Ile Maurice: Compensation salariale - Une attente prolongée

9 Décembre 2024

Alors que le 14e mois, promesse phare des élections, occupe le devant de la scène, les employés s'interrogent sur la compensation salariale. À cette période de l'année, le montant de cette compensation est habituellement déjà fixé. Cependant, les élections et les bouleversements qui s'en sont suivis ont retardé cette annonce. Malgré ce contexte d'incertitude, les syndicats affûtent leurs arguments pour défendre les droits des travailleurs. En attendant l'ouverture des négociations tripartites avec le ministre du Travail, Reza Uteem, celui des Finances, Navin Ramgoolam, et les représentants syndicaux ont déjà leur idée sur la question.

La Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP) a proposé une compensation de Rs 740 pour ceux qui perçoivent le salaire minimum. Reeaz Chuttoo, président de la CTSP, attire également l'attention sur les travailleurs des secteurs non couverts par un Remuneration Order. Dans une lettre adressée au ministre du Travail, il déplore que plus de 100 000 employés, tant du secteur formel qu'informel, n'aient toujours pas bénéficié d'une mise à jour de leur salaire de base. Contrairement aux travailleurs couverts par la législation du secteur privé, incluant les entreprises publiques, ces derniers restent oubliés. Ce retard, explique la CTSP, résulte de l'absence de Remuneration Orders sectoriels spécifiques. Bien que le National Remuneration Board ait déjà reçu les propositions des parties prenantes, ses recommandations, initialement prévues pour le 12 novembre 2024, n'ont toujours pas été présentées. Cette inaction est attribuée à un manque de leadership au sein de l'institution.

Mesures complémentaires requises pour accompagner la compensation

L'absence d'ajustement salarial pour ces travailleurs pourrait entraîner plusieurs conséquences graves. Une hausse des salaires de base aurait un effet immédiat sur les taux horaires et, par ricochet, sur le paiement des heures supplémentaires. De même, les indemnités calculées sur la base du salaire, telles que les primes de présence ou de travail en équipe, seraient directement impactées. Par ailleurs, ces ajustements influenceraient également le calcul du bonus de fin d'année, exacerbant les inégalités salariales existantes.

Reeaz Chuttoo qualifie cette situation de discrimination flagrante et regrette l'absence d'un comité technique tripartite pour discuter des compensations nécessaires face à la perte de pouvoir d'achat. La CTSP souligne que 75 % de la main-d'oeuvre nationale dépend du salaire minimum pour subvenir à ses besoins essentiels, faisant de ce dernier un enjeu crucial de sécurité alimentaire. L'organisation rejette l'argument selon lequel le 14e mois de salaire pourrait compenser l'inflation, dénonçant cette mesure comme un «cadeau électoral» sans impact durable. Pour beaucoup, ce bonus servira uniquement à rembourser des dettes accumulées pour faire face à l'augmentation du coût de la vie.

La CTSP appelle le gouvernement à agir sans délai afin de garantir un ajustement salarial équitable et vital pour préserver la dignité économique des travailleurs. Ashvin Gudday, négociateur syndical de la Private Sector Employees Union, affiliée à la General Workers Federation (GWF), affirme que des réunions sont en cours pour préparer les discussions autour de la compensation salariale. «Nous travaillons actuellement sur des chiffres concrets. L'objectif est d'éviter de proposer un quantum approximatif», précise-t-il. Un mémorandum est en préparation, comme chaque année, pour appuyer ces revendications.

Il ajoute qu'un comité technique se réunira prochainement pour approfondir ces questions, suivi d'une rencontre tripartite. «Nous comprenons que le ministre, nouvellement en poste, prend le temps de se familiariser avec les dossiers.» Bien que cette année, Ashok Subron, pilier de la GWF, ne soit pas présent pour défendre les intérêts des travailleurs, le corps syndical reste mobilisé. «Ashok était notre mentor. Nous avons beaucoup appris de son approche méthodique et consultative. Nous poursuivons son travail avec la même rigueur», assure Ashvin Gudday. La GWF réitère son engagement à représenter les travailleurs avec intégrité, respect et transparence.

De son côté, Radhakrishna Sadien, président de la Government Services Employees Association (GSEA), souligne que la compensation salariale doit être appuyée par des mesures concrètes pour protéger le pouvoir d'achat. «Il est impératif d'éviter que les prix ne flambent immédiatement après le versement de la compensation. Des actions musclées sont nécessaires, notamment une réduction des prix de l'essence et une révision de la TVA, comme annoncé par le gouvernement. Cela devrait avoir un impact positif sur le coût de la vie.» Il propose également la mise en place d'une loi visant à sanctionner les commerçants malhonnêtes et suggère la création d'une unité dédiée à la surveillance de la qualité des produits sur le marché. «Il est temps que le département deLegal Metrology intensifie ses contrôles pour s'assurer que les balances utilisées soient correctement ajustées.»*

Concernant le montant de la compensation, aucune somme n'a encore été avancée. «Tout dépendra du rapport sur le coût de la vie publié par le Bureau des statistiques. Cependant, il est crucial que la compensation soit fixe et qu'elle tienne compte des travailleurs les moins rémunérés ainsi que de la classe moyenne.» Le président de la GSEA souligne également l'urgence de régler les inégalités salariales au sein du secteur public et privé. «Il n'est pas normal qu'un nouvel employé perçoive le même salaire qu'un collègue avec plusieurs années d'expérience. Cette question est une priorité pour notre association.»

Enfin, le Premier ministre et ministre des Finances, Navin Ramgoolam, a déclaré que l'état des lieux de l'économie était en cours, ce qui retardait les discussions sur la compensation salariale et le 14e mois. Il a toutefois assuré que des éclaircissements seraient prochainement apportés sur la situation économique.

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