Le «Special Allowance Bill» concernant le paiement du 14e mois a été voté avec deux amendements, hier. Lors de son «summing up», Reza Uteem, ministre du Travail, est revenu sur les origines du paiement du 14e mois et a fait savoir que la position de l'Alliance du changement avait toujours été un paiement pour ceux touchant jusqu'à Rs 50 000. Dans la foulée, il a expliqué pourquoi cette somme avait été définie. Avant lui, ce sont le Premier ministre, Navin Ramgoolam, le ministre de l'Agro-industrie, Arvin Boolell, et le député de l'opposition, Adrien Duval, qui avaient pris la parole.
D'emblée, le ministre du Travail a fait ressortir que l'opposition n'était pas contre le projet de loi, mais uniquement contre la limitation aux employés touchant jusqu'à Rs 50 000. Reza Uteem s'est aussi attardé sur la divergence entre Joe Lesjongard et Adrien Duval concernant la paternité de la mesure. Par la suite, il a rappelé que lorsque le Parti mauricien social-démocrate (PMSD) était en alliance avec le Parti travailliste et le Mouvement militant mauricien, Xavier-Luc Duval, alors leader de l'opposition, avait posé une Private Notice Question ayant trait au paiement du 14e mois et la question portait sur un paiement limité, comme proposé dans la loi. «Cela a toujours été la position de l'opposition d'alors. Nous agissons de manière responsable.» Il a aussi rappelé que dans sa réponse, le ministre du Travail d'alors, Soodesh Callichurn, avait rejeté l'idée. Le gouvernement sortant dont a fait par la suite partie le leader de l'opposition avait été clair, a dit Reza Uteem. «Ils n'avaient pas l'intention de payer. Ne venez pas dire que c'est grâce à vous que les employés auront un 14e mois.»
Le ministre du Travail a aussi rappelé que cette mesure ne figurait ni dans le dernier Budget du précédent gouvernement ni dans le manifeste électoral. Pour Reza Uteem, qui citait l'économiste Kugan Parapen, junior minister à la Sécurité sociale, c'était une mesure désespérée d'un Premier ministre désespéré. «Le changement veut dire être transparent. C'est venir dire la vérité sur l'état de l'économie.»
Concernant la limitation aux employés touchant jusqu'à Rs 50 000, Reza Uteem a expliqué qu'il s'était appuyé sur la définition figurant dans la loi. Cependant, il a précisé avoir écouté les syndicalistes, qui estiment que ce montant doit être revu et a affirmé que ce serait fait lors d'une refonte totale du droit du travail. Quant aux amendes de Rs 5 000 par employé pour les compagnies qui ne respectent pas la nouvelle loi, le ministre du Travail a dit que le principe de la loi à Maurice est qu'il ne peut y avoir une peine plus lourde pour le non-respect d'une loi si ce même délit existe ailleurs. Comme dans la End of Year Gratuity Act, la pénalité est de Rs 5 000 par employé, il a fallu imposer cette même sanction. Parmi les entreprises qui bénéficieront des aides figurent les compagnies en difficulté et les petites et moyennes entreprises (PME). Les aides aux organisations non gouvernementales, aux associations sportives et aux corps religieux seront définies par des règlements.
Le premier orateur à intervenir, hier, sur ce Special Allowance Bill, était Arvin Boolell. Le ministre de l'Agro-industrie a tout d'abord parlé d'une promesse électorale, qui était tenue et que le paiement pour les retraités avait déjà débuté. D'ailleurs, à hier, 17 000 retraités avaient déjà touché leur 14e mois à la poste. Arvin Boolell a rappelé que ce paiement couvrirait aussi les secteurs du privé qui ne sont pas couverts par les Remuneration Orders, ce qui est une anomalie, et il a rappelé que les PME auraient des aides. Quant aux grandes compagnies, le ministre a critiqué celles qui avaient bénéficié des aides de la Mauritius Investment Corporation ou qui avaient été exemptées de la Land Conversion Tax et dans la foulée, il a rappelé que plusieurs entreprises pratiquaient déjà le paiement d'un 14e mois. Il a aussi fustigé l'ingérence de l'ancien ministre des Finances dans des instances comme le National Wage Consultative Council, qui n'avait pas la liberté d'agir de manière indépendante. Il a souligné que le peuple devait savoir que le revenu est basé sur la productivité.
Arvin Boolell a poursuivi en disant que le gouvernement aurait aimé aller plus loin mais qu'il était de son devoir d'agir de manière responsable. «Des mesures doivent être prises pour stabiliser la roupie et rétablir le pouvoir d'achat.» Il a rappelé qu'après la constitution du Conseil des ministres, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, avait expliqué la gravité de la situation mais avait précisé que la consolidation fiscale et la réduction de la dette seraient des réalités. Il a aussi affirmé que la Contribution sociale généralisée était une «malédiction» et que la relance du National Pensions Fund serait un plus pour le secteur privé.
Silence «choquant» de l'ancien ministre des Finances
Après lui, c'est Adrien Duval, qui a pris la parole. Le député du PMSD a estimé que «Missie Moustass» et la promesse du 14e mois avaient mené à la victoire massive de l'Alliance du changement. S'il a rappelé que le PMSD avait toujours été en faveur du paiement d'un 14e mois et il a dit ne pas comprendre pourquoi 55 000 employés touchant plus de Rs 50 000 en étaient exclus. «Ces personnes doivent maintenant tirer l'argent de leur poche pour payer leurs employés de maison, s'ils en ont. Cela diminue encore plus leur pouvoir d'achat.»
Concernant la justification de cette décision, Adrien Duval a dit qu'il n'était pas en mesure de dire si les chiffres étaient vrais ou faux. «Je trouve choquant que le ministre des Finances d'alors n'ait toujours pas commenté cette attaque directe», a-t-il dit. Il a aussi fustigé le silence du directeur du Bureau de l'audit, qui avait audité la dette dans son dernier rapport. Il a aussi pointé du doigt le silence de l'Acting Director de Statistics Mauritius. Le député s'est demandé si ces personnes avaient donné leurs points de vue sur l'état de l'économie et a demandé quelles avaient été les retombées du rapport State of the Economy. Le premier à en parler, a-t-il poursuivi, devrait être Renganaden Padayachy. Concernant la baisse du prix des carburants, il a fait savoir qu'elle était loin des promesses faites.
Le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a lui évoqué le contexte dans lequel ce projet de loi avait été présenté. Il a dit que cette proposition avait été faite lorsque Pravind Jugnauth avait commencé à sentir le terrain glisser. Il a ensuite comparé la manière de travailler des deux gouvernements.«Nous avons des discussions. Eux, lorsque l'empereur - l'impératrice - dit quelque chose, tout le monde doit dire oui.» Le Premier ministre a aussi expliqué que le précédent gouvernement était au courant des chiffres. «Lorsqu'ils ont dit qu'ils paieront le 14e mois, nous nous sommes dit que nous pourrons payer également.» Il a aussi tenu à répondre à Adrien Duval. Selon Navin Ramgoolam, si cette mesure avait mené à la victoire, c'était l'Alliance Lepep qui aurait dû avoir remporté les élections générales car elle l'avait proposée en premier.
Il a ensuite réitéré qu'il n'avait jamais cru dans les chiffres avancés et a rappelé à Adrien Duval que son père, alors leader de l'opposition, avait critiqué le gouvernement car le directeur du Bureau de l'audit n'avait pas eu accès à certains documents. «Nous avons des preuves que le Fonds monétaire international a demandé au personnel de l'ancien gouvernement de ne plus harceler son personnel.» Le Premier ministre a ensuite reparlé des chiffres manipulés. Pour en revenir à la limitation du paiement du 14e mois, Navin Ramgoolam a dit que le gouvernement ne pouvait pas donner l'argent qu'il n'avait pas. Il a aussi remercié l'économiste et junior minister, Kugan Parapen, pour avoir suggéré le paiement en deux tranches, ce qui soulagera la pression sur les entreprises et limitera l'inflation.
Par ailleurs, le député rouge, Farhad Aumeer, qui est intervenu sur le sujet, mardi, à l'Assemblée nationale, a peint un tableau sombre de l'économie nationale. Il a dénoncé des «manipulations financières» ayant mené à un «fiasco total», compromettant les capacités de l'État à honorer ses engagements électoraux. Le député a regretté que les travailleurs indépendants et d'autres groupes vulnérables soient exclus de cette aide. Il a proposé une alternative : accorder une allocation fixe aux travailleurs indépendants aux revenus modestes. Reconnaissant les défis budgétaires actuels, il a appelé à une solidarité nationale. Il a insisté sur la nécessité d'agir avec responsabilité pour protéger l'avenir des générations futures.
Les modalités pour le secteur public définies
Selon une circulaire du ministère des Finances, les fonctionnaires touchant jusqu'à Rs 50 000 auront droit à leur 14e mois en deux tranches. La première moitié sera payable ce mois-ci et l'autre moitié en janvier 2025. Ce bonus sera exempté de la contribution à CSG.