«Le scrutin s'est déroulé dans des conditions satisfaisantes (malgré) quelques défaillances liées à l'organisation des opérations de vote (et que) pour ce qui a pu être observé, il a été sincère et transparent». C'est, chaque fois, peu ou prou, le communiqué censé clôturer le processus électoral.
Les «conditions satisfaisantes» en question ne furent pas et ne seront jamais tout à fait parfaites. Mais, on a décidé de s'en satisfaire. Tolérance pour des conditions du tiers-monde, circonstances atténuantes pour une démocratie toujours balbutiante, quitus pour «peut mieux faire».
J'imagine la diaspora malgache, attendant anxieusement, moins les résultats que les «conditions satisfaisantes» qui ne fassent pas trop honte au pays. «Conditions satisfaisantes» qui évitent les questions embarrassantes des collègues au bureau. L'illusion d'une «exception culturelle», sans la violence symptomatique que nous autres insulaires supposons à ces pays outre-mer, de l'autre côté du Canal du Mozambique dont on se demande pourquoi il ne s'appelle pas «Canal de Madagascar». Et tant pis pour la démocratie, la vraie, tant que l'honneur, cet honneur-là, est sauf.
Réelle ou fantasmée, la crainte sourde d'un dérapage non contrôlé. L'à-peu-près pour conjurer le pire. Une résignation qui est déjà soulagement. Liste électorale lacunaire, dépouillement archaïque, proclamation après prolongations. Les mêmes revendications de «modernité» reviennent à chaque scrutin, mais elles relèvent finalement de l'incantation rituélique, un élément de langage qu'il est rassurant d'entendre, de faire entendre.
La démocratie américaine, les démocraties européennes, les démocraties scandinaves, la démocratie israélienne, la démocratie indienne... Ces démocraties que ne doivent pas cautionner des «observateurs internationaux». Des listes électorales sans fantômes, un vote électronique sans encre indélébile, des résultats exhaustifs sitôt le dernier bureau de vote fermé. Éléments de langage du jour d'après.