Gabon: Le couvre-feu au pays, entre sécurité et frustration

19 Décembre 2024

Depuis le coup d'État militaire du 30 août 2023 qui a renversé le président Ali Bongo Ondimba le Gabon vit sous un couvre-feu instauré par les autorités de transition.

Présenté comme une mesure essentielle pour garantir la sécurité publique, ce couvre-feu suscite néanmoins des débats et des interrogations dans la société gabonaise. Entre avantages et inconvénients, il est intéressant de comprendre pourquoi cette restriction est maintenue et quelles en sont les implications.

Les avantages du couvre-feu

Le principal argument des autorités pour maintenir le couvre-feu est d'assurer la stabilité et la sécurité dans un contexte post-coup d'État. En limitant les déplacements nocturnes, cette mesure vise à prévenir d'éventuelles tentatives de déstabilisation, comme des actes de sabotage, des troubles à l'ordre public ou des actions de groupes contestataires. Cela permet également aux forces de sécurité de mieux contrôler la situation dans les grandes villes comme Libreville et Port-Gentil.

De plus, le couvre-feu peut avoir des bénéfices indirects sur la criminalité urbaine. Les zones sensibles, souvent le théâtre d'agressions et de cambriolages pendant la nuit, connaissent une réduction notable des incidents. Certains Gabonais y voient un moyen de renforcer un sentiment de sécurité, même si cela reste relatif.

Les inconvénients du couvre-feu

Cependant, cette mesure n'est pas sans conséquences négatives. Sur le plan économique, le couvre-feu affecte lourdement les activités nocturnes, notamment dans les secteurs de la restauration, des loisirs et des transports. Les petits commerçants, taxis et vendeurs de rue, qui tirent souvent leurs revenus des activités de fin de journée, voient leur chiffre d'affaires drastiquement réduit.

Sur le plan social, le couvre-feu limite les libertés individuelles et alimente une certaine frustration au sein de la population. Nombreux sont ceux qui dénoncent une mesure disproportionnée, surtout dans les régions où les tensions politiques sont faibles. Pour les jeunes, privés de leurs sorties habituelles, ou pour les familles, contraintes d'adapter leur rythme de vie, le sentiment d'étouffement se fait sentir.

Enfin, certains critiquent le couvre-feu pour son effet psychologique : il peut renforcer une atmosphère de peur et d'incertitude, rendant plus difficile le retour à une vie normale après les bouleversements politiques.

Pourquoi les autorités maintiennent-elles le couvre-feu ?

Le maintien du couvre-feu s'inscrit dans une logique de contrôle et de prévention. Les nouvelles autorités militaires cherchent à consolider leur pouvoir en minimisant les risques d'opposition ou d'insurrections, tout en envoyant un message de fermeté. Cette mesure offre également un outil pratique pour surveiller les mouvements de population et détecter d'éventuelles menaces, surtout dans les premières phases de transition.

En outre, le couvre-feu a une dimension symbolique : il montre que la situation est toujours sous surveillance et que la normalisation prendra du temps. Les autorités cherchent ainsi à éviter tout relâchement prématuré qui pourrait compromettre les avancées réalisées depuis la prise de pouvoir.

Une question d'équilibre

Le couvre-feu au Gabon est à la fois une mesure de protection et un frein à la liberté. S'il permet de garantir un minimum de sécurité dans une période instable, il pénalise également les citoyens et l'économie du pays. À mesure que la transition politique avance, il est crucial que les autorités réévaluent régulièrement cette mesure, en pesant ses bienfaits face à ses impacts négatifs. Une levée progressive du couvre-feu pourrait contribuer à apaiser les tensions et redonner confiance à une population qui aspire avant tout à la paix et à la stabilité.

En attendant, le couvre-feu reste une illustration frappante des sacrifices imposés par une transition politique dans un contexte post-crise.

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