Guinée: Où la disparition est un ART, et l'impunité un pilier du pouvoir

5 Décembre 2024
opinion

Bienvenue en Guinée, ce laboratoire à ciel ouvert où les droits humains sont testés, triturés, puis gentiment jetés à la poubelle. Depuis l'arrivée du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) en septembre 2021, le pays s'est métamorphosé en un étrange mélange de dystopique polaire et de comédie noire.

Chaque jour, un nouveau mystère se joue, avec pour acteurs principaux des journalistes, des activistes ou militants politiques. Ce pays qui, à défaut de figurer dans le palmarès mondial du développement, s'est hissé au rang de champion toutes catégories de brimade.

Cette semaine, c'est au tour de Habib Marouane Camara, l'administrateur général du site Lerevelateur224.com, de jouer les vedettes dans ce drame à suspense. Kidnappé à Lambanyi par des agents de la gendarmerie, il a été conduit vers une destination inconnue, probablement pour une petite séance de « questions-réponses » à la mode guinéenne. On imagine déjà le décor : des hommes en uniforme, des matraques à la main, et un Habib, un brin inquiet, se demandant s'il a bien pris son café ce matin-là. Mais on n'est pas là pour rigoler car l'heure est grave, la situation inquiétante et l'enfer n'est pas loin même si certains jurent la main sur le palpitant avoir vu ici le jardin d'Éden.

La disparition de Habib Marouane Camara n'est pas un cas isolé, mais le reflet d'une pratique institutionnalisée où l'arbitraire règne en maître. Et pendant que le pays sombre dans ce marasme, les autorités continuent de prêcher un discours hypocrite sur l'État de droit, comme si leurs actes ne démentent pas notre vécu de tous les jours.

La scène est désormais familière : des hommes en uniforme, des véhicules banalisés, et un citoyen propulsé malgré lui au rang de figurant dans ce théâtre kafkaïen. Destination inconnue, motif inexistant, et explications aussi absentes que les infrastructures routières du pays.

Les autorités, elles, s'en tiennent à leur script habituel. « Nous enquêtons », affirmer-elles avec le flegme d'un acteur qui joue mal son rôle. Traduction : « Faites-nous confiance, mais ne posez pas de questions. » Pendant ce temps, la population observe, impuissante, cette comédie dramatique où chacun sait qu'il peut être la prochaine cible de ces tontons m'ajoutes à la sauce guinéenne.

Car ici, la loterie des disparitions ne fait pas de distinction. Commerçants, militants, journalistes ou simples citoyens, tout le monde est un potentiel gagnant. Il suffit d'un mot de trop, d'une opinion mal placée, ou simplement d'un mauvais jour pour se retrouver dans les griffes de cette machine répressive, huilée par l'indifférence et alimentée par des esprits inspirés de ceux peuplant la sphère de Lucifer.

Mais ne blâmons pas trop nos chers dirigeants. Après tout, maintenir un climat de terreur, c'est un boulot à temps plein. Entre les discours enflammés sur l'État de droit et les rafles nocturnes et diurnes, faut bien avouer qu'ils maîtrisent l'art du grand écart.

Quant à la population, elle observe cette mascarade avec une résignation teintée d'humour noir. « Qui sera le prochain ? » se demandent-ils, mi-amusés, mi-effrayés. Car en Guinée, personne n'est à l'abri : ni le journaliste opiniâtre, ni le commerçant à succès, ni même le badaud qui aurait eu l'audace de parler trop ou de voir partout.

Alors, chers lecteurs, un conseil : si vous vivez en Guinée, marchez prudemment, parlez doucement et, surtout, évitez d'avoir une opinion. Car ici, le silence n'est pas seulement d'or, il est aussi une question de survie. Quant à Habib Marouane Camara, on espère qu'il retrouvera bientôt la lumière du jour. Mais en attendant, il fait office d'un rappel cruel : gardez votre sourire et vos précautions, car dans ce théâtre de l'absurde, mieux vaut rester spectateur qu'acteur involontaire. Quant à l'impunité, elle trône en maîtresse incontestée.

Quel spectacle funeste !

 

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