Au moins 782 civils ont été tués et 1.143 blessés au cours des sept mois de siège par les forces paramilitaires de soutien rapide de la ville d'El Fasher, capitale de l'État soudanais du Darfour-Nord, a indiqué vendredi le Bureau des droits de l'homme de l'ONU.
Les combats incessants et la poursuite du siège d'El Fasher, capitale de l'État du Darfour Nord au Soudan, dévastent chaque jour des vies à grande échelle, a fustigé le chef des droits de l'homme de l'ONU, soulignant que les attaques contre les civils et les biens de caractère civil peuvent constituer des crimes de guerre.
Selon le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme (HCDH), des milliers de civils sont assiégés, sans garantie de pouvoir quitter la ville en toute sécurité, et risquent d'être tués ou blessés par les attaques aveugles de toutes les parties au conflit.
« Cette situation alarmante ne peut plus durer. Les forces d'appui rapide (RSF) doivent mettre fin à cet horrible siège. Et j'exhorte toutes les parties au conflit à cesser les attaques contre les civils et les biens de caractère civil. Je leur demande de respecter leurs obligations et leurs engagements en vertu du droit international », a déclaré Volker Türk.
Des bombardements intenses sur des zones résidentielles densément peuplées
Depuis le début du siège, il y a sept mois, El Fasher est devenu un champ de bataille entre la RSF et les forces armées soudanaises (SAF), soutenues par leurs forces conjointes alliées - composées du Mouvement de libération du Soudan/Minni Minawi, du Mouvement pour la justice et l'égalité/Jibril Ibrahim, et d'autres groupes armés plus petits.
Le rapport du Bureau des droits de l'homme de l'ONU constate que les parties ont utilisé des armes explosives dans des zones peuplées d'une manière qui soulève de sérieuses inquiétudes quant au respect du principe de précaution des attaques sans discrimination.
Le document, basé sur des entretiens menés en octobre et novembre avec 52 personnes qui ont réussi à fuir El Fasher, et corroboré par de multiples sources indépendantes, indique qu'il y a eu des bombardements réguliers et intenses par les forces de sécurité républicaines sur des zones résidentielles densément peuplées, des frappes aériennes récurrentes par les forces armées soudanaises, et des tirs d'artillerie par les forces armées soudanaises et leurs alliés des forces conjointes.
Les infrastructures sanitaires ciblées
Selon le rapport, lors d'une escalade majeure des combats en juin, les parties se sont engagées dans des échanges de tirs nourris dans des zones civiles, tuant des dizaines de civils. Elles ont également utilisé des maisons à des fins militaires et ont attaqué et pillé des marchés.
Dans le quartier d'Al-Thawra Janoub, « les habitants n'ont pas pu ramasser les corps de ceux qui sont morts dans les rues pendant des jours, en raison des bombardements continus et des échanges de tirs nourris ».
La maternité Al-Saudi, qui est actuellement le seul hôpital public d'El Fasher capable de fournir des opérations chirurgicales et des services de santé sexuelle et reproductive, a été bombardée à plusieurs reprises par la RSF, indique le rapport.
Ces bombardements interviennent à un moment où les prestataires de services ont signalé une augmentation des cas de violence sexuelle depuis le début du siège, comme l'indique le rapport. Un autre établissement de santé, le centre médical de Tumbasi, a été bombardé par les forces de sécurité en août, faisant 23 morts et 60 blessés.
Une mobilisation accrue des combattants indique que les hostilités pourraient être en cours
Le rapport fait également état d'attaques répétées des forces armées soudanaises contre les camps de personnes déplacées, en particulier ceux de Zamzam et d'Abu Shouk.
Le camp de déplacés de Zamzam a vu une présence accrue des forces conjointes alliées aux Forces armées soudanaises et a été bombardé à six reprises par les Forces de sécurité soudanaises, ce qui aurait causé la mort d'au moins 15 personnes déplacées. Cette situation, associée à des rapports faisant état d'une mobilisation accrue des combattants par les parties au conflit le long des lignes tribales à travers le Darfour, indique que des préparatifs en vue de nouvelles hostilités pourraient être en cours.
Tous les efforts doivent être déployés, y compris par la communauté internationale, pour empêcher une telle attaque et mettre fin au siège », a insisté M. Türk, qui a également appelé toutes les parties au conflit à s'engager de bonne foi dans des efforts de médiation, en vue d'une cessation immédiate des hostilités.
Trois membres du personnel du PAM tués dans un bombardement aérien
Le Programme alimentaire mondial de l'ONU (PAM) s'est indigné par la mort de trois de ses employés lors d'un bombardement aérien au Soudan, le jeudi 19 décembre 2024.
« Un bureau du PAM a été touché pendant l'attaque », a souligné l'agence onusienne.
« Le PAM est bouleversé par la mort tragique de trois de ses collègues au Soudan, qui menaient des tâches vitales en première ligne de l'une des plus graves crises de la faim au monde. Toute perte de vie dans le cadre d'un service humanitaire est inadmissible », a fustigé le PAM sur son compte X.
« Les humanitaires ne sont pas, et ne doivent jamais être, une cible », a rappelé l'agence affirmant sa solidarité auprès « de nos collègues, de leurs familles et de toute l'équipe du PAM en cette période de deuil ».
Des doléances et condamnations amplifiée vendredi par le Secrétaire général de l'ONU qui, dans une déclaration, a loué le personnel humanitaire qui « malgré les menaces importantes qui pèsent sur leur sécurité personnelle continuent à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour apporter une aide vitale partout où elle est nécessaire ».
Antonio Guterres a renouvelé son appel aux parties « à respecter leurs obligations de protéger les civils, y compris le personnel humanitaire, ainsi que les locaux et les fournitures humanitaires ».
« Les attaques ne doivent pas être dirigées contre eux et toutes les précautions possibles doivent être prises pour éviter de les blesser », a rappelé M. Guterres.
Le chef de l'ONU a souligné « une fois de plus » la nécessité d'un cessez-le-feu immédiat.
« Les Nations Unies continueront à soutenir les efforts de médiation internationale et à travailler avec toutes les parties prenantes concernées pour aider à mettre fin à la guerre ».
Plus de 80.000 personnes ont cherché refuge au Soudan du Sud en moins de trois semaines
Après plus de 20 mois, la guerre au Soudan ne montre aucun signe de ralentissement et continue en fait à s'intensifier.
En moins de trois semaines, plus de 80 000 personnes ont cherché refuge au Soudan du Sud à la suite de l'escalade des combats dans les États soudanais du Nil blanc, du Sennar et du Nil bleu - un nombre qui a plus que triplé par rapport aux semaines précédentes.
Selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), la majorité sont des femmes et des enfants ayant des besoins humanitaires critiques, arrivant principalement par des points de passage frontaliers éloignés et difficiles d'accès et s'installant dans de petits villages frontaliers.
A noter que près d'un million de personnes sont arrivées au Soudan du Sud depuis le début du conflit en avril 2023.
« Les personnes fuyant la dernière vague de violence au Soudan ne sont pas seulement des Soudanais, mais aussi des réfugiés sud-soudanais qui vivaient auparavant dans l'État du Nil blanc, où la sécurité était relativement bonne depuis le début du conflit », a précisé Marie-Helene Verney, Représentante du HCR au Soudan du Sud.
Les réfugiés et les sud-soudanais qui reviennent sont hébergés dans des abris de fortune, certains sous des arbres. Malgré les services et ressources limités disponibles dans ces zones frontalières, beaucoup sont réticents à aller de l'avant, espérant que la situation sécuritaire s'améliorera au Soudan, ce qui leur permettra de rentrer rapidement chez eux.
Des centres de transit submergés
Les deux centres de transit existants à Renk accueillent actuellement près de 17.000 personnes, soit quatre fois leur capacité prévue. L'hôpital du comté de Renk est apparemment submergé par l'arrivée de centaines de blessés au cours des dernières semaines.
Les villages isolés où sont arrivés les réfugiés ont, dans certains cas, doublé ou même triplé leur population. Par exemple, les villages de Gerbana et Dukuduku, qui accueillent des réfugiés pour la première fois depuis le début du conflit, avaient une population combinée de 6.000 il y a quelques semaines seulement et en accueillent maintenant 15.000 nouveaux arrivants, bien au-delà des ressources et de la capacité d'infrastructure des villages.
Les évaluations initiales à Joda, le principal poste frontalier entre le Soudan et le Sud-Soudan, montrent un manque d'eau potable et de latrines et d'installations sanitaires, ce qui représente un risque réel de propagation du choléra et d'autres maladies mortelles.
Les établissements de santé locaux sont limités, surchargés ou inefficaces. Alors que les réserves alimentaires sont très faibles, des taux de malnutrition dépassant le seuil d'urgence.
Le manque de financement menace les efforts déployés pour faire face à cette nouvelle situation d'urgence. Le HCR, avec 48 partenaires, aura besoin de 468 millions de dollars en 2025 pour soutenir les réfugiés et les communautés d'accueil.