Ile Maurice: «Nous avons enregistré 187 plaintes pour violations des droits humains en 2024, la plupart étant des violences domestiques»

22 Décembre 2024

Le militant des droits humains, directeur national d'organisations, telles que «Youth For Human Rights International» et «Citizens' Commission on Human Rights», a décroché le prix de «Most Impactful Man» lors des «Men of the Year Awards 2024», organisés par «Train 2 Gain» sous l'égide du ministère des Affaires étrangères.

Vous avez milité en faveur des squatteurs à Coteau-Raffin. Où en sommes-nous à ce jour ?

Si après une longue période, les squatteurs ont pu être alloué des terrains, il y a toujours un énorme problème d'accès à l'eau et l'électricité. Au total, 126 familles sont concernées et nous les défendons depuis longtemps, mais seules six d'entre elles ont pu obtenir l'accès aux utilités de base. Nous avons sollicité des rencontres et la collaboration d'Alan Ganoo et Sandra Mayotte (NdlR: anciens députés de la circonscription n° 14), qui ont fait des promesses aux gens, mais rien n'a été fait et ils n'ont jamais donné suite à nos demandes. Nous relançons les efforts afin d'aborder la question avec le nouveau gouvernement dans les plus brefs délais. Cette région est aussi inondable et en période de pluie, l'eau jaillit de la montagne vers la mer, provoquant des inondations. Les projets relatifs aux drains à Coteau-Raffin n'ont pas été réalisés par le gouvernement précédent et il est impératif que le nouveau gouvernement agisse.

Quel bilan tirez-vous du pays en matière de droits humains en 2024 ?

Entre efforts collectifs vers le progrès et grands défis à surmonter, avec la corruption, les divisions ethniques sur la scène politique malgré le respect des libertés civiles et des droits, la violence fondée sur le genre et les contraintes sur la liberté journalistique perdurent. La dépénalisation de la sodomie par la Cour suprême l'année dernière constitue une étape historique et significative, mais la discrimination à l'encontre des personnes LGBTI+ reste préoccupante. Plusieurs régions sont privées d'eau potable, un droit fondamental et une nécessité.

À notre niveau, nous avons enregistré 187 plaintes pour violations des droits humains, la plupart étant des violences domestiques, des non-renouvellements de pensions de personnes alitées et des plaintes concernant des policiers de Souillac, qui ont obligé les habitants à placer des drapeaux du parti Mouvement socialiste militant (MSM) chez eux, contre leur gré, pendant la campagne électorale. Nous avons pu traiter 80 % de ces cas, mais des efforts restent à faire. Cette année, nous avons également sensibilisé 120 000 personnes à travers nos campagnes.

En parlant des élections, elles ont été marquées par un taux de participation de 79 %, mais aussi un scandale d'écoutes téléphoniques de politiciens , d'ambassadeurs et de journalistes, du jamais-vu à l'île Maurice.

Je reconnais les complexités de la campagne électorale à l'ère digitale, en particulier avec les écoutes téléphoniques de journalistes, politiciens, diplomates et de l'ancien commissaire de police (CP), divulguées par Missie Moustass. D'autre part, le droit à la vie privée des individus a été violé, notamment par l'utilisation abusive des images de personnages politiques pour inciter à la haine et influencer le vote, et j'ai personnellement porté plainte auprès du Central Criminal Investigation Department à ce sujet. Le taux de participation accru et le fait que les électeurs ont voté avec leur propre stylo sont des signes d'un électorat mieux informé et désireux d'assurer l'intégrité de son vote.

Il est essentiel de trouver un équilibre entre le droit à l'information, la liberté d'expression et le droit à la confidentialité et à la protection des données. Une plus grande transparence s'impose sur les questions qui ne sont pas explicitement couvertes par la Constitution, notamment les violations des libertés informatiques et de la protection de la vie privée. Il est impératif de garantir le Right to Recall des citoyens afin de leur donner les moyens de mettre les dirigeants devant leurs responsabilités à tout moment avant les élections s'ils ne font pas preuve d'intégrité.

Mais les bandes sonores ont également conduit le DPP à instituer une enquête judiciaire sur la mort de Steve Juliette, sur venu après une opération de la brigade antidrogue le 4 janvier 2023, la famille ayant toujours crié à la brutalité policière alors que ni la police ni l'IPCC n'avait fait avancer les plaintes...

Je dois dire, en tant qu'activiste ayant dénoncé plusieurs cas de brutalité policière, que des efforts continus sont nécessaires pour restaurer la confiance du public dans le système de justice. Cette année, nous avons enregistré une plainte pour brutalité policière : dans le sud, un policier a menacé des mineurs avec des matraques. Selon nos informations, des armes interdites telles que des tasers sont vendues à Maurice et cela révèle des lacunes systémiques qui favorisent une culture de la brutalité, notamment le manque de contrôle des autorités comme les douanes et le manque de transparence d'autres acteurs. Il y a eu des cas où des policiers ont refusé d'enregistrer les plaintes de gens parce qu'elles concernaient un collègue. Nous avons constaté le retrait de nombreuses plaintes par des personnes qui avaient été harcelées et menacées par des officiers publics après avoir dénoncé des faits. Bien que l'Independent Police Complaints Commission soit chargée d'enquêter sur les plaintes déposées contre des policiers, nous avons constaté, par le passé, des retards considérables dans leurs enquêtes. Des inquiétudes ont également été exprimées quant à la fiabilité de certaines enquêtes, soulignant la nécessité d'améliorer encore l'efficacité, l'indépendance et la transparence de cette institution.

L'année a également été marquée par des cas d'abus sexuels sur enfants et de pédopornographie. Comment affronter ce problème dans une société en constante évolution où la technologie est de plus en plus accessible aux enfants ?

L'augmentation des cas de pédopornographie et d'abus sexuels sur les enfants témoigne de la nécessité urgente de prendre des mesures globales pour les protéger. La combinaison de la pauvreté, des dysfonctionnements familiaux et de l'utilisation abusive des technologies a exacerbé la vulnérabilité des enfants à ce type d'exploitation. Il est nécessaire de renforcer la collaboration avec les différentes parties prenantes afin de sensibiliser et de plaider en faveur de cadres juridiques plus rigoureux et d'étendre ces mesures à l'ensemble de la communauté grâce à des programmes et des campagnes d'éducation.

J'ai personnellement demandé à rencontrer l'Ombudsperson for Children, mais malheureusement, notre lettre est restée sans réponse. Cependant, nous avons collaboré efficacement avec la Child Development Unit (CDU), la police à Curepipe et de la Southern Division. Nous avons également mis en place un système collaboratif de discussions dans les écoles comme celle du gouvernement James Toolsy, impliquant le responsable de l'école, les enseignants, la CDU et les parents, afin que toutes les questions liées à la protection de leurs enfants soient traitées de manière rapide et efficace.

N'est-il pas grand temps, à la suite de la pandémie, de donner à tous les niveaux l'importance voulue au bien-être mental et de mettre fin à la stigmatisation ?

La pandémie a eu un impact significatif sur la santé mentale, exacerbant des problèmes tels que l'anxiété, la dépression et l'isolement social. Il est essentiel de reconnaître que notre bien-être mental fait partie de notre droit fondamental à la vie et à la dignité pour que chacun ait accès aux soins et au soutien dont il a besoin. La sensibilisation est nécessaire pour éliminer la stigmatisation et promouvoir la compréhension. Les considérations relatives à la santé mentale doivent être incluses dans toutes les politiques et tous les programmes de santé, et un soutien doit être apporté aux groupes ciblés, notamment aux professionnels de la santé, aux personnes âgées, à la police, sur le lieu de travail et parmi les jeunes.

Quelles sont vos priorités pour 2025 ?

Nous poursuivrons nos programmes, tels que des ateliers éducatifs, des distributions de nourriture et des conseils en autonomisation des familles. Pour les enfants, nous développerons des programmes éducatifs et collaborerons avec la CDU pour fournir des services de conseil et de soutien. Pour les femmes, nous lancerons des programmes d'autonomisation économique et nous fournirons une éducation et des services de santé axés sur la santé génésique et le bien-être mental.

La toxicomanie reste une préoccupation majeure, avec des taux élevés de consommation d'héroïne et de drogues synthétiques. Nous avons l'intention de solliciter le soutien des membres du Parlement et du bureau du président pour poursuivre notre mission.

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