Anil Bachoo, ministre de la Santé, a déposé, hier, au Parlement, les rapports du «Fact-Finding Committee» et du «Medical Negligence Standing Committee» ayant trait aux décès de 12 patients dialysés, entre le 29 mars et le 21 avril 2021. Ces rapports ont été déposés à la suite d'une question parlementaire du député Farhad Aumeer, qui voulait savoir si les rapports seront rendus publics et si des soutiens seront offerts aux familles. Les constats dans ces rapports sont accablants.
Dans le rapport du Fact-Finding Committee, le témoignage d'un des patients, qui a tenu à déposer devant le comité, est très parlant. Didier Lesage était dialysé au New Souillac Hospital (NSH) depuis 2015. Il avait trois sessions par semaine. Les problèmes ont commencé lorsqu'une infirmière de l'unité de dialyse du NSH a été testée positive au Covid-19, le 25 mars 2021. Le lendemain, il a été informé qu'il devra être mis en quarantaine à l'hôtel Tamassa.
Il a été récupéré à 17 heures, a été déposé à Britannia avec d'autres patients dialysés et finalement, c'est vers 21 heures que deux bus sont venus récupérer les 140 patients, et en route vers l'hôtel, d'autres patients ont été récupérés. Lorsqu'ils sont arrivés à l'hôtel vers 22 h 30, plusieurs d'entre eux n'ont pas eu à manger alors que d'autres ont eu du briani, plat pas approprié pour les patients de leur condition. Le lendemain, c'était le même problème au petit déjeuner car ils ont reçu du bacon et des oeufs.
Il a aussi été informé que personne ne ferait le ménage dans sa chambre et qu'il devait se débrouiller seul. Le 28 mars, plusieurs patients ont été testés positif au Covid-19. Dans son témoignage, Didier Lesage a expliqué qu'après une séance, les patients sont faibles mais comme ils arrivaient à l'hôtel tard, ils n'avaient d'autre choix que de s'entraider pour regagner leurs chambres respectives car personne n'était disponible pour eux.
Le 2 avril, Didier Lesage a été testé positif au Covid-19 et a été transféré à l'unité d'isolation au NSH où quatre autres patients étaient déjà admis. Parmi les problèmes rencontrés : pas de médecin de garde, pas d'infirmiers, une visite rapide d'un médecin tous les jours et après quoi, ils étaient abandonnés à leur sort.
L'unité n'était pas nettoyée, trois machines de dialyse sont tombées en panne, le 3 avril, et les sessions ont été écourtées de trois heures à deux heures et espacées de deux jours au lieu d'un. Il n'y avait que deux infirmiers pour 84 patients. Ce n'est que le 7 avril que le personnel a été renforcé mais entretemps, plusieurs patients étaient déjà décédés. Sur ce point, Didier Lesage a expliqué au comité qu'un des patients s'est plaint de difficultés à respirer mais on lui a dit qu'il avait trop mangé et il n'a pas été mis sous oxygène. Il est décédé le lendemain matin.
Le rapport a fait ressortir le manquement autour du protocole en place. Le personnel n'était pas régulièrement testé alors qu'il était en contact avec des personnes dont le système immunitaire est faible. «Si des tests réguliers avaient été réalisés, plusieurs cas auraient pu être détectés en amont, ce qui aurait permis d'endiguer la vague de contamination au NSH.» Quant à l'ordre des dialysés, une contradiction est notée entre la version d'un infirmier et les dires de Didier Lesage. Le patient a affirmé que les patients testés positifs étaient dialysés en premier, suivis des patients négatifs. Mais l'infirmier, a, lui, dit que les patients négatifs passaient en premier et les autres suivaient. Il a aussi avancé que l'unité de dialyse était nettoyée après chaque séance.
Le transport des patients a aussi été problématique. Pourquoi les bus, dans lesquels il n'y avait pas de distanciation sociale, n'ont pas transporté les patients directement à l'hôtel ? Le comité n'a pas eu de réponses claires à ce sujet. Des patients, dont l'un était aveugle et amputé, étaient laissés seuls et devaient faire le ménage et prendre leurs médicaments eux-mêmes. Au début, les proches des patients ne pouvaient pas rester avec eux. Tout ceci a incité le comité à dire qu'il y avait, dans les premiers jours, un manque de leadership au NSH. Le manque de communication entre le personnel médical et les proches a aussi été critiqué car il y a des familles qui ont appris le décès de leur proche par le biais de la radio.
Deuxième rapport peu reluisant également
Le rapport du Medical Negligence Standing Committee n'est guère plus reluisant. Le chaos dans le transport des dialysés a encore une fois été pointé du doigt. Ce second rapport fait ressortir que les patients dialysés sont généralement faibles et nécessitent un environnement confortable mais que beaucoup d'entre eux étaient livrés à eux-mêmes au cours des premiers jours.
De plus, les 80 patients dialysés étaient mis avec 100 autres patients. Les premiers jours, il n'y avait que très peu de personnel dans le centre de quarantaine, et lorsque parmi ce personnel, certains ont été placés en isolement car ils avaient été testés positifs, le manque de staff s'est fait ressentir encore plus cruellement. Deux patients, qui n'ont jamais été testés positifs, sont morts dans la nuit et ce n'est que le lendemain qu'ils ont été découverts par le personnel.
D'ailleurs, dans la nuit du 28 mars, il n'y avait que deux infirmiers au NHS et ce sont eux qui ont dû préparer la réouverture des unités dans lesquels ils n'avaient jamais travaillé et ont dû chercher les équipements et appareils un peu partout dans l'enceinte de l'hôpital. Le même jour, avec un médecin, ils ont dû accueillir les patients en quarantaine. «In these circumstances, it cannot be denied that the standard of medical assistance and nursing care for several of the cases under investigation were grossly inadequate or simply lacking», souligne le rapport.
Ce comité précise aussi que malgré la situation difficile, il y a eu des failles et des omissions dans les soins. Dans le cas de quatre patients, le comité «found clear instances of neglect and poor treatment which may have contributed to worsening their conditions».
Dans d'autres cas, il y a eu de la négligence mais à cause du manque de documents, les responsabilités n'ont pu être situées. Dans plusieurs cas, le comité a aussi recommandé des actions contre les responsables.