Au Ghana, la Cour suprême a donné son feu vert à la promulgation de la proposition de loi dite anti LGBTQ. La plus haute juridiction du pays a rejeté les deux recours contestant la constitutionnalité du texte adopté fin février au Parlement, qui prévoit notamment des peines de prisons allant de 3 à 10 ans pour toute personne identifiée comme membre ou « faisant la promotion » de la communauté LGBTQ. Quelle réaction au sein des militants des droits humains au lendemain de ce rejet ?
L'annonce du rejet par la Cour suprême du Ghana des deux recours -- qui empêchaient jusqu'alors le texte de devenir loi - a provoqué, selon le militant ghanéen des droits LGBTQ, Ebenezer Peegah, un sentiment d'effroi au sein de la communauté. « Pour les personnes qui déjà détestent la communauté, ce jugement va les motiver davantage à faire du mal aux personnes queer et à la communauté dans son ensemble, qui vit déjà dans la peur ».
Un climat de haine, déjà exacerbée selon le militant, par la campagne présidentielle qui s'est achevée samedi 7 décembre.
Pour Abena Takyiwaa Manuh, membre du Centre ghanéen pour le développement démocratique, les juges n'y ont pas été indifférents. « On sait que la décision a été unanime et que ce sont des juges très respectés, mais on sait aussi que c'est un enjeu qui a beaucoup agité l'opinion publique. Il y a eu énormément de pression sur la cour, accompagnées de toutes sortes de menaces. »
Un rejet fondé sur une question de procédure
C'est à l'unanimité que le panel de sept juges réunis ce mercredi à la Cour suprême a rejeté les deux recours déposés à l'encontre de la proposition de loi dite anti-LGBTQ. Un rejet non pas sur le fond, mais sur la procédure : selon les magistrats, les plaintes déposées concernent une législation qui n'a pas encore été promulgué par le président, rendant ces recours juridiquement « prématurés ».
Prochaine étape donc : le dépôt du texte sur le bureau de Nana Akufo Addo, qui devra dire s'il approuve la loi ou au contraire y appose son veto. Pour rappel, le président sortant avait déclaré dès le dépôt des recours, en mars 2024, ne pas souhaiter se prononcer sur la loi tant que celle-ci était contestée à la Cour suprême. Ses opposants politiques l'avaient alors accusé de se défaire de ses responsabilités, par crainte notamment de perdre des aides financières de la Banque mondiale.
Abena Takyiwaa Manuh et Ebenezer Peegah en appellent maintenant au président sortant, Nana Akufo Addo, pour que celui-ci ne signe pas la loi, lui rappelant notamment ses engagements pris à l'égard des droits humains.
Du côté des avocats des plaignants, on dit envisager une demande de réexamen du jugement rendu ce mercredi. Une requête qui, selon l'un des avocats interviewés par RFI, a cependant peu de chance d'aboutir au vu du consensus exprimé par les juges.