dénomination n'est pas un gros mot nationaliste. Deutsche Telekom, Deutsche Post, Deutsche Bahn, Deutsche Mark, Lufthansa ; Air France, Électricité de France, La Monnaie de Paris, SNCF, France Télévisions, Radio France, La Française des Jeux ; United States Postal Service, United Airlines, American Airlines ; British Airways, British Broadcasting Corporation...
Nous pleurons tous les jours la disparition du nom "Air Madagascar" surtout qu'il fut associé à tant d'heureux souvenirs de plusieurs générations. Et ce n'est pas anodin que, surtout les petits pays, fassent de leur compagnie aérienne nationale, leur premier ambassadeur à l'international : Singapore Airlines, Vietnam Airlines, Thai Airways, Garuda Indonesia, Malaysia Airlines...
Telma s'engloutissant dans Yas, c'est un peu Madagascar qui renonce à "son" Canal de Mozambique. S'agissant d'une île, comme c'est le cas de Madagascar, l'argument de pan-régionalisme relève de la rhétorique à usage externe. Les adhésions successives à telle ou telle organisation de la région et de la sous-région n'ont pas beaucoup de signification affective dans les thématiques locales.
France Télécom faisait l'acquisition de Orange en 2000, mais en 2013, c'était la société-mère qui adoptait le nom de sa filiale. Treize ans : le temps de l'amortissement affectif par oubli distrait...
Comment avaient réagi les Allemands quand leur Deutsche Mark, devenue première monnaie européenne et symbole du "miracle économique allemand", fut placée dans la corbeille commune de l'Euro ?
De notre côté, avons-nous quelque gloire commune à nous enorgueillir de l'Ariary et du Iraimbilanja ? Ne l'affublons-nous pas du sobriquet péjoratif de "vola baoritra" ? Comment pourtant ne réagirions-nous pas en insulaires si l'Ariary cessait d'être une autre exception culturelle...
Ce mot "Malagasy", dont nous ne sommes pas les inventeurs et qui resta inconnu des premières années de l'administration royale du 19ème siècle, nous avons fini par lui donner un contenu identitaire. On peut encore le sauver, le faire survivre dans le paysage, que celui-ci soit institutionnel ou commercial, en redonnant, par exemple, ses toutes lettres à "Paoma", Paositra Malagasy.
