À la suite de l'intervention de Navin Ramgoolam, à l'Assemblée nationale, mardi, sur la santé monétaire et financière du pays, on en sait un peu plus sur le sort de la roupie sur le forex où la monnaie mauricienne laisse des plumes, surtout face au dollar américain. Elle peine à trouver une posture lui permettant d'empêcher une érosion de sa valeur face à la monnaie américaine.
Les raisons avancées par le Premier ministre pour expliquer cette chute presque permanente sont :
· La politique monétaire adoptée par la Banque de Maurice depuis quelques années qui n'a pas été conçue de manière à tenir compte des facteurs macroéconomiques fondamentaux et la tendance du taux d'intérêt d'autres pays, en particulier les États-Unis ;
· La stratégie du Monetary Policy Committee chargé de décider du taux directeur d'imposer un taux significatif élevé sur les actifs financiers libellés en dollars américains, comparativement au taux portant sur les actifs dont la valeur est affichée en roupies ;
· La décision de la Banque centrale d'avoir recours à la planche à billets pour financer les projets d'aide aux entreprises en difficulté avec la pandémie Covid-19. Une initiative porteuse de deux risques désastreux pour le système monétaire local. Il s'agit de la détérioration d'une situation où le marché est déjà inondé d'un excédent de monnaie mauricienne. Il faut par conséquent plus de roupies pour s'offrir un produit dont la valeur n'a pas changé. Et lorsque, pour une raison ou une autre, un produit doit se vendre plus cher, la monnaie mauricienne se trouve en face d'une série de vagues de perte de valeur.
Les conséquences d'une telle approche de la Banque de Maurice se situent à trois niveaux.
Entre décembre 2014 et fin novembre 2024, la dépréciation de la roupie vis-à-vis du dollar américain s'est affichée à 46 %. Autrement, il a toujours fallu débourser plus de roupies pour s'offrir un dollar. Exemple entre le 4 octobre et le 10 décembre 2024, la valeur d'un dollar n'est jamais passée sous la barre des Rs 46. Ensuite, la moyenne de la tendance dépréciatrice de la roupie vis-à-vis du dollar américain entre 2020 et 2024, soit en l'espace de quatre ans, est de 5,3 %.
Un chiffre bien supérieur à la moyenne historique annuelle que le pays a connue jusqu'ici et qui s'est située au niveau de 2 %. Finalement, la conséquence directe de la faiblesse en continu de la roupie face au dollar américain se ressent à la sortie des caisses des supermarchés. Le consommateur est surpris de constater que le montant consacré généralement au financement de ses besoins de base rapporte moins de produits à la maison.
Les changements qui s'imposent sont notamment :
· la révision complète de la politique monétaire adoptée par la Banque centrale, l'organisme régulateur des activités des acteurs du secteur bancaire ;
· la nécessité de consolider davantage les assises du nouveau cadre de politique monétaire que la Banque centrale vient de mettre sur pied de manière à faire état de sa prédisposition à rechercher la possibilité d'alignement des taux d'intérêt interbancaires ;
· la refonte de la Mauritius Investment Corporation à la lumière des observations rigoureuses auxquelles elle est soumise en ce moment.
Cependant, le Premier ministre n'a pas a évoqué un facteur qui a, sans doute, sa contribution dans la dépréciation de la roupie mauricienne, à savoir le risque que les dollars que l'exportation tant de produits que de services «Made in Mauritius» auraient dû ramener au pays ne traversent pas tous les frontières mauriciennes ou encore ne quittent pas la trésorerie de certains opérateurs pour s'afficher sur le forex local et qui le font plus pour se protéger contre une roupie que le dollar tourne presque en ridicule que pour d'autres motivations.