«J'étais stressé et en colère. Je ne comprenais pas.» Le sentiment de ce téléphoniste à la retraite ayant parcouru une vingtaine de kilomètres pendant le week-end pour faire le plein est partagé par d'autres automobilistes. «Je me suis rendu dans une station-service à Petite-Rivière. Point d'essence. Ensuite, à une autre à Beau-Bassin. C'était pareil. Finalement, j'ai pu remplir le réservoir alors que la jauge était dans le rouge, quelque part près de Rose-Hill», dit-il.
Plusieurs autres automobilistes se sont retrouvés dans la même situation dans d'autres régions du pays, notamment dans l'Est. Une employée d'une société immobilière a même eu la surprise de découvrir qu'une station-service dans la région de Bel-Air était fermée hier lorsqu'elle voulait y aller. L'éventualité d'une baisse des prix des carburants serait l'origine de ce manque d'essence et de diesel. Pour rappel, l'Alliance du changement avait promis une baisse aussitôt arrivée au pouvoir.
La State Trading Corporation a mené une enquête lundi, selon une source proche du dossier, pour connaître l'origine de ce manque de carburants dans des stations-essence de l'île. Un rapport a également été soumis au ministère du Commerce.
D'après notre source, il n'y a aucune pénurie d'essence ni de diesel sur le marché. Un tanker, explique-t-elle, est arrivé à Maurice jeudi et le débarquement a eu lieu durant le week-end. Notre interlocuteur insiste sur le fait que le pays avait déjà une réserve avant même l'arrivée de ce pétrolier. «Les automobilistes ne doivent aucunement paniquer. Nous avons une réserve de carburants de 41 jours. Il y a également un nouveau navire qui arrive dans deux semaines environ», rassure-t-il.
L'éventualité d'une baisse des prix de l'essence et du diesel aurait amené quelques propriétaires à faire un calcul pour ne pas subir de pertes. Toujours selon notre source auprès du ministère du Commerce, ces propriétaires de station-service craignent d'acheter les carburants à un prix élevé pour éventuellement les vendre à un bas prix dans les jours à venir. «Ils font de la spéculation», ajoute notre source.
Cependant, les propriétaires de station-service, regroupés au sein de la Petroleum Retailers Association, eux, nient être à l'origine de ce manque de carburants dans le pays. D'ailleurs, ils étaient en discussion pendant la matinée d'hier pour prendre connaissance de la situation.
Le président de l'association, Bhim Sunnassee, rejette l'idée que ses membres fassent de la spéculation. «Il est faux de dire que des propriétaires refusent d'acheter de l'essence ou du diesel. Ce sont les fournisseurs qui ont un problème de livraison. Ils n'ont pas servi plusieurs de nos membres dans différentes régions. D'ailleurs, j'ai rassuré les propriétaires qu'il n'y a pas de pénurie sur le marché», maintient-il.
Durant la journée d'hier, nous avons tenté d'obtenir une version de Vivo Energy et Total Mauritius, les deux plus grands distributeurs du pays. Leur responsable de communication n'était pas disponible, nous a-t-on fait savoir.
Dans le pire des cas, un consultant en produits pétroliers maintient qu'il y a trois scénarios qui peuvent générer une pénurie de carburants sur le marché. Dans un cas, un pétrolier peut avoir un retard ou le contrat d'approvisionnement n'a pas été renouvelé. Finalement, une grande consommation d'essence et de diesel pourrait épuiser tout le stock disponible dans le pays. Il nous revient que la STC a écarté tout retard ou rupture de contrat. «De toute façon, les petits revendeurs ne feront pas de grosses pertes si jamais l'essence ou le diesel baissent prochainement, mais la situation sera différente pour ceux qui achètent en grande quantité», explique-t-il.