Le rendez-vous était attendu de longue date dans le cadre du processus qui vise à mettre un terme au conflit entre les forces armées congolaises et le mouvement rebelle M23, soutenu par Kigali, dans l'est de la RDC. Ce dimanche 15 décembre, Paul Kagame et Félix Tshisekedi, les présidents rwandais et congolais, doivent se retrouver pour un sommet tripartite à Luanda, sous l'égide du médiateur angolais, le président João Lourenço.
C'est une rencontre décisive dont l'objectif affiché est la signature d'un accord de paix. Ce dimanche 15 décembre, Félix Tshisekedi, le président congolais, doit retrouver son homologue rwandais, Paul Kagame, à Luanda, pour un sommet tripartite sous l'égide du médiateur du conflit qui mine l'est de la RDC depuis trois ans, le président angolais João Lourenço.
L'événement, qui intervient après la négociation d'un cessez le feu au mois d'août puis la mise en place, le mois dernier, d'un mécanisme de suivi de la crise sécuritaire dans la région et l'adoption d'un document opérationnel pour en sortir, est considéré, à Kinshasa, comme « l'aboutissement d'un processus de discussion commencé en juillet 2022 », selon les termes employés par le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya. En clair côté congolais : on n'entend pas se satisfaire d'une simple poignée de main en Angola où l'enjeu du sommet de ce dimanche est d'abord et avant tout la signature d'un accord en vue de ramener la paix au Kivu.
Chaque camp continue de réclamer des engagements
Reste que dans cette perspective, tous les obstacles entre les deux parties ne sont pas levés, loin s'en faut. Chaque camp continue d'abord de réclamer à l'autre des engagements : retrait des militaires rwandais et retour des populations déplacées du coté de la RDC notamment, ouverture d'un dialogue direct entre le M23 et Kinshasa - qui s'y est toujours refusé jusqu'à présent - et neutralisation des FDLR composés, à l'origine, d'ex-génocidaires hutus, du côté du Rwanda.
Des exigences auxquelles s'ajoutent en outre des propos du président congolais qui ont de nouveau crispé les relations avec Kigali, il y a seulement quelques jours, lorsque Félix Tshisekedi a dénoncé, le 11 décembre dernier, une stratégie de « repeuplement » des territoires de l'est de la RDC par le Rwanda. Après avoir immédiatement démenti un tel projet, le ministre rwandais des Affaires étrangères n'avait effectivement pas manqué de souligner le caractère irresponsable d'une telle déclaration susceptible d'alimenter, selon lui, « la xénophobie contre les Tutsis congolais ».
La ministre congolaise des Affaires étrangères, elle, a été clair : « Si nous signons, nous prenons à témoin la communauté internationale et tous les acteurs qui ont plaidé pour une résolution pacifique et diplomatique du conflit », a déclaré Thérèse Wagner à nos confrères de Voice of America.
Les experts s'attendent à un accord a minima
Et les Congolais, eux, qu'attendent-ils et comment voient-ils la rencontre au sommet de ce dimanche ? « Nous sommes tous en train d'observer ce qui se passe à Luanda, confie par exemple Sam Mwezezo, le porte-parole du mouvement politique Générations-nations qui organise en ce moment un forum des jeunes de la diaspora congolaise à Nairobi, au Kenya. Et comme je suis, moi aussi, originaire de l'est [de la RDC], plus précisément de Bukavu, j'ai été témoin des atrocités de ces guerres qui se succèdent dans la région [...]. Nous espérons un accord de paix pour qu'il n'y ait plus de sang, qu'il n'y ait plus de femmes violées ni d'enfants orphelins. Trop c'est trop, on en a marre ! », ajoute celui-ci.
« Il s'agit d'un évènement majeur : tout va dépendre de la franchise avec laquelle [Félix Tshisekedi et Paul Kagame] vont se parler, réagit pour sa part l'analyste politique Amory Lumumba, qui participe lui aussi au forum de Nairobi. L'avantage des conversations à huis clos, c'est que chacun est moins dans la posture, en train de parler à son électorat ou à ses bailleurs. Ce que l'on espère à l'occasion de cette conversation, c'est que l'un et l'autre se parlent franchement », reprend-t-il. Mais les experts, eux, s'attendent à un accord a minima. « Je suis sceptique, confie ainsi Jason Stearn, qui dirige le groupe d'étude sur le Congo rattaché à l'Université de New York. Sans pression internationale, le document [de Luanda] risque de rester assez vague », anticipe-t-il.