Un panneau sens interdit attend l'automobiliste au bas de la ville d'Ankazobe, en arrivant depuis Mahajanga. Après 500 km d'une route nationale éprouvante, une contrariété incompréhensible. Parce que ledit panneau impose de faire un détour par le centre-ville d'Ankazobe.
Si on n'a rien à y faire (ravitaillement en carburant, snacks et rafraîchissements, toilettes), pourquoi y entrer. Si encore on avait pensé à préserver l'ancienne maison de commandement de Lyautey, futur Maréchal de France, en ces lieux, pour en faire un haut-lieu de tourisme historique et culturel. Ankazobe, tristement célèbre pour les feux de brousse dont les preuves accablantes s'étalent à perte de vue, de part et d'autre de la RN4, n'exhibe pas, par contre, un artisanat local particulièrement édifiant. Si certaines adresses avaient pu naguère en faire une destination de weekend, ce ne sont pas les gargotes actuelles qui prétendraient offrir quelque chose en rapport, même lointain, avec une certaine idée de la gastronomie.
Comme ces nombreux petits hameaux que traverse, au propre bien plus qu'au figuré, la Route Nationale, Ankazobe, pourtant chef-lieu, se campagnardise en confondant la rue principale avec une sorte de fourre-tout : étals hirsutes, foule paresseuse, stationnement un peu au hasard de tout ce qui peut correspondre à un outil de locomotion.
Un peu plus loin, vers Antananarivo, Mahitsy devient la caricature de cette confusion dans l'organisation de l'espace. Une unique rue, principale par défaut, constamment encombrée d'une foule venue passer en revue les petites guérites d'un commerce plus ou moins informel. Ou simplement regarder le spectacle immuable d'une charrette à bras se faufilant entre deux camions bloqués par la manoeuvre des taxi-brousse. Depuis peu, ce tableau s'est enrichi de la modernité toute aussi envahissante, mais en plus pétaradante, de la faune de bajaj.
Dire qu'à Andranovelona, un meeting politique se tenait avec la Route Nationale séparant la maigre foule et la poignée de bonimenteurs. Certainement qu'aucun programme n'avait pensé aborder la création d'une place de marché ailleurs que le long de la Route Nationale. Ou de l'option abandonnant l'actuel tracé aux marchands pour créer une voie de contournement dont on ferait une Route Nationale sans flèche directionnelle obligatoire vers des embouteillages dont le voyageur se passerait volontiers quand il a à faire douze heures de route.